Les leçons de la nature

19/02/2023 mis à jour: 02:21
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Il est de notoriété publique et particulièrement des scientifiques que notre pays est situé sur une faille sismique non négligeable. Si l’intensité des secousses telluriques n’égale pas celles du Japon ou de la Turquie, les conséquences sont aussi dramatiques, voire pires qu’ailleurs. La différence réside dans les moyens technologiques et organisationnels mis en œuvre pour limiter l’ampleur des dégâts. Le caractère imprévisible de ce phénomène naturel implique une culture spécifique capable d’assimiler aussi bien les risques encourus que les gestes salutaires pour y faire face.

Au Japon, la vie est vue sous le prisme des séismes. Cette seconde nature, acquise grâce à une sensibilisation permanente de la population, a développé un comportement de masse rationnel en mesure de s’adapter à la pire des situations. Le même souci majeur a donné libre cours à l’esprit créatif dans le domaine des procédés technologiques. Ces inventions parasismiques sont alors exploitées rapidement dans tous les secteurs de la vie active. Elles viennent ainsi enrichir une réglementation basée sur des données archivées depuis la profondeur de l’histoire sismique du pays. Le second pilier incontournable de cette culture du risque est bien sûr l’application stricte des normes réglementaires de prévention adaptées à chaque secteur. Il va sans dire que le bâtiment, les ouvrages d’art ou les autres travaux publics ne sont pas les seuls soumis au contrôle drastique des strictes consignes de réalisation. En dernier lieu arrive le volet de l’organisation des secours basée sur la rapidité et l’efficacité des interventions opérées sur les lieux de la catastrophe.

Il reste à espérer que pareil esprit s’empare de nos décideurs pour parer au péril sismique bien présent chez nous aussi. Si les pics des magnitudes sont moins graves qu’ailleurs, il n’en demeure pas moins que les conséquences sont autant catastrophiques que celles des grands tremblements de terre dans les zones à forte sismicité. L’explication à cette équation peu particulière réside dans la différence de la sensibilisation de la population face à cette réalité géologique fortement stressante. La prévention antisismique ne semble guère retenir toute l’attention qu’il faut des pouvoirs publics. Les récentes démolitions des bâtiments prêts à être livrés à leurs acquéreurs prouvent un certain laisser-aller quant au suivi des chantiers de construction. Les organismes de contrôle des normes de sécurité contenues dans les cahiers des charges peinent à remplir leur mission dans les temps qu’il faut. Cela s’ajoute à la menace du vieux bâti qui constitue l’essentiel de nos grandes villes. La forte concentration de la population dans le tissu urbain finit par remettre en cause le schéma de l’organisation de secours (plan Orsec) qui s’articule autour des hôpitaux, aujourd’hui encore, nichés en plein cœur des quartiers populaires. Toute cette configuration n’est pas pour faciliter l’acheminement des secours et encore moins de permettre le transfert urgent des blessés. Notre Protection civile, bien aguerrie, ne saura alors déployer, sur le terrain, toute son expertise de secours acquise à travers les successifs drames planétaires. Le déclic salvateur viendra-t-il de ce drame turco-syrien ayant fait plus de 41 000 morts sans compter les blessés et encore moins les sans-abri ?

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