Le Tourisme national : Réalités et perspectives

12/03/2023 mis à jour: 06:04
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De l’avis de tous, du moins la majorité, notre tourisme n’arrive pas depuis longtemps, malgré ses atouts indéniables, à exprimer pleinement ses capacités. Quelles en sont les causes profondes et systémiques ?

D’emblée, il me paraît nécessaire de préciser qu’il n’est absolument pas dans mon intention de dénigrer, à travers cette modeste contribution, tous les efforts fournis au service du développement du tourisme, encore moins de douter de la volonté sincère qui a animé tous les intervenants dans le processus de mise en tourisme de l’Algérie, à travers toutes les époques qui ont jalonné l’histoire de notre tourisme.

Toutefois, il faut de temps en temps prendre du recul pour regarder en face sans complexe la réalité de notre tourisme, sans autre but, que de contribuer à élever la cadence du processus de son développement et de donner plus de consistance à son contenu.

En effet, et malgré les améliorations apportées et les avancées constatées à tous les niveaux de l’activité touristique, il serait intellectuellement malhonnête et professionnellement irresponsable de ne pas admettre que personne n’est pleinement satisfait des performances de notre tourisme, en comparaison avec ses formidables ressources,  d’une part, et en prenant en compte les ambitions affichées depuis longtemps, pour la construction d’une destination Algérieperformante et rayonnante, d’autre part. D’abord, les décideurs eux-mêmes qui de tout temps œuvrent à faire du tourisme un levier de développement économique et un facteur de cohésion sociale, mais qui restent sur leur faim par rapport aux résultats mitigés du secteur du tourisme. 

Ensuite, les professionnels, qui malgré leur savoir-faire et leurs talents, sont freinés dans leurs élans de conquête des marchés touristiques internes et internationaux. Enfin, même le citoyen lambda s’interroge, à juste titre, pourquoi notre tourisme ne croit pas proportionnellement à la richesse et la qualité de son potentiel ? 

Sur la forme, la question du citoyen est tout à fait légitime, car si l’on considère uniquement son potentiel, notre pays occuperait depuis longtemps une place de choix sur la scène touristique internationale.
Force est de constater cependant que ce n’est malheureusement pas le cas, du moins pas encore, car sur le fond, il existe une différence de taille entre le statut de «beau pays» qui est une réalité et le statut de «destination touristique avérée» qui tarde à se dessiner et dont l’annonce est retardée d’une décennie à une autre. 

L’Algérie est indéniablement un très beau pays, malgré son potentiel, elle tarde à se positionner comme une grande destination, courtisée par les marchés internationaux des voyages et capable de répondre à leurs attentes. Il est de toute évidence que le passage du premier statut cité plus haut, au second, passe inévitablement par la capacité de transformation du gisement exceptionnel existant en Algérie mais encore dormant, à une offre touristique fiable qui s’intègre parfaitement dans standards universellement admis. 

Cette capacité de transformation du gisement touristique tourne malheureusement à un rythme lent, qui ne permet pas à la destination Algérie de s’intégrer avec force et durablement dans les circuits des marchés internationaux. Beaucoup d’experts se sont penchés sur la problématique du retard de notre tourisme, par rapport aux attentes et aux mutations profondes que connaît le tourisme dans le monde.

Malgré leur pertinence, la plupart des analyses faites à ce sujet s’attardent beaucoup plus sur les conséquences et les manifestations du phonème du retard, plutôt que sur les causes structurelles qui l’ont engendré.

C’est ainsi que les experts justifient, par exemple, le niveau de performance du tourisme en Algérie, par la faiblesse de la qualité, le manque d’infrastructures d’accueil et l’inefficacité de l’action de promotion… entre autres. Dans l’absolue, cette logique se tient, mais à mon sens, la véritable question que l’on devrait se poser est la suivante : Pourquoi toutes ces insuffisances persistent-elles depuis des années ? pourquoi n’arrive-t-on pas à les éradiquer du moins les atténuer, malgré la bonne volonté qui anime aussi bien les décideurs que les professionnels ? Est-ce que notre tourisme est condamné à se débattre dans les mêmes sempiternelles contraintes ? 

Pour ma part, les raisons qui expliquent cette situation avant d’être techniques sont structurelles, car les mêmes approches mènent aux mêmes conséquences, d’où la question, n’est-il pas temps de changer de fusil d’épaule ?

Ces raisons peuvent être analysées sous les angles suivants :
•Le vrai faux problème des moyens ;
•La vision et la stratégie en matière de développement touristique ;
•La boîte à outil nécessaire au développement du tourisme ; 

1-Le vrai faux problème des moyens :

La volonté politique en faveur de l’essor du tourisme en Algérie est sans équivoque et a été de tout temps clairement affichée par les pouvoirs publics ; ça ne pouvait pas être autrement, car un secteur aussi porteur économiquement et socialement et recelant de tant d’atouts ne pouvait pas rester en marge des efforts de développement du pays.

Mais le bémol réside dans le fait que cette volonté politique en apparence ne soit pas traduite dans les faits par la mise à disposition du secteur du tourisme des moyens à la hauteur de l’enjeu de développement d’un secteur considéré comme stratégique.

Ceci ne veut pas dire que rien n’a été fait dans ce sens. Bien au contraire, le secteur à toujours bénéficié d’un soutien la part de l’Etat, mais cet apport reste loin des besoins et des attentes pour asseoir une véritable politique de développement touristique soutenue et durable . D’ailleurs, faudra-t-il le rappeler, tous les pays du monde, et quelles que soient leurs orientations politiques et économiques, ont, au début du processus de développement de leur tourisme, opté pour des politiques de soutien et d’accompagnement du processus de développement touristique très volontaristes. 

Une fois le tourisme mis sur les rails dans un cadre organisé et planifié, les pouvoir publics se réapproprient leurs missions de régulation laissant aux acteurs que sont les professionnels, les opérateurs, les collectivités locales, les institutions de financement… le soin de poursuivre l’œuvre de développement du tourisme. Mais attention et j’insiste sur ce terme, pour souligner le fait que si la volonté politique affichée n’a pas été suivie des moyens dont a besoin le secteur, ceci ne veut absolument pas dire que l’attitude des décideurs est incohérente ou contradictoire. Tout au contraire, ces derniers savent exactement quoi faire et quand il faut le faire.

A mon avis, la responsabilité de l’absence de ruissellement des moyens sur le secteur incombe au secteur du tourisme lui-même.

En effet, comment pouvons-nous imaginer un instant que l’Etat débloque des moyens colossaux au bénéfice du secteur, en l’absence d’une stratégie de développement claire, convaincante, rigoureuse et planifiée dans le temps et dans l’espace ? 

Au fait, le secteur s’est toujours plaint du manque de moyens pour l’amorçage de son renouveau, tout en étant dans l’incapacité de fournir un contenu fiable à son action.

La réclamation des moyens est bien entendue légitime mais pas pour réaliser des actions éphémères et parcellaires, mais plutôt pour asseoir et exécuter une véritable stratégie de développement du tourisme.
Justement, la vision et la stratégie de relance du tourisme en Algérie, sur des bases saines et annonciatrice du renouveau progressif de notre tourisme et qui justifierait la réclamation des moyens, existe-t-elle réellement ?

Ceci nous amène à aborder la deuxième partie de cette analyse.

2-La vision et la stratégie de développement du tourisme en Algérie :

Nous ne pouvons objectivement pas aborder cette question, sans remonter dans le temps pour retracer succinctement l’historique de l’évolution du tourisme en Algérie.
La perfide entre 1966/ 1975 :
Cette période faste du tourisme en Algérie, a été marquée par l’élaboration et la mise en œuvre de la fameuse charte du tourisme. De prime abord, on peut penser qu’il s’agit là d’un document à caractère politique. Tout au contraire, c’est un véritable programme (stratégie) qui a jeté les bases du développement du tourisme en Algérie.

Ce programme opérationnel et soutenu par les pouvoirs publics a permis la réalisation de nombreux complexes touristiques de stations thermales, des écoles de formation de haut niveau et l’ouverture entres autres de représentations de tourisme algérien sur les marchés européens principalement.
Durant cette période, la destination Algérie était leader dans le Maghreb et rayonnait en Europe, car sa fréquentation par ces marchés était à son apogée.

La période 1975/ 2000 :

La promulgation de la charte nationale de 1976 a malheureusement relégué le tourisme international au second plan, en imposant un nouveau concept (le tourisme populaire).
Durant cette période, le secteur du tourisme s’est replié sur lui-même et s’est noyé dans des restructurations successives qui ont conduit à sa presque paralysie. La décennie noire lui a assené le coup de grâce.
En 2003, l’administration du tourisme avait élaboré un programme décennal de développement du tourisme.

Ce document qui a eu le mérite d’exister n’a pas fait long feu, car manquant d’envergure et surtout réalisé par l’administration pour elle-même. Par la suite, chaque gouvernement a eu son propre programme dans ce domaine.

L’année 2008 a vu l’élaboration du fameux Schéma directeur d’aménagement touristique (SDAT).
Beaucoup d’espoir était fondé sur cette nouvelle approche de développement touristique dans notre pays.
Force est de constater cependant que le SDAT, qui était généreux dans ses intentions, riche dans son contenu, n’a pu être mis en œuvre pour les principes raisons suivantes :

-Le SDAT reste une approche macro qui n’a pas prévu les mécanismes de mise en œuvre sur le terrain. Constatant cette carence, on a tenté de combler ces insuffisances par la mise en place, des SDAT wilaya. Mal préparée et mal conduite, cette démarche n’a pas atteint ces objectifs.
-Le SDAT a privilégié une approche d’aménagement du territoire afin de s’insérer parfaitement dans le cadre du Schéma National d’Amendement du territoire «SNAT», plutôt qu’une stratégie de développement du tourisme classique. 
-De plus et en termes d’approche de travail opérationnel, on avait voulu faire du point d’arrivée des grands pays touristiques le point de départ de la destination Algérie. Comment, eh bien, tout simplement en optant par exemple pour le concept de «maison Algérie» à l’étranger, et le maillage du territoire national par les fameux pôles d’excellence. Cette approche était certes ambitieuse, mais irréaliste, peut-être parce que trop en avance par rapport à la réalité de notre tourisme.

Depuis, quatre assises nationales ont été organisées pour tenter de redéployer le SDAT mais sans réel succès, ce qui confirme la difficulté de le mettre en œuvre. En tant que tel, le SDAT peut-être aujourd’hui un cadre de référence mais absolument pas une stratégie de développement touristique opérationnelle.
Conséquemment à cette situation, et à l’effet de combler le vide laissé par l’absence de stratégie de développement du tourisme, les différents plans d’action gouvernementaux, ont depuis pris le relais pour s’y substituer.

Mais ces plans d’action, dont les mandats sont limités dans le temps, peuvent t ils réellement se substituer à une véritable stratégie de développement du tourisme à courts, moyens et longs terme ? La réponse est évidemment non.  De plus, et englué dans la spirale de l’urgence au quotidien et de la gestion des affaires courantes du secteur, l’on a oublié de se concentrer sur une vision lointaine  pour laquelle chaque gouvernement apporte les ajustements conjecturels nécessaires certes, mais tout en maintenant le cap pour atteindre les objectifs tracés par la stratégie nationale de développement touristique.

Pour preuve de l’inexistence de cette vision et de cette stratégie opérationnelle, nous donnons les quelques exemples suivants :

*Le tourisme domestique  

Dans les discours, cette thématique jouit d’une priorité absolue, mais dans les faits, le développement de ce type de tourisme stratégique obéit beaucoup plus à de l’improvisation, qu’un un plan réfléchi dans le cadre d’une approche professionnelle.

D’ailleurs, il n’existe aucun document officiel qui traite de cette question. Ce thème est omniprésent dans les discours et même dans les différents plans d’action gouvernementaux, mais dans la pratique, aucune démarche professionnelle et opérationnelle n’est proposée à ce sujet.

*Le tourisme international :

Tout le monde s’accorde à reconnaître que le tourisme saharien est le fer de lance de notre tourisme et son atout majeur, malheureusement, il n’existe aucune réflexion sérieuse pour appréhender l’essor de cette filière touristique spécifique. Comment rendre le tourisme saharien plus attractif ? Comment innover en matière de production touristique spécifique afin de hisser l’Algérie au rang de première destination du tourisme des grands espaces ? Quel type de marketing et de communication ? Toutes ces questions et d’autres restent sans réponse.

Sur un autre registre, il n’échappe à personne que la qualité constitue une faiblesse récurrente de notre tourisme. Existe-il un plan stratégique pour endiguer ce phénomène du moins l’atténuer. La réponse est à ma connaissance, mis à part quelques tentatives sporadiques sans envergure, non.
Voilà pourquoi se doter d’une vision et disposer d’une stratégie de développement adossée à des plans d’action rigoureux est devenu nécessaire voire vital pour le tourisme national.
Justement et pour ne pas rester dans le constat, quels seraient les grandes lignes de cette stratégie ?
Les axes prioritaires de la stratégie de développement du tourisme en Algérie :

Pour schématiser, c’est quoi une stratégie de développement ?
Il s’agit de cerner avec précision les objectifs que l’on veut atteindre, tels que le nombre de touristes à drainer, le nombre de lits à réaliser, la place du tourisme dans le PIB national, le nombre d’emplois visé… Par la suite, mettre en place le déroulé des actions pour concrétiser les objectifs ciblés, imaginer les mesures de soutien concrets pour ce faire et enfin garantir la planification et le suivi de la mise en œuvre dans le temps et dans l’espace.

Les priorités de la stratégie :

Compte tenu du déficit dont souffre le tourisme en Algérie, dans le domaine de l’infrastructure touristique, le renforcement en quantité et en qualité des capacités d’accueil reste une priorité absolue. D’ailleurs, tous les pays nantis sur le plan du tourisme ont commencé dans le cadre du processus de développement de leur tourisme par la réalisation intensive des infrastructures d’accueil mais dans l’ordre, c’est-à-dire au titre d’une stratégie près établit. Stratégie près établit veut tout simplement dire qu’on doit impérativement savoir combien et quel type de lits à réaliser à court,   moyen et long termes, pour combler quel  type de demande, pour quel type de marché, au niveau de quels pôles prioritaires… Cette approche de travail est embryonnaire aujourd’hui pour ne pas dire inexistante chez nous puisqu’on se contente le plus souvent de délivrer des autorisations pour la réalisation des projets touristiques non pas par rapport aux besoins réels actuels et futurs du tourisme, mais selon une approche purement administrative. La réalisation des infrastructures d’accueil devra être planifiée et non pas subi. Dans le même registre toujours, le soutien et l’accompagnement des investisseurs et des porteurs de projets s’avère être une étape cruciale pour gagner la bataille des infrastructures d’accueil.
Dans ce domaine, je reste persuadé que le volet du financement des projets ne constitue pas une contrainte majeure pour les investisseurs qui arrivent plus ou moins   à se débrouiller pour financer leurs projets.

La grande contrainte pour les porteurs de projets touristiques réside dans les difficultés d’accès au foncier touristique. Les zones d’expansion touristique qui ont été inventées justement pour prendre en charge cette problématique se sont transformées au fil du temps en une véritable usine à gaz et un frein à l’investissement.

Figurez-vous que la procédure de sélection des ZET, d’élaboration des plans d’aménagement et le déblocage des financements nécessaires à la viabilisation et l’aménagement de ces ZET prendrait jusqu’à 10 ans et plus. Ceci explique pourquoi une bonne partie de ce foncier fait l’objet d’actes d’agression licite ou illicite, ce qui fait perdre du temps, de l’argent et de l’énergie dans d’interminables opérations de déclassement et à nouveau de classement de nouvelles ZET, sans pouvoir pour autant mettre ces espaces à la disposition des investisseurs potentiels.

De plus, et le comble consiste à vouloir créer des ZET sur la base du sacro-saint principe d’équilibre régional partout sur le territoire national. Ce principe est nécessaire lorsqu’il s’agit de réalisation d’écoles, de structures sanitaires, de moyens de communication de logements… mais de grâce, pas pour les ZET. Celle-ci ne devrait concerner que les régions balnéaires, compte tenu de la rareté du foncier touristique dans ces régions et de pouvoir réaliser des stations balnéaires d’envergure et intégrées. L’aberration la plus frappante réside dans la création de ZET dans le sud du pays oubliant que le Sahara est en soit une immense ZET. De plus, la réalisation d’hôtels dans un périmètre réduit (ZET) est contradictoire avec la philosophie même du tourisme saharien, à savoir le dépaysement total. Dans ces régions, le foncier ne manque pas, c’est pourquoi, il faut opter pour un essaimage des structures d’hébergement légères adaptées aux motivations des touristes en quête de ce type de tourisme et consacrer ainsi les moyens pour la viabilisation et l’aménagement aux pôles balnéaires prioritaires.

Malgré ce constat d’échec édifiant du concept de ZET tel qu’il est appréhendé aujourd’hui, les ZET se sont érigées en un véritable totem dont personne n’ose s’approcher.
Au contraire, si ceci nécessite une révision allant dans le sens de la simplification de l’acte d’accessibilité au foncier touriste et d’utilisation rationnelle des deniers de l’Etat, il faut rapidement engager une réflexion ce sujet au lieu de rester prisonnier d’une démarche, (le tout ZET), qui a non seulement montré toute sa limite, mais qui freine considération l’acte d’investissement avec toutes les conséquences qui en découlent sur la relance du tourisme. 

Cette réflexion devrait être orienté à mon avis sue les points suivants :
•Consacrer prioritairement les efforts en matière de création de ZET, sur les régions côtières, je dis bien côtières, c’est-à-dire qui se situent au-delà de la bande balnéaire ; 
•Favoriser le concept d’essaimage des infrastructures d’accueil dans le Sud, au lieu du concept de ZET qui est contradictoire avec la philosophie même du tourisme saharien ;
•Assouplir sensiblement les procédures d’élaboration et de validation des plans d’aménagent touristiques ;
•Substituer progressivement à l’Etat les investisseurs eux mêmes pour l’élaboration des plans d’aménagement de leurs propres projets après validation bien entendu des services du tourisme pour éviter le développement des infrastructures dans le désordre et l’anarchie ;
•Impliquer les investisseurs sur la base de formules de partenariat public-privé gagnant-gagnant dans le processus de viabilisation et d’aménagement des ZET.

La formation spécialisée : 

La formation de qualité dans les métiers du tourisme et de l’hôtellerie devrait focaliser toutes les attentions dans le cadre de la définition d’une série d’actions prioritaires parmi lesquelles nous pouvons citer ce qui suit :
•L’émergence d’instituts et de centres de formation d’excellence. Il ne s’agit pas de réaliser de nouvelles infrastructures de formation mais d’orienter celles déjà existantes vers une formation d’excellence. Cette action pourrait concerner dans une première étape les centres de formation relevant du secteur du tourisme (Tizi Ouzou et Bou Saâda) et quelques instituts relevant du secteur de la formation professionnelle tels que le centre de Oued El Kerma dans la wilaya de Boumerdès. Cette opération pourrait facilement bénéficier de l’appui technique de l’Organisation mondiale du tourisme et du bureau international du travail ainsi que du centre canadien de l’excellence dans le tourisme.
•La mise en place d’une véritable politique de formation de formateurs est une condition sine qua none de la qualité du produit de la formation ; 
•Asseoir des programmes de formation obligatoire dans l’entreprise s’impose comme une nécessité absolue, pour permettre aux personnels actifs de s’adapter en permanence aux techniques nouvelles dans les différents domaines de prestation touristique et hôtelière.

La qualité dans le tourisme :

L’élaboration et le déploiement d’un plan qualité pour atténuer un tant soi peu les insuffisances de la destination Algérie dans ce domaine s’avère aujourd’hui hui plus que nécessaire. Tout le monde est conscient que malgré quelques améliorations constatées dans ce domaine, la problématique de la qualité constitue toujours un handicap majeur pour la destination Algérie.
En effet, si le consommateur est prêt aujourd’hui à fermer les yeux sur les tarifs, il n’acceptera jamais de faire des concessions sur la qualité des offres qu’on lui propose en général et plus particulièrement en matière de prestation de services.

C’est pourquoi, tout retard et ou manque d’initiatives sérieuses dans ce domaine risque d’annihiler tous les efforts qui sont déployés pour la relance de notre tourisme.

La démarche qualité est une action prioritaire qui nécessite la mise en place d’un plan d’action professionnel à court, moyen et long termes. Notre pays pourrait au titre de la coopération bilatérale et multilatérale bénéficier du savoir-faire et de l’expérience des pays et des institutions internationales spécialisées pour élaborer et mettre en œuvre une feuille de route opérationnelle pour la dissémination de la qualité à tous les maillons de la chaîne touristique dans le cadre de la labellisation progressive de la destination Algérie.

La politique de marketing et de COM de la destination Algérie :

Dans ce domaine précis, il existe deux thèses qui s’affrontent. L’une qui dit que ce thème n’est pas prioritaire, tant que l’on n’aura pas suffisamment avancé dans le processus de développement de notre tourisme. L’autre thèse privilégie le déblocage dès à présent, de moyens importants pour améliorer la perception de l’image de la destination Algérie, si non, tout retard dans ce domaine risque de compliquer les choses en matière de visibilité de la destination. En vérité, les deux thèses se tiennent, mais la plus logique à mon avis est celle qui consiste à combiner entre les deux approches. Il s’agit d’une vision qui consiste à être ambitieux et réaliste en même temps en matière de promotion et communication.
Ceci veut tout simplement dire arrêter de réclamer les mêmes budgets promotionnels mobilisés par les destinations développées mais mettre en place des programmes de promotion intelligents, professionnels et adaptés à la situation et à l’évolution de notre tourisme.

Le plan de promotion de la destination Algérie a vraiment besoin d’être réinventé pour le faire sortir de la routine dans laquelle il s’est installé depuis longtemps.
Le manque de moyens est certes une contrainte, mais n’explique pas tout.

A ce titre par exemple, et en attendant de déployer un véritable plan de promotion, il est urgent de revoir complètement la démarche de participation de notre pays aux foires et salons spécialisés dans le tourisme dans le monde, la modernisation des sites officiels de promotion de la destination et le recours intensif au marketing et communication digitales.

La réactivation du Conseil National du Tourisme :

Il n’échappe à personne que le secteur du tourisme est fondamentalement un secteur transversal, selon les uns, ou horizontal, selon d’autres. Cette caractéristique veut tout simplement dire que le tourisme influe sur les autres secteurs à travers notamment la création de la richesse, le développement des territoires, le soutien à la croissance économique, l’épanouissement social des populations… mais en même temps, il subit les influences de ces secteurs et en pâtit durement quand celles-ci sont négatives. 
En effet, toute insuffisance, défaillance dans un secteur quelconque se répercute immédiatement sur l’attractivité de la destination, sachant qu’aujourd’hui, les éléments de compétitivité des destinations touchent aussi les conditions d’accessibilité au le pays, les conditions de voyages et de déplacement, et de séjours des touristes 

Il va sans dire que la prise en charge des contraintes exogènes qui pénalisent lourdement la mise en tourisme de l’Algérie ne relève pas des missions de l’administration en charge du tourisme, mais d’autres institutions et organismes concernés directement ou indirectement par l’activité touristique.
A l’effet de tenter d’atténuer cette problématique, on a institué dans le passé un comité national de facilitation des activités touristiques. Ce comité qui existe depuis une vingtaine d’années n’a réglé aucun problème, non pas par incompétence de ces membres ou manque de bonne volonté de leur part, mais tout simplement parce qu’il n’avait pas la force de décision et se contentait de dresser des constats et faire des propositions qui sont restées sans lendemain.

De plus et devant l’inefficacité de ce comité, on a eu recours à des conventions de collaboration et de partenariat entre le ministère en charge du Tourisme et d’autre départements matériels concernés. Ces conventions prévoient la mise en place de comité de pilotage pour l’élaboration des programmes d’action et le suivi de leur mise en œuvre. Les résultats de cette démarche sont très mitigés puisque la plupart de ces conventions sont restées lettre morte.Or, depuis 2003, il existe un outil décisionnel pour prendre en charge efficacement la problématique de l’horizontalité qui se pose au tourisme. Curieusement, hormis une seule réunion en 2003 consacrée au foncier touristique, ce comité n’a jamais, pour des raisons que j’ignore, été convoqué.

Ce n’est qu’en 2021 qu’un décret présidentiel a été publié à l’effet de renforcer les missions de ce comité et d’élargir sa composante.

Ce comité est présidé par le Premier ministre et se compose de tous les ministres qui ont un lien direct ou indirect avec l’activité touristique. Il se réuni pour traiter de toutes les contraintes qui entravent le secteur du tourisme et décide des actions à mettre en œuvre pour les lever. Un rapport d’évaluation annuel est transmis au président de République.

Franchement, peu de pays peuvent s’enorgueillir de disposer d’un tel instrument pour l’accompagnement du processus de développement du tourisme. Toutefois, il est devenu urgent qu’il tienne sa première réunion pour entamer le travail d’impulsion de la dynamique de relance de notre tourisme. d’autant que cette réunion , constituera un signal très fort de la part des pouvoirs publics en direction de l’opinion publique des investisseurs et des prescripteurs de voyages sur l’intérêt accordé à ce secteur névralgique.
Enfin, le CNT est l’organe pour superviser et orienter la mise en œuvre de la stratégie de développement du tourisme.

Le renforcement du rôle des collectivités locales : 
Il est vrai que l’Etat central doit peser de tout son poids pour impulser le développement du tourisme, mais au fur et à mesure, il devra se réapproprier ses missions de régulateur, laissant le travail de développement touristique, aux acteurs directement concernés par cette action, à savoir, la collectivité locale et les professionnels du tourisme.

En Algérie, on n’en est pas encore là, puisque le rôle de l’Etat est déterminant pour asseoir une dynamique de développement du tourisme.
Toutefois, ceci ne devrait pas empêcher d’impliquer davantage les collectivités locales sur des actions de développement touristique qui concernent directement leurs territoires.
A ce titre, l’administration centrale en charge du tourisme pourrait prendre l’initiative de mise en place de convention de partenariat opérationnel avec les wilayas, soit individuellement ou collectivement. Par exemple :

Le développement de filières touristiques  (ministère du Tourisme /wilaya d’El Tarf pour le tourisme écologique ou la wilaya de Timimoune pour le tourisme d’expéditions.
Le développement de pôles touristiques spécifiques (création d’une ville d’eau dans une wilaya à fort potentiel dans le thermalisme 
L’organisation d’événementiel à caractère international (descente en VTT dans le Hoggar, kermesses touristique en montgolfières…

Ces opérations auront un double mérite, d’abord réalisables pacque maîtrisables, ensuite mobilisatrices des énergies du génie locaux qui se sentiront de véritables acteurs pour le façonnage du devenir du tourisme dans leurs localités.

A terme, chaque wilaya ou groupe de wilaya, selon les conclusions de la stratégie nationale de développement du tourisme, devraient disposer en coordination avec l’administration en charge du tourisme de son propre plan d’action dans ce domaine. Si la conception de la stratégie est nationale, sa mise en œuvre ne peut être que locale, selon bien entendu les spécificités de chaque région.
Pour conclure et répondre ne serait-ce que partiellement à la question pourquoi le tourisme ne décolle pas au rythme souhaité, je dirai que pour ce faire, il faut faire réunir les trois paramètres suivants :
D’abord, l’élaboration d’une stratégie fiable et d’Etat. Fiable veut dire que l’administration est dans l’obligation de se faire assister par une expertise externe avérée capable de garantir à cette stratégie un caractère d’objectivité de professionnalisme et d’opérationnalité, notamment en matière de prospective de planification et de brunch mark.

Ensuite, cette stratégie devra être bien entendu adossée à des programmes opérationnels qui devront impérativement avoir des ramifications profondes dans les territoires afin d’assigner aux collectivités locales, dans le cadre d’une planification rigoureuse, un rôle majeur dans le processus de mise en tourisme de l’Algérie. Enfin, l’Etat doit faire réunir toutes les conditions législatives, organisationnelles financières et matérielles pour impulser une véritable dynamique de développement du tourisme, capable de faciliter et d’accélérer l’irrigation touristiquement parlant des territoires. 

Par la suite l’acte de développement deviendra mécanique et s’amplifiera de lui-même avec le temps. Je ne terminerai pas cette contribution sans souligner le fait que l’approche de travail proposée, a été portée et défendue à mainte reprise en intra-muros.

Aujourd’hui que l’obligation de réserve que m’imposaient mes fonctions officielles ne sont plus d’actualité, il m’a paru utile de partager ces idées dans le seul but de contribuer  à l’effort du renouveau de notre tourisme 

Par Abdelkader Gouti
Ancien haut cadre au ministère du Tourisme

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