Les répercussions négatives du tourisme de masse sur l’environnement

06/01/2022 mis à jour: 00:03
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Photo : D. R.

La force d’attraction touristique de certains sites naturels peut devenir une menace pour les écosystèmes. Et bien souvent, le tourisme de masse a des répercussions négatives sur la population locale et l’environnement. A titre d’exemple : Taghit fait face chaque année à l’incivisme de certains touristes, venus passer le réveillon. Des sites naturels et préhistoriques sont alors défigurés.

«Avec mon équipe, nous avons l’habitude d’y aller tous les ans pour nettoyer le site le lendemain du réveillon. Malheureusement, nous n’avons pas pu faire ces deux dernières années en raison de la pandémie», raconte Adel Ayadi, militant écologique et fondateur de la page Make Algeria Green Clean Again. Et en termes de déchets, M. Ayadi confie en avoir vu de toutes sorte : «J’ai ramassé des couches, des bouteilles d’alcool, de l’aluminium et des débris de chicha, des déchets alimentaires et même des pneus». Et Taghit n’est pas un cas isolé.

«Le pays recèle de très nombreux endroits pittoresques comme par exemple le taghlit, le Tassili, le Hoggar et Timimoun au Sahara, les lacs et complexes de zones humides d’El Kala et Guerbes , le Lac noir de l’Akfadou et bien sûr les différentes forêts de cèdre de l’Atlas, de Pin d’Alep et de chêne comme le chêne-liège, le chêne zen et le chêne vert. Ces endroits sont devenus, en raison du tourisme individuel ou en groupe qui prend de l’ampleur ces dernières années, en de réelles décharges sauvages.

Ils sont dégradés, la biodiversité s’y raréfie, la faune est dérangée par le bruit et la destruction de leurs habitats», se désole Mourad Ahmim, enseignant chercheur en écologie et environnement à l’université de Béjaïa. «Il m’a été donné de voir des gens laver leurs voitures et leurs bus dans le Lac noir de l’Akfadou ainsi qu’à Oued Zhor. Le pire est qu’ils le faisaient avec des détergents», se désole-t-il.

Pour le chercheur, cela n’est plus de l’incivisme mais un délit. Au vu de cette situation, M. Ahmim juge qu’il est plus qu’urgent et impératif de prendre des mesures pour que cessent ces pratiques. Adel Ayadi estime que le gros problème de ces sites est qu’il n y a pas de contrôle à l’accès. «Il est bien connu que le tourisme de masse est dévastateur.

On pourrait donc réguler l’entrée et la faire payer pour financer le nettoyage. L’Etat peut également créer un parking adapté, géré par la communauté locale. La recette sera également utilisée pour financer les équipements sur le terrain (poubelles, banc publique, aire de jeux pour les enfants, signalisation). Cela va améliorer la vie des locaux et des touristes. La recette servira également à financer des emplois saisonniers en fonction de l’afflux», suggère-t-il.

L’idée, selon lui, est de donner les moyens aux locaux d’accueillir les visiteurs. C’est pourquoi il estime qu’établir une coopération entre l’Etat et le citoyen afin de faire en sorte que l’habitant et le tourisme soient heureux avant et après est primordial. «Il est aussi important de pénaliser les gens qui utilisent les feux d’artifice ou ne respectent pas les lieux mais aussi taxer davantage les agences de voyages», ajoute-il.

De son côté, M. Ahmim recommande la présence de la force publique et renforcer les prérogatives des forestiers dans le cadre de la lutte contre ces délits. «On remarque qu’il y a une mésentente entre les collectivités locales et les administrations.

Pourtant, les deux sont régies par les mêmes lois de la république. Les collectivités tolèrent une fréquentation excessive pour faire rentrer de l’argent dans leurs caisses en louant les espaces comme parkings et on connaît tous le comportement des ‘’parkingueurs’’», précise-t-il. Suggérant aussi de verbaliser les délinquants. La verbalisation peut, selon lui, aller d’une amende à une réquisition sous surveillance de la force publique pour nettoyer les lieux salis et pourquoi pas la mise en fourrière du véhicule du délinquant pris en flagrant délit.

«Malheureusement, on ne peut plus parler de sensibilisation, car cela n’a rien donné. Aujourd’hui, il faut sévir dans un cadre légal et organisé. Nos responsables doivent vraiment se pencher sur cette situation et prévoir des textes de lois avec mesures coercitives», conclut M. Ahmim. 

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