Sergueï Sobianine, le maire de Moscou, réélu sans surprise dimanche, est un fidèle allié du président Poutine, avec une mission claire : maintenir l'ordre dans la capitale, même en temps de crise, que ce soit lors de manifestations d'opposition, de la pandémie de Covid-19, ou aujourd'hui, face au conflit en Ukraine.
Âgé de 65 ans, ce personnage au visage impassible et aux cheveux blancs dirige la plus grande ville d'Europe (avec plus de 13 millions d'habitants) depuis près de 13 ans. Il est le pur produit de l'élite technocratique qui soutient le président Poutine. Depuis un an et demi, sa principale mission est de maintenir Moscou à flot et ses habitants sereins, même en pleine tempête, malgré les sanctions économiques, la mobilisation militaire, la répression de l'opposition et les attaques de drones ukrainiens de plus en plus fréquentes.
Sa réélection dimanche était attendue, aucun débat ni adversaire n'ayant été autorisés dans cette métropole qui fut longtemps un bastion de l'opposition à Vladimir Poutine. Lorsque le président russe a ordonné la mobilisation de centaines de milliers de Russes pour combattre en Ukraine, provoquant un exode vers l'étranger, c'est le maire de Moscou qui a rassuré les Moscovites, un mois plus tard, en leur annonçant que pour eux, c'était déjà fini.
Avec le même calme, il minimise le danger des drones qui atteignent de plus en plus souvent Moscou, ne provoquant jusqu'ici que des dégâts mineurs. Il évite également soigneusement de commenter l'offensive en Ukraine et ses conséquences, préférant parler en termes généraux des efforts faits pour minimiser son impact sur la vie de ses administrés. « Malgré un grand nombre de difficultés, de problèmes et de crises que nous traversons dans le pays, nous progressons, nous surmontons ces problèmes et nous devenons plus forts », a-t-il affirmé lors d'un forum municipal en août.
Selon la politologue Tatiana Stanovaïa, la capacité de Sergueï Sobianine à garder le contrôle sur cette ville de 13 millions d'habitants, centre d'influence où sont concentrées les élites et les principales branches du pouvoir russe, revêt une importance cruciale pour Vladimir Poutine. « Pour maintenir le contrôle, il faut être très prudent avec les Moscovites. Mieux vaut ne pas les irriter », explique-t-elle.
Originaire d'un village de la région de Khanty-Manssiïsk, dans la lointaine Sibérie, Sergueï Sobianine a brièvement exercé comme ingénieur dans une usine de l'Oural avant de se lancer, dans les années 1980, dans une carrière administrative. Avant d'être élu maire de Moscou en 2010, il a dirigé la région de Tioumen, riche en pétrole, de 2001 à 2005, puis l'administration présidentielle de Vladimir Poutine de 2005 à 2008. À la différence de la plupart des membres de l'entourage du président russe, ex-agent du KGB, le maire de Moscou n'a aucun lien direct avec les puissants services spéciaux.
Il bénéficie d'une certaine autonomie politique, estime Tatiana Stanovaïa, ajoutant qu'il n'a aucune ambition politique au-delà de ses fonctions actuelles, car « ceux qui travaillent avec Poutine ne peuvent pas avoir d'ambitions politiques ». En tant que maire, Sergueï Sobianine évite les sujets politiques sensibles et se présente comme un gestionnaire efficace : fermeture des marchés criminels, projets d'infrastructures majeurs, amélioration des transports en commun, création de parcs et terrains de jeux... Ses apparitions publiques les plus fréquentes sont lors des inaugurations de stations de métro ou de cliniques municipales.