Mesures draconiennes pour endiguer la triche au bac : Méthode coup-de-poing des autorités : quel bilan ?

18/06/2022 mis à jour: 07:23
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Photo : B. Souhil

A Ghardaïa, 2 candidats ont été condamnés pour le même motif, 5 à El Menéa, 7 à Oum El Bouaghi, 3 autres à Batna et autant à Souk Ahras., et ce, conformément à la correspondance du ministère de la Justice.

Bac 2022 : 50% des candidats l’ont obtenu, les autres sont en prison.» C’est avec l’exagération et l’humour qu’on leur connaît que les réseaux sociaux ont commenté les épreuves du baccalauréat marquées par les coupures d’internet et les peines de prison prononcées contre les fraudeurs. Le fait est que les autorités ont mis en place un mécanisme répressif draconien pour éviter la triche à cet examen, le plus important du cursus scolaire.

Des mesures qui visiblement n’ont pas suffi à endiguer la triche. Et pour cause, les médias se sont fait l’écho, tout au long des cinq jours de l’épreuve, d’informations liées à des présentations devant les tribunaux et de condamnations de parents et de responsables dans plusieurs régions du pays. Un bon nombre de personnes impliquées ont ainsi été condamnées par des tribunaux depuis le début des épreuves.

A Ghardaïa, 2 candidats ont été condamnés pour le même motif, 5 à El Menéa, 7 à Oum El Bouaghi, 3 autres à Batna et autant à Souk Ahras. Et ce, conformément à la correspondance du ministère de la Justice adressée, au début du mois en cours, aux procureurs généraux près les cours de justice leur recommandant la mise en place d’une «cellule de veille et de suivi» spécifique aux délits en question.

Ils sont accusés du délit de «diffusion de sujets d’examen et de corrigés types du baccalauréat par le biais de moyens de communication à distance». Certains cas de tricheries étaient inédits, à l’exemple du candidat au bac qui s’est fait fixé un écouteur Bluetooth à l’oreille par un chirurgien à Sétif.

Le fait est qu’avec l’avènement de l’internet et des technologies de communication, les moyens de triche deviennent plus sophistiqués. Fini le temps où cela consistait simplement à envoyer un sosie passer l’examen à la place du candidat ou à dissimuler une antisèche (même si, selon des sources proches de lycéens, cela continue de se faire de façon jusque-là inédite, grâce notamment au masque de protection contre la Covid).

Aussi, les autorités algériennes, soucieuses de préserver le sérieux de l’examen, ont-elles choisi de prendre des sanctions radicales, recourant à l’incarcération, à travers un amendement du code pénal en 2020, pour prendre en   charge ce type de délits avec des peines qui peuvent aller jusqu’à 18 mois de prison ferme, assortis d’une amende de 200 000 DA.

Pour bon nombre d’Algériens, c’est le volet lié aux coupures d’internet qui est le plus exaspérant. Les épreuves sont suivies de près par l’organisme chargé de la lutte contre la cybercriminalité, entraînant des perturbations d’internet à travers tout le pays.

Même si elles sont récurrentes depuis 2016, ces coupures sont vécues comme une sanction collective. Elles deviennent particulièrement problématiques lorsqu’elles condamnent certaines activités à un arrêt total pendant cette période, et ce, au détriment de l’orientation nouvelle de l’économie nationale, censée être portée sur la numérisation, l’édification d’une économie de la connaissance et le développement des start-up.

Les professionnels du secteur estiment qu’il est possible de mettre en place un système plus efficace et moins radical, à l’instar de la détection des terminaux miniaturisés, le brouillage du réseau dans une zone déterminée ou tout simplement l’interdiction des téléphones portables.

En dépit de la situation jugée ahurissante dans laquelle le pays a été plongé, le ministre de l’Education nationale, Abdelhakim Belabed, s’est félicité de l’organisation de l’examen, estimant que cette édition a été «excellente» et que le nombre des cas de triche a «grandement reculé», et ce, grâce aux efforts de l’Etat à travers plus de 2500 centres d’examen répartis à travers le territoire national.

Cette obsession de la triche a commencé en 2016, lorsque trois agents de l’Office national des concours et examens (Onec) ont été accusés d’avoir mis en ligne les énoncés de certaines épreuves, obligeant les autorités à organiser une nouvelle session du bac.

Mais il faut dire qu’il ne s’agit pas là des premiers cas de triche à cet examen. En 1992, au deuxième jour des épreuves du baccalauréat, la presse a rapporté de nombreux cas de fraude et les autorités ont été contraintes de reconnaître une fuite de sujets généralisée, assimilée à un «complot politique».

Le ministre de l’Education nationale, Ali Benmohamed, démissionna, c’est Djilali Liabes, ministre aux Universités, qui assura l’intérim. Le baccalauréat sera refait, le 7 juillet, pour 245 000 candidats dans un climat particulièrement tendu, après l’assassinat du président Mohamed Boudiaf, le 29 juin 1992, et les centres d’examen placés sous la «haute surveillance» des policiers et des gendarmes. 

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