L’Algérie vient de renforcer son arsenal juridique dans sa stratégie de prévention et de lutte contre la traite humaine. Au sens de la loi n° 23-04 du 7 mai 2023, publiée au Journal officiel, il est entendu par la traite des personnes, «le recrutement, le transport, le transfert, l’hébergement ou l’accueil d’une ou de plusieurs personnes, par la menace ou le recours à la force ou à d’autres formes de contrainte…» Le texte inclut la prostitution, l’asservissement ou le service forcé, l’esclavage, le mariage forcé et l’exploitation économique ou sexuelle.
Le code de procédure pénale amendé en 2009 englobait déjà des dispositions en ce sens. Mais il fallait ériger une loi pour mieux combattre ce genre de crimes dans un contexte mondial empreint de mouvements migratoires sans précédent, ouvrant parfois la voie au trafic d’êtres humains à grande échelle.
L’Algérie s’est dotée dudit texte pour adapter la législation nationale aux traités internationaux qu’elle a ratifiés. «Même si nous sommes moins exposés à ce phénomène par rapport à d’autres pays, il n’en demeure pas moins qu’il était impératif d’élaborer un texte proactif dans cette lutte», a expliqué le Garde des sceaux, Abderrachid Tabi, devant l’Assemblée populaire nationale (APN), en mars dernier.
Les mécanismes de lutte
Il est aussi prévu des dispositions préventives en faveur des victimes. Elles leur prodiguent accompagnement, protection, prise en charge médicale, psychologique et assistance juridique afin de faciliter leur réinsertion sociale.
Une victime de la traite humaine est définie comme étant «toute personne physique qui a subi un préjudice matériel, physique ou moral résultant directement de l’une des formes de la traite des personnes prévues par la présente loi, quels que soient son sexe, sa race, sa couleur, son ascendance, sa religion, sa langue, sa nationalité, son origine nationale ou ethnique, ou son handicap».
Ces mesures sont prises en compte dans la stratégie nationale élaborée par l’Etat, et qui veille à sa mise en œuvre et à la mobilisation des moyens humains et matériels indispensables à cet effet. D’où l’implication des collectivités locales, les institutions nationales, la société civile et le Comité national de prévention de lutte contre la traite des personnes (CNLTP). Sa mission comporte la coordination avec tous les intervenants dans ce domaine, la consultation, la coopération et l’échange d’informations avec les associations et les institutions nationales et internationales.
Dispositions pénales
Les auteurs de ces crimes, quant à eux, seront passibles de lourdes peines. Selon l’article 40, la traite des personnes est punie d’un emprisonnement de 5 à 15 ans et d’une amende de 500 000 à 1,5 million de dinars. La peine encourue est la réclusion criminelle de 20 à 30 ans et d’une amende de 1 à 2 millions de dinars, si l’infraction est commise par un groupe criminel organisé ou lorsqu’elle a un caractère transnational ou si elle est commise à l’occasion d’un conflit armé.
Allusion faite aux réseaux de passeurs de migrants clandestins. Lors du débat autour de ce projet de loi, les parlementaires ont proposé l’inclusion du trafic de migrants. Proposition qui n’a pas été retenue. «Il s’agit de deux phénomènes distincts», a tranché le ministre de la Justice. Et d’expliquer que le premier intervient suite à une négociation, le second touche une catégorie vulnérable et privée de liberté. Les statistiques concernant l’Algérie font état d’une seule infraction en 2020.
Entre 2017 et 2019, neuf contrevenants ont été condamnés pour «exploitation économique», selon le rapport de l’Office onusien contre la drogue et le crime (UNODC). Entre 2012 et 2020, 800 affaires ont été jugées dans le monde, selon la même source, fournissant ainsi un aperçu plus précis du crime, de ses victimes et de ses auteurs.