Les mesures protectionnistes et les politiques de déréglementation de Donald Trump ont provoqué un séisme dans le secteur technologique américain. Les tarifs douaniers imposés par le président américain, Donald Trump, pourraient remodeler l’industrie technologique américaine.
La Big Tech – comprenant des géants comme Apple, Nvidia, Amazon, Meta et Tesla – est particulièrement vulnérable. En effet, ces entreprises s’appuient essentiellement sur des fournisseurs et des usines situés dans des régions comme la Chine, le Vietnam, l’Inde et la Malaisie, toutes touchées par les nouvelles taxes. Par exemple, Apple, qui assemble une grande partie de ses iPhones en Chine, pourrait voir ses coûts de production augmenter de manière significative, avec des droits de douane potentiels atteignant 54% sur certains produits chinois.
De même, les services cloud de Microsoft et Amazon, ainsi que les semi-conducteurs de Nvidia pourraient être impactés par des hausses de coût ou des perturbations dans les chaînes d’approvisionnement.
Malgré leur soutien initial à Trump, notamment de figures comme le milliardaire Elon Musk et, dans une moindre mesure, d’autres leaders du secteur (Mark Zuckerberg, PDG de Meta, et Jeff Bezos de Amazon), ces entreprises se retrouvent actuellement dans une position délicate. Cette situation paradoxale montre que même l’allégeance politique ne garantit pas la protection contre les conséquences économiques des politiques mises en œuvre. Apple, Amazon et d’autres entreprises technologiques dépendantes des chaînes d’approvisionnement mondiales sont celles qui risquent le plus de perdre des politiques commerciales du président américain.
Par exemple, le constructeur automobile Tesla, dont Elon Musk est l’un des fondateurs, dépend fortement des batteries et des composants fabriqués en Chine et en Europe. De même, Apple, dont les produits sont assemblés en grande partie en Asie, pourrait voir ses marges rognées par des coûts supplémentaires, tandis que Nvidia et Intel, leaders dans les semi-conducteurs, font face à des défis similaires en raison de leurs chaînes d’approvisionnement globales. Les prochains mois seront cruciaux pour voir si ces entreprises pourront influencer Trump ou s’adapter aux nouvelles réalités économiques sans subir des dommages importants.
Ces mesures, qui comprennent un tarif douanier minimum de 10% sur la plupart des pays et de nouveaux droits d’importation élevés sur les principaux alliés commerciaux des Etats-Unis, comme l’Europe, la Chine, le Vietnam, l’Inde et la Corée du Sud, ont fait plonger les actions après la clôture. Les cours des actions Meta et Nvidia ont chacun chuté d’environ 5%, selon CNBC, tandis qu’Apple, la marque à la pomme, et Amazon ont chuté d’environ 6%. Le fabricant d’iPhone réalise environ la moitié de son chiffre d’affaires en vendant des téléphones fabriqués en Chine et en Inde, tandis que certains de ses autres produits sont fabriqués au Vietnam. La plateforme d’achat en ligne d’Amazon est également forte-ment dépendante des produits vendus par des commerçants tiers en Chine.
Transformation du commerce mondial
Ces nouveaux tarifs douaniers posent un véritable dilemme aux entreprises technologiques : augmenter leurs prix et contribuer ainsi à l’inflation ou réduire leurs marges bénéficiaires au détriment des investissements et des créations d’emplois. Ces baisses de marché ne sont peut-être qu’un début.
De nombreux économistes préviennent que «la Maison-Blanche a déclenché l’une des plus importantes transformations du commerce mondial depuis des décennies», ce qui pourrait entraîner une hausse des prix pour les consommateurs américains et une inflation accrue.
Dans le secteur technologique, les droits de douane imposés par Trump pourraient porter le coup le plus dur au commerce électronique. Sur X, certains utilisateurs ont exprimé des sentiments mitigés, certains voyant dans ces taxes une manière de forcer les GAFA à payer davantage aux Etats-Unis, tandis que d’autres s’inquiètent des conséquences pour l’industrie tech et les consommateurs.
Rappelons que depuis le 20 janvier, les géants des TIC ont perdu 1800 milliards de dollars de capitalisation boursière. «Un Trump qui essaie de favoriser l’économie américaine n’a pas pris conscience que ce qu’il fait pour les Etats-Unis a des conséquences au niveau global», note Xavier Degraux, formateur et consultant en marketing digital.
De son côté, Marianne Lumeau, économiste à l’Université de Rennes, apporte un éclairage intéressant : «Le but de Donald Trump est de pousser les industries américaines, dont celle de la tech, à la réindustrialisation. Mais les filières de production sont aujourd’hui complètement internationales, et les pays asiatiques disposent de compétences qui n’existent plus du tout aux Etats-Unis, ni même en Europe.»
Mais au-delà des droits de douane directs, les géants technologiques américains font face à un risque potentiellement plus dévastateur : les mesures de rétorsion venant de l’étranger, particulièrement de l’Union européenne.
Le Vieux Continent, sanctionné à hauteur de 20% par les droits de douane, prépare déjà sa riposte. La France a annoncé début avril courant que «l’UE travaillait sur une taxe ciblant spécifiquement les services numériques des Gafam».
L’avenir du secteur technologique américain dépendra largement de sa capacité à s’adapter à ce nouveau paradigme politique et économique. Kamel Benelkadi