Depuis la crise économique mondiale de 2014, le Trésor public n’est plus alimenté par la planche à billets, mais essentiellement par le produit des exportations des hydrocarbures, dont la guerre entre la Russie et l’Ukraine a dopé les prix.
L’argent provient aussi des ventes de divers produits industriels et agricoles à l’international, certes modestes, mais en hausse sensible. Arrivera-t-on à renverser la vapeur, c'est-à-dire que les exportations hors produits énergétiques dépasseront largement celles du pétrole et du gaz ?
Pour que l'Algérie, enfin, ne soit plus à la merci des fluctuations des cours sur les marchés mondiaux ou d’un conflit majeur, comme c’est le cas actuellement, et pour que s'opère cette rupture tant attendue depuis des décennies avec la rente des hydrocarbures qui, au fil du temps, a fini paradoxalement par devenir une sorte de malédiction pour le pays, seule une partie de cette rente est parvenue à la population, le reste a été bradé, gaspillé ou détourné, le summum fut atteint durant la période Bouteflika. La notion même de travail productif a été dévalorisée, alors que le pays avait besoin de millions de postes d’emploi pour faire face à la hausse constante de la population. La sécurité alimentaire était hypothétique, tant il fallait chaque année importer l'essentiel des produits agricoles de base (blé, sucre, café, lait...). La rupture avec le passé, il faut y aller résolument, mais cela exige de l’engagement politique, du sérieux et de la constance sur le terrain. Les pouvoirs publics semblent y croire en redéfinissant les règles de l’investissement, en améliorant le climat des affaires, en initiant des financements alternatifs (banques islamiques) et en encourageant le transfert de l’argent de l’informel dans le circuit formel. Cette dynamique réformatrice a besoin de temps pour se bonifier sur le terrain, ce qui n’est pas évident au vu du risque permanent que les marchés ne se retournent en cas de cessation du conflit russo-ukrainien, de faiblesse de la demande mondiale du fait de la récession ou du renchérissement de l’euro par rapport au dollar américain. La cagnotte d’argent placé dans les banques internationales pourrait être rapidement asséchée, comme ce fut le cas des réserves de change placées du temps de Bouteflika et qui ont fondu de 120 milliards de dollars à 40 milliards en l’espace de six années. Ce risque serait exacerbé par l'excès de la dépense publique, importante en 2023 selon la nouvelle loi de finances et par les engagements sociaux pris par les dirigeants politiques. Ceux-ci sont nécessaires mais leur coût est élevé. Certes, il y aura encore à court terme une certaine embellie financière générée par les contrats à long terme signés dans le domaine des hydrocarbures, le gaz essentiellement. Mais l'Algérie devra tenir compte du contexte international. Les pays consommateurs font beaucoup de progrès pour promouvoir les énergies alternatives, tandis que le marché mondial des hydrocarbures fluctue par rapport aux évolutions de la guerre entre la Russie et l’Ukraine, comme il est sensible aux pressions américaines pour faire baisser les prix mondiaux. La demande fluctuante de l'économie en Chine est également à prendre en compte, ce pays étant un énorme importateur d’hydrocarbures.
Sur le plan interne l'Algérie est également tributaire de l'évolution très forte de la demande interne en produits énergétiques du fait de l’explosion démographique et de la très forte urbanisation de sa population.
Pour compenser cela, les autorités encouragent les efforts d’exploration d’hydrocarbures. Ils devront aussi honorer les contrats d’exportation. La production actuelle de gaz est actuellement de près de 102 milliards de mètres cubes de gaz, dont la moitié est consommée localement. Pour 2023, est programmée une production de 100 mds de mètres cubes de gaz destinée exclusivement à l’exportation. Dans cet ordre d’idées, l’Algérie et l’Italie ont convenu de relancer le projet d’un deuxième gazoduc, le Galsi en l’occurrence, pouvant transporter aussi bien le gaz, l’électricité, l’hydrogène que l’ammoniac. C’est une bonne idée que de se tourner franchement vers les énergies alternatives longtemps ignorées. Ce sont les produits énergétiques d’avenir, spécialement l’hydrogène et le solaire, et c’est ce qu'il faut pour la sauvegarde de la planète frappée de plein fouet par le dérèglement climatique.