Nous devons rappeler, tout d’abord, que le fonctionnement actuel de l’Etat algérien est structuré administrativement et géographiquement en 58 wilayas réparties sur une superficie territoriale de 2 500 000 millions km2 et chaque wilaya couvre un nombre précis de daïras et de communes. C’est dans ces 58 wilayas et ces 1571 communes que les populations vivent.
C’est un sujet auquel nous sommes particulièrement sensibles, sachant que les collectivités locales sont le cadre de la vie quotidienne de millions d’Algériens et d’Algériennes qui s’y rencontrent collectivement le travail salarié. Cela doit nécessairement nous interpeller sur la manière dont fonctionnent nos collectivités locales, puisqu’elles gèrent chacune un territoire de l’économie nationale et une grande partie des programmes d’investissements publics, mais les choses n’avancent pas facilement. Nos APC et APW sont en train de perdre de plus en plus de leur importance socio-politique, de leur représentativité, ainsi que de leur rôle dans la gestion locale, alors qu’elles devraient être l’expression réelle des préoccupations et des inquiétudes des citoyens. Là également intervient le concept de contribuable intéressé à l’importance de l’utilisation et du contrôle de l’argent public et la rentabilité des finances publiques dans le développement local. En somme, il s’agira de développer une nouvelle vision socio-économique et la modernisation de l’administration au concept de démocratie participative qui apportera des solutions pérennes et légitimes à des problèmes locaux pour construire ensemble un nouveau projet de société d’envergure, celui de la construction d’une Algérie nouvelle, comme l’a souhaité le président de la République, Abdelmadjid Tebboune lors de la rencontre gouvernement-walis.
En effet, selon les statistiques, près de 70% de la population algérienne vit aujourd’hui via la rente pétro-gazière et 70% de nos besoins sont importés. Ajouté à cela, cette pression démographique en forte croissance entre 2 et 3%/an non contrôlée et qui pousse les citoyens à s’établir dans les villes, dont le taux d’urbanisation s’établit à près de 65% et près de 1000 sur les 1541 communes du pays sont classées rurales et pauvres. Ce qui peut inquiéter l’équilibre de l’économie algérienne entre l’offre et la demande présent et futur du pays. Alors que l’action économique locale est enrichie de toutes les vertus, car l’arrivée d’entreprises ou d’investisseurs sur un territoire accroît la transformation des matières premières et la création de richesses ainsi que la diversification des ressources financières. Cela permet en conséquence la mise en place d’actions dans des domaines qui touchent directement la population locale (habitat, culture, loisirs, aide sociale...). D’autres effets bénéfiques pour le territoire les possibilités d’emploi des habitants, dynamiser l’image du territoire et poser ainsi les bases du développement d’une économie locale future. C’est du moins ce qu’on espère dans cette dynamique, à savoir rompre avec le modèle d’économie de rente en favorisant l’émergence d’une classe d’entrepreneurs et d’investisseurs nationaux et étrangers capables de prendre des risques et de relever les défis technologiques et managériaux induits par les exigences de l’économie de marché dans l’économie nationale pour notre développement économique et social qui résulte d’un défi industriel et technologique pour la création de richesses et d’emplois. En réalité, l’économie de marché vise à désengager l’Etat des tâches et responsabilités de gestion et à le libérer du financement de tout Etat, car l’économie de marché est toujours la plus grande absente, alors que la mondialisation de l’économie se fait et se développe aujourd’hui avec l’action et les stratégies des marchés. Ce qui a fait d’ailleurs manquer à l’Algérie ses chances de s’intégrer dans le processus de la mondialisation et la globalisation de la finance et de l’économie, dont entre autres l’organisation mondiale du commerce (OMC), à l’instar de la Chine socialiste «pur et dur» est membre de l’OMC et s’accommode parfaitement du libéralisme économique qui lui permis aujourd’hui de devenir la plus grande usine au monde. Elle se doit par conséquent de se conformer, d’une façon générale, aux standards internationaux, dont ceux des règles et mécanismes de l’économie de marché.
La wilaya est dotée de deux organes
1- Une Assemblée populaire de wilaya (APW), organe délibérant, et un wali, organe exécutif délégué du gouvernement.
2-Une assemblée populaire communale (APC) est composée de commissions permanentes. Le président de l’APC est assisté d’un secrétaire général de la commune, qui coordonne les différents services de la commune et les anime, et de quatre vice-présidents. La commune est normalement l’assise de la décentralisation et le lieu d’exercice de la démocratie participative, l’initiative et l’action locale, la citoyenneté et la légitimité populaire. Elle représente le cadre dans lequel s’exprime la volonté du peuple et s’exerce le contrôle de l’action des pouvoirs publics, ainsi que le cadre de participation du citoyen à la gestion des affaires communales, consacrant à cet effet la démocratie participative. La commune est dotée de la personnalité morale et de l’autonomie financière en vue de satisfaire les besoins des populations et d’améliorer leurs conditions de vie.
Dans sa région, le wali jouit presque des pouvoirs présidentiels, tous ces pouvoirs font du wali un dépositaire de l’autorité légale de l’Etat- et l’unique représentant du gouvernement, mais aussi très controversé au moment où beaucoup de pays à travers le monde optent pour une régionalisation avancée et que des élus sont impliqués dans la gouvernance et la gestion locale. En Algérie, le wali concentre entre ses mains tous les pouvoirs de l’Etat. Sincèrement, «l’administration n’est pas un pouvoir suprême», à l’heure de la démocratie participative, le pluralisme et l’économie de marché, consacrée par la Constitution du pays, mais tout simplement la gestion et le développement des services publics et de l’environnement à assurer, à la collectivité nationale et aux agents économiques. Ainsi, une gouvernance locale et une responsabilité partagées et légitimées, en considérant que l’on ne peut pas continuer à faire de l’économie une affaire exclusive de l’Etat, pour une sortie de crise et préparer l’avenir face à l’évolution des mutations mondiales des sociétés.
Aujourd’hui, les bons walis-managers et présidents d’Apc-entrepreneurs sont ceux qui en savent utiliser les marges de manœuvres, dont-ils disposent dans leurs territoires et définir une stratégie de développement économique pour servir au mieux les intérêts de leurs régions et les populations, en donnant une image fidèle qui correspond à la réalité économique de l’entreprise et de l’investisseur. Par conséquent, sortir le pays de son immobilisme économique, dont notamment le renforcement des moyens financiers des collectivités devrait, par ailleurs, passer par le recours aux prêts bancaires pour financer les dépenses d’équipement et la fiscalité locale pour financer leur budget de fonctionnement. Comme aussi la participation des collectivités locales dans le capital social des entreprises ou des investisseurs. Oui, une économie sans développement de l’entreprise ou de l’implication de l’investisseur est une économie nécessairement administrée. Les élus ont un rôle d’initiative considérable à travers la politique du développement local, dans la mesure où le président d’APC dorénavant établira le programme de modernisation, d’équipement et de développement de sa ville ,dont il a été élu en collaboration avec les services de l’Etat qui servent de base aux propositions budgétaires annuelles que sont amenés à faire les walis en vue de la préparation du budget d’équipement de l’Etat. Elle répond à la volonté de la décentralisation des pouvoirs et donc de favoriser une participation directe du citoyen à la gestion de sa vie quotidienne. Ce pouvoir se traduit dans la gestion décentralisée, l’autonomie financière, du patrimoine communal, l’économie locale et les activités culturelles, sociales et sportives.
On devrait prendre comme exemple édifiant :
«Ce peuple vietnamien est le fait aussi de ses élites qui était moins développé que nous en 1970, pays non pétrolier et à peine sorti d’une longue et meurtrière guerre menée contre les américains pour sa libération est de nouveau devenue un pays émergent »
«Je n’ai pas besoin d’ordinateur, j’ai Attali, né en Algérie, disait François Mitterrand, président français».
Essayons de mieux nous comprendre sur la question de la véritable réforme à faire dans les collectivités locales, qui résident dans la réforme des finances et de la fiscalité locales pour parvenir à assurer les bases d’une véritable autonomie de gouvernance et de gestion territoriale qui attire le plus les investisseurs étrangers(IDE). Cet objectif requiert une nouvelle philosophie et une nouvelle politique économique porteuses de réformes structurelles profondes qui pourraient notamment s’articuler autour de territorialisation des réformes sectorielles et de l’évolution économique et sociale des sociétés modernes qui rend de plus en plus nécessaire l’information des citoyens. Et plus à même de prendre en charge les préoccupations des populations. Cela contribue à la confiance des citoyens envers l’administration locale et à créer un véritable développement économique local, dont ses socles sont : la création d’entreprises locales qui valorisent les potentialités locales comme leviers de l’équilibre régional, de la promotion de l’économie nationale, de la décentralisation et d’une politique locale réformée axée l’optimisation des finances et de la fiscalité locales pour un développement socio-économique territorial et s’adapter à la nouvelle économie hors hydrocarbures qui imposent aujourd’hui, à instaurer une véritable culture de la gouvernance et de la gestion locale et d’en finir avec la gestion de façade qui consiste à ne réagir que sur instruction de l’administration centrale.
Certes, la volonté politique existe aujourd’hui, mais il y a peut-être lieu de rappeler que «gouverner, c’est prévoir». Cette formule est universelle et bien connue, mais n’a jamais inspiré ceux qui ont présidé aux destinées de l’Algérie qui demeure confrontée à l’équation difficile, face à un contexte énergétique mondial incertain pour continuer à assurer la croissance et préserver la stabilité sociale. Il est temps que l’on définisse en toute transparence la rente des hydrocarbures et le rôle et la place des collectivités locales dans l’échiquier politique et économique. Que de temps perdu après 33 années de libéralisme économique, nous avions toujours voulu faire du développement local en nous basant sur la rente pétro-gazière, mais à aucun moment nos choix n’ont porté sur l’économie locale selon les règles et les mécanismes de l’économie de marché que nous n’avons cessé de plaider depuis l’avènement des réformes en 1989. Faut-il le rappeler, que l’Etat n’a pas économisé ses efforts pour renforcer les financements des collectivités locales, dès lors que ces dernières restent excessivement dépendantes du budget de l’Etat. Plus de la moitié de nos communes, soit près de 65%, sont déficitaires, alors que les communes les plus riches ne représentent qu’environ 7% de l’ensemble des APC. Rappelons encore que 58% des recettes communales proviennent de la TAP, 35% de la TVA et que les autres impôts ne représentent que 4% de la fiscalité locale : l’efficience des biens immobiliers des communes ne dépasse pas les 7% des ressources locales. Ainsi, nos communes, n’ont pas encore des capacités de créatrices de richesses et d’emplois. En revanche leurs budgets explosent. Selon «le défunt ministre des finances Abderrahmane Benkhalfa, 99% des recettes fiscales de l’Etat proviennent de 12 wilayas seulement». Il va sans dire que l’Etat ne profite que peu des collectivités locales et des entreprises, faute d’une véritable politique locale et budgétaire. La véritable réforme à faire dans les collectivités locales, réside dans la réforme des finances et de la fiscalité locales.
L’Algérie s’est dotée d’une économie locale dans les années 1970, où des milliers d’entreprises locales (EPL) ont vu le jour dans chaque commune. Malheureusement, cette économie futuriste pour lutter contre les disparités régionales, fut abandonnée dans la décennie 1980, suite à cette fameuse restructuration organique et financière des entreprises publique(EPE), menée dans la précipitation et l’avènement du programme anti-pénurie (PAP) pour concrétiser le fameux slogan «pour une vie meilleure». Depuis, notre industrie ne représente plus que 5% du PIB (contre 18 à 25 % dans les années 1970). Le service de la dette est passé, entre 1980 et 1989, de 32% à 75% du PIB.
D’où la nécessité de mettre en place un nouveau mécanisme de gouvernance territoriale qui est celui, de notre point de vue, de la régionalisation, comme nouvelle perspective des collectivités locales, consistant à la mise en place des régions économiques qui seront placées sous l’autorité d’un conseil constitué de membres élus et de l’administration locale et la création d’une banque d’investissement des territoires. Il est donc vital que l’on doit cerner deux mesures majeures prônant la décentralisation de la décision économique synchronisant une politique locale compte tenu de l’importance de l’implication des élus, de la presse qui devrait augmenter avec son pouvoir universel d’un conseil de l’ordre pour le bon fonctionnement de la démocratie participative, des élites locales, des citoyens d’honneur, des organisations professionnelles et de la société civile en général pour une intégration effective et positive de l’économie nationale, qui vont marquer positivement cette nouvelle architecture d’une Algérie nouvelle, gage d’une réelle économie locale légitimée.
La première mesure : la réforme de l’administration, fondement de la consécration des principes d’un véritable Etat de droit, et la régulation économique plus dynamique aux normes et éthiques internationales, la qualité de la réglementation, la lutte contre la bureaucratie et la corruption, la gestion des fonds publics, l’organisation régionale, la gestion des services publics, la gestion des villes, l’assainissement de l’environnement, le rôle et place de la société civile et des élites.
La seconde mesure : la réforme de l’administration économique conforme au droit privé fondement de l’efficacité économique qui demeure la préoccupation majeure des investisseurs. Cela suppose la simplification davantage des conditions d’installation, de liberté de création d’entreprises, le respect du droit commercial, la protection des droits de propriété industrielle et intellectuelle, règles et lois sur la concurrence, la qualité du système fiscal, la qualité du système bancaire et, enfin, laisser émerger la libertés d’initiative et les idées novatrices porteuses de projets d’investissements, et ce, en fonction des programmes économiques pour lesquels les élus sont élus. M. A.