Le bilan des attaques de l’armée d’occupation israéliennes s’alourdit à 17 487 morts à Ghaza : Cortèges de chouhada et images humiliantes au 36e anniversaire de l’«Intifadha des pierres»

09/12/2023 mis à jour: 20:08
1989

C’est dans un contexte pour le moins tragique que les Palestiniens commémorent, ce samedi 9 décembre, le 36e anniversaire de la Première Intifadha, baptisée «Intifadhate el hidjara» ou «la révolte des pierres». Celle-ci avait éclaté, en effet, le 9 décembre 1987 et durera près de sept ans, soit jusqu’à la signature des accords d’Oslo le 9 septembre 1993. 

Sept ans plus tard, le 28 septembre 2000, est déclenchée la Seconde Intifadha ou «Intifadhate Al Aqsa», après une irruption provocatrice d’Ariel Sharon sur l’esplanade des Mosquées, à Al Qods, puis l’assassinat par balles, deux jours plus tard, d’un enfant de 12 ans, Mohammad Al Durah, dans les bras de son père, à Ghaza.
 

La première insurrection était partie du camp de Jabaliya, le plus important camp de réfugiés de la Bande de Ghaza, avant d’embraser l’ensemble des Territoires occupés, et a constitué un tournant dans l’histoire de la résistance palestinienne. Le détonateur de l’insurrection, c’était la mort de quatre ouvriers palestiniens, le 8 décembre 1987, écrasés par un colon sioniste au volant d’un camion, près d’un barrage militaire israélien à Beit Hanoun, au nord-est de l’enclave palestinienne.
 

«Atfal el hidjara»

Et c’était pendant leurs funérailles, le lendemain, que les émeutes avaient démarré pour ne plus s’arrêter. «L’Intifadha s’est poursuivie sept ans durant, mobilisant chaque maison, chaque famille, chaque plume, chaque tribune, chaque mur, chaque rue, chaque ville, camp, village, à Ghaza, à Al Qods occupée, et dans les terres de 1948…» rappelle un article de l’agence palestinienne Wafa publié hier. Parmi les images marquantes devenues même emblématiques de ce premier grand soulèvement populaire palestinien, celles, émouvantes, de ces gamins affrontant les chars et les blindés israéliens, et qui n’avaient que des pierres et des cailloux pour tenir tête à l’armada sioniste. On les appellera affectueusement «Atfal el hidjara», «les enfants des pierres». La Première Intifadha se soldera par 1550 chahid, selon l’agence Wafa, et plus de 70 000 blessés.

Trente-six ans plus tard, le peuple palestinien continue à lutter ardemment pour sa liberté et il a payé et continue de payer très cher le prix de son soulèvement contre l’occupation sioniste. En voyant les atrocités commises chaque jour à Ghaza, on mesure l’ampleur des souffrances consenties par les «Atfal el Hidjara» d’hier et dont, aujourd’hui, les enfants se font sauvagement massacrer tous les jours. Le dernier bilan des pertes palestiniennes fourni par le ministère de la Santé à Ghaza est effrayant : 17487 morts. Le nombre de blessés, quant à lui, dépasse les 42 000.

Ces dernières vingt-quatre heures ont une nouvelle fois été extrêmement meurtrières, avec à la clé des dizaines de morts et de blessés, tant dans la Bande de Ghaza qu’en Cisjordanie qui est devenue elle aussi le théâtre de violences quotidiennes contre les civils, à mesure que la guerre punitive contre la population palestinienne s’enlise.
 

A l’aube de ce vendredi, de nombreux civils ont été tués et d’autres ont été blessées, suite à un bombardement israélien qui a visé le quartier d’Al Shujaiya, à l’est de la ville de Ghaza, rapporte l’agence Wafa. Les frappes létales se sont poursuivies sur plusieurs zones de l’enclave, notamment sur les quartiers est de la ville de Khan Younes et sur la bande littorale de la ville de Rafah. D’autres raids aériens ont visé également la région Centre, autour de Deir El Balah.
Il convient de signaler également que cette tuerie a coûté la vie à six personnes dont un enfant de 14 ans, suite à un assaut des forces d’occupation israéliennes sur le camp Al Faria, à proximité de la ville de Tubas, au nord de la Cisjordanie.

Décidément, l’armée sioniste continue de semer la mort et la désolation avec une brutalité inouïe, ignorant tous les appels à la retenue. Jeudi, l’UNRWA a accusé Israël d’avoir ciblé une école convertie en abri, à Beit Lahia, au nord de Ghaza. L’UNRWA qui, faut-il le signaler, a perdu 108 de ses employés dans les bombardements intensifs qui ravagent Ghaza depuis plus de deux mois maintenant. «Il s’agit du plus grand nombre d’employés humanitaires de l’ONU tués dans un conflit dans l’histoire des Nations unies», relève l’Agence pour les réfugiés palestiniens.
 

Depuis que l’armée israélienne a lancé son offensive terrestre le 27 octobre dernier, aucune zone de la Bande de Ghaza n’est à l’abri. Ces deux derniers jours, les combats se sont concentrés autour de Jabaliya, au Nord, mais également dans les autres régions, plus au Sud, comme Deir El Balah et surtout Khan Younès, au sud de la Bande de Ghaza. A Khan Younès, les pilonnages intensifs ont carrément rasé le quartier d’Al Katiba, a constaté l’AFP. L’armée israélienne dit avoir «frappé 450 cibles du Hamas», mais comme l’a révélé une enquête d’Amnesty International, les frappes israéliennes ne touchent, dans la majorité des cas, que des civils sans défense.
 

Ces images dégradantes de civils en sous-vêtements

Et comme à chaque vendredi, la prière hebdomadaire à Masjid El Aqssa s’est déroulée sous haute surveillance, hier. La police israélienne a limité l’accès au troisième lieu saint de l’islam. Selon Wafa, seuls 5000 fidèles palestiniens, habitants tous de la ville de Jérusalem occupée, ont été autorisés à accomplir la prière hebdomadaire. 
L’Office des wakfs palestiniens a indiqué que les forces d’occupation ont interdit aux musulmans de moins de 70 ans de prier dans la mosquée, «ce qui a conduit à une baisse considérable du nombre de fidèles qui ont pu y accomplir leur prière».  

On a vu aussi plusieurs agressions commises aux abords d’autres mosquées palestiniennes. 4 citoyens ont ainsi été blessés par balles, suite à l’assaut donné par l’armée sioniste sur une mosquée de la localité de Hazma, près d’Al Qods. Selon Wafa, les soldats israéliens ont encerclé la ville et assiégé la mosquée, avant de tirer dans le tas sur les fidèles et lancer des grenades lacrymogènes et assourdissantes.
 

Parmi les autres faits saillants de ce week-end sanglant en Palestine ; ces images humiliantes qui ont fait le tour du monde où l’on voit des civils en sous-vêtements en plein froid, alignés au milieu d’une rue dévastée ou entassés à l’arrière de camions militaires pour êtres conduits vers une destination inconnue.

 Ce sont plusieurs dizaines de personnes de Ghaza qui ont eu à subir ce traitement dégradant. Ces images ont été diffusées jeudi soir par des chaînes de télévision israélienne et sont vite devenues virales sur les réseaux sociaux, suscitant, comme de juste, une vive émotion et de fortes réactions d’indignation.

Parmi les personnes arrêtées et soumises à ce traitement inhumain, il y avait le correspondant d’un site d’information londonien «Al Arabi Al Jadeed». Ce site est décliné également en anglais sous le titre «The New Arab». Le journaliste en question n’est autre que Dhiaa El Kahlout, le chef du bureau d’Al Arabi Al Jadeed à Ghaza. 
 

Le média londonien qui couvre de façon exhaustive les évènements en Palestine a consacré un article à cette affaire sous le titre «Des arrestations humiliantes de civils dans les régions isolées de Ghaza». «Les soldats de l’occupation israélienne, rapporte le site en arabe, ont pénétré des zones de l’est de la ville de Ghaza et du nord de l’enclave, après avoir pilonné de manière intensive ses grandes artères, en prévision d’y installer leurs chars et leurs blindés. Ils ont procédé à des arrestations à grande échelle au cours desquelles ils ont obligé les personnes arrêtées à enlever leurs vêtements devant leurs familles et à se mettre à terre, formant une chaîne tout le long des rues principales».

Selon Al Arabi Al Jadeed, les Nations unies se sont émues de l’arrestation de Dhiaa El Kahlout et surtout du traitement qui lui a été infligé, lui et ses compatriotes. Le site précise que Stéphane Dujarric, porte-parole d’Antonio Guterres, secrétaire général de l’ONU, a animé un point de presse jeudi, au siège de l’ONU à New York, et une question lui a été clairement posée à propos de ces humiliations qui ont rappelé à certains Abou Ghraib, en Irak. 

Et M. Dujarric a répondu d’après Al Arabi Al Jadeed : «Les images qu’on a vues ce matin sont fortement troublantes. Toute personne a le droit fondamental au respect de la dignité humaine. Ces images et la manière dont on traite les gens sont très préoccupantes.»

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