En ce premier jour de la trêve, les bombardements, les tirs de roquettes, les crépitements des armes de guerre, le ronflement des moteurs des avions de chasse et des chars se sont tus, pour laisser place aux cris de joie des retrouvailles, après la libération de 90 prisonniers palestiniens, (69 femmes et 21 adolescents).
C’est à l’issue d’une angoisse de près de 7 heures et des échauffourées entre les militaires israéliens et une foule de Palestiniens en liesse, que le grand portail de la sinistre prison de haute sécurité Ofer, située, près de la ville de Ramallah, en Cisjordanie occupée, s’est ouvert pour laisser passer une longue file de grands bus blancs, aux vitres teintées, transportant les 90 détenus palestiniens, des femmes et des adolescents, devant être libérés en ce premier jour de mise en œuvre de l’accord de cessez-le feu à Ghaza.
Ils avaient été regroupés dans cet établissement en prévision de leur libération en échange de la remise à Ghaza de trois otages israéliens, par la résistance palestinienne, au Comité international de la Croix-Rouge (CICR).
Durant cette longue attente nocturne, l’ambiance festive qui régnait aux alentours de la prison, où des centaines de Palestiniens étaient venus accueillir les 69 femmes et 21 adolescents, a vite basculé vers celle de l’émeute après que l’armée a commencé à procéder à des tirs d’armes à feu, blessant un jeune Palestinien.
Un incident qui a provoqué des échauffourées, avant que le calme ne soit rétabli et le cortège des camions ne prenne le départ sous les lumières des feux d’artifice, des chants militants et les signes de victoire de la foule. L’armée israélienne avait averti les familles des détenus que les célébrations publiques pour les prisonniers seraient punies. Une mise en garde qui n’a cependant pas empêché la foule d’envahir les rues, très tard dans la nuit, pendant que les bus transportant les détenus circulaient, suivis par les véhicules du CICR.
Plusieurs Palestiniens n’ont pas hésité à se mettre sur le toit d’un des bus, hissant le drapeau palestinien et l’emblème du mouvement Hamas. Pour la première fois depuis plus de 15 mois, le crépitement des armes, les explosions de bombes, les tires de roquettes, le ronflement des moteurs des avions de chasse et des chars se sont tus pour donner libre cours aux cris et larmes de joie des Ghazaouis.
Soulagés par ces 42 jours de répit prévus durant cette première étape de l’accord de cessez-le feu, les Palestiniens ont commencé déjà à retourner dans leurs foyers, dans la majorité des cas rasés par les bombardements. Plus de 600 camions d’aide humanitaire sont entrés, parmi lesquels 300 sont arrivés au nord de l’enclave, qui a subi un siège de cinq mois.
En ce premier jour de la trêve, la population mesure l’impact de cette guerre dévastatrice que lui a été imposée par Israël. Le bilan de la Défense civile est à ce titre révélateur. Ce corps de secours a affirmé que 60% de la population de Ghaza n’a plus d’eau et 70% des bâtiments résidentiels ont été détruits. Ses unités d’intervention ont perdu 99 de leurs cadres tués par l’armée sioniste, alors que 39 autres ont été blessés et 27 portés disparus.
Depuis le début de la guerre, elle a reçu plus de 500 000 appels de détresse, parmi lesquels 50 000 n’ont pu être pris en charge, 38 000 martyrs récupérés, 42 000 personnes évacuées des zones à risque et 97 000 victimes assistées. La Défense civile a également comptabilisé 4842 corps de victimes évaporés lors des explosions. Quelques chiffres qui lèvent une partie du voile de l’horreur vécue par les Palestiniens à Ghaza.
Pour chaque femme soldat libérée, 50 détenus palestiniens relâchés
Durant cette première étape, l’accord prévoit l’arrêt par les deux parties des opérations militaires, la suspension temporairement de l’activité aérienne israélienne à des fins militaires et de reconnaissance à Ghaza, à raison de 10 heures par jour et de 12 heures les jours de libération des détenus et prisonniers, et le retrait de l’armée israélienne vers l’est et loin des régions densément peuplées, vers le long de la frontière dans toutes les zones de l’enclave, y compris Wadi Ghaza, à 700 m avant la frontière, sur la base des cartes antérieures au 7 octobre 2023.
Durant toujours cette première étape, Israël doit réduire progressivement ses forces dans le corridor Philadelphie, selon les cartes convenues par les deux parties et libérer environ 2000 prisonniers palestiniens, dont 250 condamnés à perpétuité, et environ un millier de détenus, arrêtés après le 7 octobre 2023. Samedi prochain, au septième jour de la trêve, après la libération de 4 autres otages (le jour même), l’armée israélienne se retirera complément de la rue Al Rashid, à l’est et jusqu’à la rue Salah Eddine, et entamera le démantèlement de toutes les infrastructures militaires installées.
En parallèle, les déplacés vont prendre le chemin du retour vers leurs zones d’habitation, avec l’assurance qu’Israël n’entrave pas leur liberté de mouvement et laisse entrer, dès le 1er jour de la trêve, l’aide humanitaire par la rue Al Rashid. Le passage de Rafah sera ouvert pour permettre l’entrée de quantités suffisantes d’aide humanitaire, de matériel de secours et de carburant, à travers l’accès quotidien de 600 camions et 50 citernes de carburant.
Une partie, soit 300 camions, est destinée au nord de l’enclave, vers où les véhicules seront autorisés à revenir en empruntant le corridor Netzarim, après avoir été contrôlés par une société privée déterminée par les médiateurs avec la partie israélienne, sur la base d’un mécanisme convenu. L’échange des otages et des prisonniers se fait selon un programme précis.
En contrepartie de la libération de 33 otages israéliens (vivants ou morts), dont des femmes civiles, des soldats, des enfants de moins de 19 ans, des personnes âgées, de plus de 50 ans, ainsi que des civils blessés et malades, Israël relâchera un certain nombre de prisonniers palestiniens comme suit : pour chaque otage israélien libéré, Israël relâchera 30 prisonniers palestiniens des prisons israéliennes.
En échange de la libération de 30 prisonniers palestiniens âgés et malades, le Hamas relâchera tous les otages vivants, y compris les civils âgés, malades et blessés, et pour chaque femme soldat israélienne libérée par le Hamas, Israël relâchera 50 prisonniers palestiniens.
L’échange des otages et de prisonniers dans la première phase est prévu comme suit : durant le 1er jour de la trêve, Hamas libère 3 otages civils israéliens et le septième jour 4 autres, suivront trois otages tous les 7 jours. Une fois la libération des otages vivants s’achève, Hamas restituera les corps de ceux ayant décédé. Au cours de la sixième semaine de l’accord, Israël relâchera 47 prisonniers palestiniens de «l’accord Shalit» qui ont été ré-emprisonnés après leur libération en 2011.
Pour sa part, Hamas relâchera les otages israéliens Avraham Mengistu et Hisham al-Sayyid (deux soldats israéliens détenus par Hamas depuis 2016), en échange de la libération de 30 prisonniers palestiniens. L’accord stipule que si le nombre de détenus israéliens vivants libérés n’atteint pas 33, il sera complété par le nombre de corps restants.
En échange, au cours de la sixième semaine, Israël libère toutes les femmes et enfants arrêtés à Ghaza après le 7 octobre 2023. Le processus d’échange est lié, selon l’accord, au degré de respect des termes de l’accord et comprend la cessation des opérations militaires des deux côtés, le retrait des forces d’occupation, le retour des déplacés et l’entrée de l’aide humanitaire.
Après la libération du dernier otage israélien de la première phase, le 42e jour, les forces d’occupation israéliennes commenceront leur retrait et l’achèveront au plus tard le 50e jour à compter de l’entrée en vigueur de l’accord. L’accord interdit l’arrestation des prisonniers palestiniens libérés pour les mêmes accusations pour lesquelles ils avaient été arrêtés précédemment, ni pour purger le reste de leur peine.
Les prisonniers palestiniens ne seront pas tenus de signer un quelconque document comme condition de leur libération. Les critères établis pour l’échange d’otages et de prisonniers lors de la première phase ne serviront pas de base aux échanges lors de la deuxième phase de l’accord, dont la mise en œuvre doit être négociée entre les deux parties, au plus tard le 16e jour de la mise en œuvre de la 1re phase de la rêve. Un accord doit être trouvé avant la 5e semaine de la première étape.
Dans le cas où tout se passera bien, la 2e étape de 42 jours sera celle d’un cessez-le feu durable qui repose sur la cessation permanente des opérations militaires et la reprise de l’échange de détenus et de prisonniers entre les deux parties, y compris tous les otages israéliens encore en vie, en échange d’un nombre convenu de prisonniers palestiniens dans les prisons de l’occupation, et l’armée israélienne se retirera complètement de Ghaza.
Suivra la 3e phase de 42 jours, durant laquelle les deux parties devront restituer les corps et restes des morts trouvés après les avoir identifiés et la reconstruction de Ghaza sur une période de 3 à 5 an, en plus de l’indemnisation de toutes les personnes touchées, sous la supervision d’un certain nombre de pays et d’organisations parrainant l’accord, sans oublier enfin l’ouverture de tous les passages pour garantir la libre circulation des personnes et de la marchandise.