Manaa Lotfi Kamel. Directeur général de Sider El Hadjar : «La 3e vague de la Covid-19 a fait perdre à l’usine 5,2 milliards de dinars»

18/04/2022 mis à jour: 00:42
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Photo : D. R.
  • Sider El Hadjar, qui se heurte quotidiennement à des difficultés de tous genres, réussit à réaliser des bilans satisfaisants. Comment expliquez-vous ce paradoxe ?

Depuis 2020, Sider El Hadjar a été contraint de fonctionner tout en comptant sur des leviers de gestion appropriés et continue à procéder de la sorte en tenant compte des dernières orientations aussi bien du ministre de l’Industrie, lors de sa dernière visite en septembre 2021, que celles du président-directeur général du groupe Imetal et PDG du groupe Sider.

Les résultats enregistrés durant l’exercice 2021 et au vu des conditions dans lesquelles se sont déroulées les différentes activités de l’entreprise, les résultats ne peuvent qu’être satisfaisants et très encourageants.

Cependant, ils ont été réalisés malgré l’asphyxie financière terrible qu’a vécue Sider El Hadjar durant la période en question et qu’elle continue à vivre. Parmi ses méfaits, elle a stoppé l’efficacité, identifiée principalement au niveau de l’activité de production et ce par rapport aux différents dossiers sensibles, qui constituent des obstacles et altèrent vraiment l’atteinte des objectifs tracés.

  • Quels sont ces dossiers sensibles qui bloquent la réalisation de vos objectifs ?

Le retard dans la mise en œuvre de certaines décisions urgentes, pour faire face aux contraintes du marché (concurrents), nous préoccupe au plus haut point, parce qu’elles perdraient leur caractère d’urgence si elles n’aboutissent pas dans l’immédiat, à savoir, le dossier ANDI, nos attentes du CPE et le retard dans la mise en œuvre de la deuxième phase du Plan de développement (PLD) qui rend notre mission de maintenir nos installations en fonctionnement, avec le volume et la qualité escomptés, tout en subvenant, du moins, aux besoins du marché national de plus en plus difficile, d’où l’installation de nouveaux équipements au niveau des aciéries et la réhabilitation des lignes des produits plats (laminé à chaud, laminé à froid et la galvanisation) qui restent une nécessité absolue.

Heureusement que les multiples contraintes rencontrées avant avec notre banque, la BEA, où on éprouvait d’énormes difficultés dans l’ouverture des lettres de crédit, malgré la disponibilité des montants exigés, ont été levées par le premier responsable de cette banque qui, désormais, est tout ouïe à nos sollicitations.

  • Cette situation a-t-elle généré des conséquences négatives ?

Cette situation a obligé l’entreprise à procéder par une marche dégradée imposée de notre haut-fourneau et d’autres installations de production en aval, avec des arrêts volontaires dans le but d’assurer la jonction avec les réceptions des différents gros consommables et pièces de rechange stratégiques. Malheureusement, cette manière de faire reste le plan adapté afin de préserver les installations de production, principalement le haut-fourneau et d’assurer le minimum de production.

Par ailleurs, certaines conséquences ne peuvent être éliminées et risquent d’entamer la durée de vie du haut-fourneau, récemment réhabilité, en 2017. En somme, l’exercice 2021 a été entamé avec un haut-fourneau à l’arrêt par manque de coke durant 4 jours, et ce, par retard de réception de la cargaison planifiée, suite à l’indisponibilité du montant dans les délais.

Des arrêts francs de la centrale à oxygène. Perturbations sur réseau électrique et basse pression d’oxygène suite aux perturbations de fonctionnement de la centrale à oxygène lors de la priorisation de l’approvisionnement des établissements de santé durant la période juillet 21 - septembre 21 correspondant à la 3e vague de la Covid-19, imposant ainsi une marche dégradée de ses installations de production y compris le haut-fourneau. Cela nous a coûté une perte de production de l’ordre de 52 052 tonnes de fonte liquide, soit l’équivalent à 5205 milliards de dinars.

Il faut aussi souligner l’augmentation des prix et l’indisponibilité de la matière première, consommables, frets et pièces de rechange durant l’exercice 2021, sans pour autant pouvoir partager cela avec notre clientèle. Mieux, Sider El Hadjar continue à rembourser ses crédits bancaires selon les échéanciers mis en place, en plus du paiement des anciennes dettes, toutes origines confondues.

  • Les sidérurgistes d’El Hadjar se plaignent toujours de la qualité du minerai. Qu’en dites-vous ?

Effectivement, la qualité des minerais de fer, approvisionnés depuis les gisements de Ouenza et Boukhadra de la wilaya de Tébessa est mauvaise. Le taux de fer moyen pondéré ne dépasse pas dans le meilleur des cas les 43% de fer.

Or, moins le minerai est ferreux, plus est la consommation du coke pour le fondre. En effet, le haut-fourneau a surconsommé durant l’exercice 2021 quelque 27 532 tonnes de coke, suite à la faible teneur en fer des minerais approvisionnés à partir des gisements Ouenza et Boukhadra qui est de l’ordre de 42,89% pour une teneur exigée par le haut-fourneau et contractuelle, soit 52%. Cette quantité de 27 532 tonnes de coke représente une cargaison assurant une autonomie de 21 jours de fonctionnement du haut-fourneau.

A signaler qu’afin de maintenir le fonctionnement du complexe, tout en réalisant un volume de production consistant, de qualité, d’une manière régulière et pouvoir subvenir aux besoins de notre clientèle, les stocks de sécurité sont plus qu’indispensables aussi bien pour le coke que pour les réfractaires, les ferro-alliages et autres gros consommables prenant ainsi en considération les délais de fabrication, délais de chargement, délais de transport et le remboursement d’une partie des dettes de fournisseurs et autres créanciers, le besoin d’un montant d’exploitation est nécessaire pour nous permettre de couvrir au moins 3 mois de fonctionnement avec bien sûr les rentrées générées mensuellement par nos ventes.

Enfin, notre entière confiance est portée aux hautes autorités et bien sûr notre tutelle quant au total soutien et Inchallah à la validation de notre PLD lors d’un prochain CPE. Cela reste notre grand espoir qui nous permettra avec le vouloir de tout un chacun (management, personnel et partenaire) de réaliser tout ce qu’on attend de Sider El Hadjar. 

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