Le Chili entre la perspective de changement et la nostalgie de Pinochet : Le projet de Constitution officiellement remis au président Boric

05/07/2022 mis à jour: 00:30
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Photo : D. R.

Le Président a immédiatement signé un décret convoquant un référendum pour le 4 septembre. En cas de rejet, la Loi fondamentale actuelle, datant de l’époque de la dictature d’Augusto Pinochet (1973-1990), restera en vigueur.

L’Assemblée constituante du Chili a remis, hier au président Gabriel Boric, le projet de la nouvelle Constitution, fruit d’une année de travaux lancés après le soulèvement social de 2019 et qui doit encore être approuvé par référendum, rapporte l’AFP. «Nous devons être fiers qu’au moment de la crise la plus profonde (...), que notre pays connaît depuis des décennies, les Chiliens et les Chiliennes aient opté pour plus de démocratie et non pour moins», a déclaré le président Boric après avoir reçu le texte lors d’une cérémonie au Parlement à Santiago.

Le Président (de gauche) a immédiatement signé un décret convoquant un référendum pour le 4 septembre. Ce scrutin sera à vote obligatoire : 15 millions de Chiliens devront dire s’ils acceptent ou rejettent cette nouvelle Constitution.

La campagne commencera demain. En cas de rejet, la Loi fondamentale actuelle, datant de l’époque de la dictature d’Augusto Pinochet (1973-1990), restera en vigueur. Dans la foulée de la remise, l’Assemblée constituante, composée de 154 citoyens indépendants ou affiliés à des partis politiques, a été dissoute, un an tout juste après avoir commencé ses travaux, le 4 juillet 2021.

Une nouvelle ère

Vu comme une sortie de crise politique au soulèvement de 2019 pour plus d’égalité sociale, le projet constitutionnel consacre à travers ses 388 articles les principales revendications des manifestants.

Dans le premier article, le Chili est ainsi défini comme un «Etat social et démocratique de droit», «plurinational, interculturel et écologique». «Sa démocratie est paritaire» et «il reconnaît comme valeurs intrinsèques et inaliénables la dignité, la liberté, l’égalité substantielle des êtres humains et leur relation indissoluble avec la nature». Les débats ont été vifs au sein de l’Assemblée constituante, où les indépendants étaient les plus nombreux, avec 104 sièges, et les représentants de la droite n'ont pas de majorité de blocage. Une majorité des deux tiers était nécessaire pour voter les articles.

Outre les vifs débats, les longs mois de travaux ont été marqués par la circulation sur les réseaux sociaux de nombreuses infox auprès du public sur les articles en train d’être discutés. A plusieurs reprises ces dernières semaines, le chef de l’Etat a réitéré son soutien au projet de Constitution, estimant que l’actuelle, adoptée en 1980 en plein régime militaire et qui limite au maximum l’intervention de l’Etat, représente un «obstacle» pour toute réforme sociale de fond. Si le texte est approuvé, il placera le Chili à l’avant-garde dans plusieurs domaines.

Le droit à l’avortement sera notamment inscrit dans la Loi fondamentale. Totalement paritaire, l’Assemblée constituante comptait aussi 17 sièges réservés à des représentants des peuples autochtones chiliens, dont les Mapuches, peuple originaire majoritaire dans le pays.

Pour l’avocate mapuche Natividad Llanquileo, élue de l’Assemblée, le processus constitutionnel a représenté «l’espace le plus démocratique que nous ayons connu au fil de l’histoire de ce pays». Outre le fait que le texte reconnaît l’existence de divers peuples au sein de la nation chilienne, il accorde une certaine autonomie à des institutions indigènes, notamment en matière de justice. 

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