Le recteur de la Grande Mosquée de Paris a repris sa plume pour défendre les Français de confession musulmane et protester contre le mépris qui est parfois exprimé à leur égard.
S’il n’y a pas d’huile, c’est la faute des musulmans !» ; «Pendant le Ramadhan, les musulmans cuisent des beignets traditionnels de rupture du jeûne et leur cuisson consomme beaucoup d’huile, d’où la pénurie !»
Un dirigeant d’une grande chaîne d’hypermarché, Michel-Edouard Leclerc étant allé jusqu’à l’absurdité de dire que durant les «fêtes de l’Aïd, beaucoup de gens achetaient de l’huile à frire pour le mouton». Il s’en est excusé mais sa bêtise a heurté les musulmans, à tort ou à raison, lorsque les propos sont si stupides.
«LES BOUCS ÉMISSAIRES DU MARASME NATIONAL»
Cette thématique dans une situation politique qui place les musulmans en otages de jeu électoral et avec ces égarements médiatiques obtus a fait réagir le recteur de la Grande Mosquée de Paris, Chemseddine Hafiz, dans une tribune publiée par Le Monde.
Il regrette que les Français de confession musulmane deviennent durant la campagne présidentielle puis législative «la cible de certains milieux qui font d’eux les boucs émissaires du marasme national. Les gesticulations et les braillements des troubadours politico-médiatiques auraient pu nous amuser s’ils ne relevaient pas du pernicieux».
Le recteur pense que cela a trop duré : «En fait, nous subissons depuis trop longtemps les divagations de ces dangereux charlatans dont la nuisance se présente sous forme de chroniques et débats télévisés, de livres chez des éditeurs dits ‘‘sérieux’’ et autres messages bien acérés et propagés sur les réseaux sociaux.
Les millions de musulmans anonymes qui ne demandent qu’à vivre en paix ne devraient pas susciter un tel mépris. Ils ne méritent pas ces blessures que leur infligent les véritables ennemis de la communauté nationale, car ils ont toujours été au rendez-vous lorsque le destin de la France était en jeu».
Contournant la thèse du grand remplacement qui consisterait à remplacer la communauté française par une communauté immigrée, Chemseddine Hafiz renverse cette rhétorique en considérant que les «dénigreurs de l’islam» «sont les véritables adeptes du «grand remplacement», celui qui consiste à remplacer un peuple fier et fort par des individus égoïstes et tourmentés, au sein d’une nation qu’ils veulent fragile et désorientée.
En vérité, ils rêvent d’une population craintive, captive d’un système où règne le chaos. Cette vision est aux antipodes de la civilisation, tout comme l’est le terrorisme par rapport à l’islam. Fière de sa diversité et de ses prouesses, la France ne saurait sombrer dans cette forme de lâcheté que lui prodiguent des marionnettes agitées par les parrains de la discorde».
«LES PERVERS DE LA RÉPUBLIQUE LA DÉSHONORENT»
Pour le recteur, «les pervers de la République la déshonorent. Il est temps de les arrêter. Qu’ils soient condamnés encore et encore ! Seule une réponse abrasive convient à ces ensorceleurs des temps modernes. Il leur faut une réponse politique et judiciaire qui se trouve dans les urnes comme dans les tribunaux.
N’en déplaise à certains, les musulmans vivent et vivront en France en citoyens égaux en droits et en devoirs. Ils ont voté et voteront encore plus dans le futur. Ils ont participé au scrutin le plus important : l’élection présidentielle. Ils ont impacté l’opinion.
C’est la meilleure réponse à cette avalanche d’insultes et de médisances qui n’ont pas outre mesure ému les politiciens, les médias ou les défenseurs des droits de l’homme».
Refusant l’enfermement, M. Hafiz ajoute que «l’islam est l’affaire de tous les Français. Aujourd’hui, notre vote oblige en premier lieu le président de la République réélu, ainsi que toutes celles et tous ceux qui militent pour construire une France plus grande.
Arrêtez de nous considérer comme des citoyens condamnés aux marges de la société».
Paris
De notre bureau Walid Mebarek