Les syndicats de la santé s’expriment sur le mouvement de protestation des étudiants en médecine : «Cette situation impose un débat et une réflexion»

23/10/2024 mis à jour: 04:02
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Le médecins réclament une réforme profonde du secteur de la santé en Algérie - Photo : D. R.

Les syndicalistes estiment que l’évaluation des besoins en formation dépend essentiellement du secteur de l’enseignement supérieur, «dont les responsables doivent répondre à la question de savoir si nos facultés de médecine fonctionnent d’une manière à produire ou à former des médecins».

Des étudiants en médecine sont montés au  créneau, ces  derniers jours, pour faire entendre leurs voix et crier surtout leur «désarroi». Ils ont organisé des actions de protestation à travers le pays pour réclamer plus de places pour les résidents et des perspectives  d’emploi par rapport au nombre limité des postes de concours d’accès au résidanat.

Ils ont dénoncé aussi la décision de  blocage de l’authentification de leur diplôme. Pour le Dr Mohamed Iddir, président du Syndicat national des praticiens spécialistes de santé publique (SNPSSP), la situation a besoin d’une «réflexion et d’un pilotage stratégique» impliquant le ministère de la Santé.

Le Dr Lyes Merabet, président du Syndicat national des praticiens de la santé publique  (SNPSP), pense qu’il faut engager une réflexion sur les mesures à prendre pour ralentir le flux incessant et de plus en plus imposant du produit de formation qui allonge la liste des candidats à l'emploi chaque année : «Cette réflexion doit émaner des instances officielles dont le ministère de l’Enseignement supérieur, celui de la Santé, des conseils de l’Ordre (les trois ordres) et en coordination avec les organisations syndicales professionnelles et les représentants des étudiants.» De son côté, le Pr Rachid Belhadj, président du Syndicat national des enseignants-chercheurs hospitalo-universitaires (Snechu), plaide pour l’ouverture d’un débat et faire un état des lieux.

Il a souligné un déséquilibre important dans la répartition des résidents et une défaillance majeure dans la planification des effectifs médicaux : «Nous réclamons depuis longtemps l’ouverture d’un débat pour dresser un état des lieux sur, entre autres, le nombre de médecins qui ont été formés et combien devons-nous en former à l’avenir ?

Près de 30 000 étudiants ont été admis en médecine  cette année, vous savez  que nous n’avons ni les établissements  ni le personnel adéquats pour assurer un enseignement de qualité et nul n’ignore que la spécificité de la médecine c’est la pratique», alerte M. Belhadjd qui pense que le concours de résidanat ne doit pas devenir un simple concours d’embauche, mais doit être  un outil pour recruter des spécialistes formés  afin de répondre aux besoins réels du pays.

L'encadrement pose problème

Lui emboîtant le pas, le président du SNPSSP estime que l’évaluation des besoins en formation dépend essentiellement du secteur de l’enseignement supérieur, «dont les responsables doivent répondre à la question de savoir si nos facultés de médecine fonctionnent d’une manière à produire ou à former des médecins, et ce,  pour répondre à un besoin estimé à temps».  De l’avis de notre interlocuteur, «il y a un décalage entre la production des médecins et les capacités à les faire travailler sur le terrain».

Concernant la question de l’authentification des diplômes, le Dr Iddir déplore en tant que «militant du secteur public de la santé, en tant que syndicaliste,  le fait que le  départ à l'étranger est devenu la norme». Toutefois, il est persuadé que le blocage de l’authentification n’est nullement la solution.

«Pour préserver nos ressources intellectuelles, universitaires et nos médecins, on doit revenir à la source du problème. Répondre aux préoccupations des médecins et universitaires afin de les inciter à rester dans leur pays et à servir le secteur de la santé, notamment le secteur public.» Par ailleurs, les Drs Iddir et Belhdaj appellent les autorités à revoir cette politique de création des annexes de facultés de médecine à travers le pays, car ceci va générer plus d’«excédent».

Sans parler, précisent-ils, des hôpitaux qui sont transformés en CHU, alors que l’encadrement universitaire dans les hôpitaux existant pose déjà problème. «Nous ne sommes pas  contre la création de nouveaux CHU et de facultés de médecine, mais cela doit se faire à condition de prévoir toutes les implications qu’entraînent ce genre de décisions et ou ce genre de projets.»

Le Syndicat des praticiens,  relève Dr Merabet, a de tout temps  attirer l’attention des responsables  à tous les niveaux sur les retombées  de cette situation,  dont les prémices  ont commencé à se manifester sur le terrain depuis des années. Il cite, à cet effet, la dégradation des conditions socioprofessionnelles du corps médical relevant du secteur public.

«Ces situations conjuguées alimentent la saignée en compétences médicales dans le secteur public en faveur du privé et, plus grave, entretient le phénomène de l’émigration des médecins algériens vers l’étranger», note le Dr Merabet, précisant que l’urgence aujourd’hui est de répondre à «l’impératif pédagogique» en améliorant rapidement les conditions d’accueil, de formation et d’encadrement des étudiants en préclinique, de mettre à la disposition des étudiants en graduation ou en post-graduation «des terrains de stage nommés avec un encadrement hospitalo-universitaire» et d’ouvrir «un nombre de postes de spécialités répondant aux besoins de notre système de santé». Il y a lieu également, poursuit-il, de proposer  des postes de travail aux praticiens médicaux généralistes en chômage actuellement.

Le président du SNPSP  rappelle que le secteur de la santé  publique souffre d’un manque chronique en praticiens médicaux. «C’est le cas, insiste-t-il, pour d’autres secteurs comme les collectivités locales (recrutement de médecins généralistes pour les structures d’hygiène communales), le secteur de l’éducation nationale pour les unités de santé scolaire et universitaire, les centres médico-sociaux rattachés au secteur de l’enseignement supérieur, la santé carcérale pour le secteur de la justice...»

El Bayadh : Relance de l’hôpital de 60 lits

Des travaux de réalisation d’un hôpital de 60 lits dans la commune de Boualem (El Bayadh) ont été relancés, a-t-on appris hier auprès de la direction locale de la santé.

Le directeur local de la santé, Meziane Belaïd, a fait part de la reprise des travaux de réalisation de cet établissement de santé, à la faveur de la levée de toutes les contraintes ayant été, précédemment, à l’origine de l’arrêt du chantier, indiquant qu’une allocation financière évaluée à plus de 390 millions de dinars, puisée du budget du secteur, a été consacrée à cette opération. Le délai contractuel pour la concrétisation de l’opération a été fixé à 10 mois, a précisé le DSP, relevant que les travaux affichent un taux d’avancement de près de 80%.

Dès son entrée en exploitation, le futur établissement hospitalier  s’ajoutera à d’autres infrastructures, en cours de concrétisation dans cette collectivité locale des hauts-plateaux de l’Ouest, à l’instar du projet d’hôpital à Brizina (60 lits, délai de réalisation de 20 mois), dont les travaux ont débuté récemment et pour lequel une enveloppe financière de 1,3 milliard de dinars a été débloquée, a rappelé le responsable.

Parmi les autres infrastructures en voie de réalisation dans la wilaya, il y a lieu de citer le projet d’hôpital de 80 lits, dans la wilaya déléguée de Labiodh Sidi Cheikh, pour la concrétisation duquel une allocation budgétaire de 2 milliards de dinars a été mobilisée, dans le cadre du programme sectoriel.

Le chantier du projet affiche un taux d’avancement estimé à près de 60%, sachant que le délai contractuel de sa réalisation est fixé à 20 mois, a-t-on souligné. Aussi, une étude relative à la réalisation d’un autre hôpital de 60 lits dans la commune de Rogassa, a été achevée, en attendant son inscription par  le ministère de tutelle, a indiqué la même source.

 

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