«Le manque de postes» serait à l’origine de l’exode de médecins : Les explications de Benbouzid

07/02/2022 mis à jour: 04:03
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Un véritable exode de médecins algériens vers l’étranger / Photo : D. R.

Le ministre de la Santé a souligné que des pays comme l’Inde et l’Egypte perdent également leurs médecins au profit de l’étranger.

Face à l’exode des médecins spécialistes vers des cieux jugés plus cléments, le ministre de la Santé, le Pr Abderrahmane Benbouzid, a affirmé qu’il s’agit là d’un phénomène qui «ne concerne pas uniquement l’Algérie», plaidant en faveur d’une mise à la retraite de nombreux médecins qui continuent à exercer au-delà de l’âge légal afin de permettre à la nouvelle génération de prendre le relais.

Dans un entretien accordé à la chaîne Ennahar, le premier responsable du département de la Santé a ainsi souligné que des pays comme l’Inde et l’Egypte perdent également leurs médecins et leurs ingénieurs au profit de l’étranger. Il estime qu’il existe de «nombreux problèmes» au sein des hôpitaux algériens, dont certains nécessitent une attention particulière.

«Dans les hôpitaux, dit-il, de nombreux médecins ont dépassé l’âge de la retraite et ils sont toujours en poste. Ils restent en service à plus de 70 ans et ne permettent pas à la nouvelle génération de les remplacer. C’est ce qui fait que nous n’avons pas de postes pour les jeunes médecins. Il y a beaucoup de problèmes dans le secteur de la santé. Il y a un dossier au niveau du Premier ministre pour appliquer la loi. Ceux qui arrivent à la retraite doivent partir et si on a besoin d’eux, on leur fera appel.» Il a ainsi promis d’ouvrir de nouveaux postes très prochainement.

Par ailleurs, il considère qu’il n’y a pas «d’émulation» au sein des établissements publics. «Dans certaines spécialités, les médecins préfèrent le secteur privé. Par exemple, dans certaines villes, il y a un seul gynécologue qui doit être de garde tous les jours. Dans des spécialités, telles que la radiologie, la réanimation, il n’y a personne, car ils se sont dirigés vers le privé», dit-il.

Néanmoins, certains médecins ayant passé le concours des EVC (épreuves de vérification des connaissances), précieux sésame leur permettant d’exercer dans les hôpitaux français, considèrent que les propos du ministre se détournent des véritables problèmes qui poussent les nouvelles générations à tenter leurs chances ailleurs. Le manque de moyens et la vétusté du système de santé rebutent aujourd’hui les blouses blanches.

«Le fait est que les médecins ne sont pas touchés par le chômage ou le manque de postes, mais que l’exercice du métier ne permet pas l’épanouissement professionnel ni sur le plan salarial, ni celui de la progression professionnelle et de l’évolution des compétences», nous explique un  médecin rhumatologue ayant décroché le concours lui ouvrant les portes des hôpitaux français.

Notre interlocutrice raconte ses frustrations de ne pouvoir venir en aide à ses patients et toutes les entraves l’empêchant d’exercer son métier de médecin dans des conditions favorables.

«Dans certains cas, nous sommes incapables de rendre service au malade. A cause du manque de moyens, nous n’avons pas de traitement à proposer. Psychologiquement, il est extrêmement dur de voir des patients dépérir et de ne pouvoir rien faire», confie-t-elle. D’autre part, ils disent ne pas voir de débouchés à leur carrière professionnelle.

La carrière universitaire n’est plus aussi motivante – «La maîtrise apporte plus de responsabilités pour un salaire moyen», dit-on, et la perspective d’ouverture d’un cabinet médical est contrariée par les nouvelles taxes imposées. «Il est difficile pour un médecin nouvellement établi d’y faire face», soupire-t-on.

Plus que tout, l’espoir d’une amélioration du système sanitaire s’est étiolé au fil des années. «Il y a quelques années, nous dit un pédiatre ayant obtenu le concours de l’EVC lors de l’édition précédente, je soutenais le combat des résidents qui manifestaient afin d’améliorer les conditions de travail et la qualité de soins pour un meilleur système de santé. Personne n’a compris leur combat, ni les autorités ni la population. Je pense que c’est là que nous avons cessé de nous battre…» 

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