Levée des brevets sur les vaccins anti-Covid : Difficile consensus au sein de l’OMC

14/06/2022 mis à jour: 03:23
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Photo : D. R.

Marqués par les coûteuses erreurs dans la lutte contre la pandémie de Covid-19, les ministres de l’OMC pourraient lever les brevets sur les vaccins anti-Covid et enlever les obstacles à la circulation des produits médicaux cruciaux.

Mais les divergences restent profondes. La Nigériane Ngozi Okonjo-Iweala a fait de la réponse à la pandémie une priorité depuis son arrivée à la tête de l’Organisation mondiale du commerce, en mars 2021.

Et les ONG sont venues rappeler aux diplomates l’importance du sujet en protestant hier au sein même de l’Organisation, brandissant une banderole où l’on pouvait lire : «Mettez fin à l’apartheid vaccinal !» «La propriété intellectuelle est l’antithèse du libre-échange. Les monopoles liés à la propriété intellectuelle font monter les prix et étouffent la concurrence», a déclaré à l’AFP une des manifestantes, Deborah James, en pointant du doigt les règles de l’OMC.

Deux textes sont en discussion à la conférence ministérielle de l’OMC (jusqu’au 15 juin). L’un doit faciliter la circulation des ingrédients nécessaires à la lutte contre les pandémies, l’autre permettre une levée temporaire des brevets des vaccins anti-Covid.

Ce dernier sujet divise, l’industrie pharmaceutique et la Suisse y voyant un affaiblissement de la propriété intellectuelle, alors que pour les ONG, le texte ne va pas assez loin. L’issue des discussions est incertaine. L’OMC fonctionnant par consensus, il faut que les 164 pays membres s’entendent pour conclure.

Dans son discours, le ministre indien du Commerce, Piyush Goyal, dont le pays a lancé aux côtés de l’Afrique du Sud l’idée de lever les droits de propriété intellectuelle pour l’ensemble des dispositifs médicaux Covid, a déploré que l’OMC n’ait pas «su réagir rapidement». «Les pays riches doivent faire leur introspection ! Nous devons courber l’échine de honte pour notre incapacité à réagir à temps face à la pandémie», a-t-il dit.

Mais l’Inde a suspendu ses exportations de vaccins pendant de nombreux mois pour répondre aux besoins de sa population, alors qu’elle était le principal fournisseur pour le système de partage international Covax. Pour la directrice exécutive de l’Onusida, Winnie Byanyima, «pendant une pandémie, partager les technologies est une question de vie ou de mort et nous avons choisi la mort».

Le projet d’accord concernant la propriété intellectuelle prévoit que les «pays en développement admissibles» pourront produire des vaccins «sans le consentement du détenteur du droit au moyen de tout instrument disponible dans la législation» de ce pays.

Mais les négociateurs ont laissé plusieurs crochets signalant les domaines non résolus. Ainsi, le projet d’accord propose que les pays en développement ayant la capacité d’exporter des vaccins soient «encouragés» à ne pas faire usage de la levée des brevets.

Il est également envisagé que les pays en développement dont la part dans les exportations mondiales de doses de vaccins contre la Covid-19 en 2021 a été supérieure à 10% ne puissent pas recourir à la levée des brevets, excluant de facto la Chine.

La Chine a promis de ne pas utiliser les facilités permises aux pays en développement par ce projet d’accord, mais, selon plusieurs diplomates, les Etats-Unis souhaiteraient que cet engagement soit écrit. Le texte prévoit la possibilité d’étendre l’accord aux tests et aux traitements six mois après son adoption, mais il n’y a pas encore de consensus. 

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