Avec près de deux semaines de retard sur les dates habituelles, sans doute en raison des examens scolaires, la saison estivale a été officiellement ouverte avant-hier. Facilitations offertes, en matière de coûts de transport notamment, aux Algériens résidant à l’étranger, et amélioration des conditions d’accueil pour attirer plus de touristes étrangers.
Ce sont deux axes de travail sur lesquels les autorités publiques misent pour placer la destination Algérie. En interne, l’on compte s’appuyer sur un certain dynamisme du tourisme domestique, observé ces dernières années, pour améliorer les rendements économiques des offres de séjour dans les stations balnéaires et faire profiter la fiscalité communale.
Plus de deux mois durant, il s’agira également de gérer le mouvement de plusieurs millions de citoyens à travers les routes du pays, leurs conditions de séjour et de restauration, leur santé, leur sécurité... Les villes de la bande littorale seront hyper-sollicitées, comme il est de tendance désormais, au point parfois de faire craquer les potentialités d’accueil locales, congestionner les voies de circulation et, au final, gâcher ces moments censément destinés à la détente après une année de labeur.
L’été dernier, des habitants d’une région particulièrement prisée sur la côte jijelienne ont même mené une campagne sur les réseaux sociaux pour sensibiliser au fait que leur vie a été fortement perturbée par les flux de touristes, suite à l’encombrement quotidien des routes, et ont appelé les autorités à réserver des voies de secours pour leur permettre de vaquer à leurs occupations ordinaires.
Il y a bien une nouvelle démographie des plages et des vacances depuis plusieurs années, signe du développement d’une forte demande en matière de loisirs, et elle impose la mise en place de moyens à la hauteur des flux pour que le moment remplisse sa vocation d’opportunité économique et de catalyseur social.
Lors de l’inauguration officielle de la saison estivale, avant-hier, le ministre de l’Intérieur a assuré de l’entière mobilisation des corps de la Gendarmerie et de la Sûreté nationales, la Protection civile… pour veiller à la sérénité de l’ordre public et à la protection des citoyens. Promesse a été, par ailleurs, faite que la gratuité des plages sera assurée, à travers l’interdiction de l’exploitation clandestine des aires de détente par des plagistes improvisés.
L’année dernière, comme les années qui l’ont précédée, les services de la gendarmerie ont certes fait la chasse aux clandestins, mais la pratique n’a pas disparu pour autant. Sans doute la solution «sécuritaire» ne suffit pas. Les groupes de jeunes qui s’improvisent agents touristiques comblent un vide laissé par le manque d’investissement régulier dans le domaine, qu’il soit privé ou public (gardiennage des aires de stationnement, location d’accessoires de baignade, nettoyage des plages…). Tant que le vide va persister, il est difficile de croire qu’il ne sera pas investi par des initiatives informelles.
L’autre hantise de l’été, les feux de forêt, impose, pour sa part, une vigilance de tous les instants. Successivement, le pays a connu deux mois d’août traumatisants et meurtriers les deux dernières années : plus de 100 morts à Larbaa Nath Irathen (Tizi Ouzou) en 2021, une quarantaine à El Tarf en 2023. L’on entre manifestement dans un cycle qui appelle à adapter les moyens de prévention et de lutte.
La canicule ressentie en cette veille de début calendaire de l’été annonce un peu la couleur. De fortes chaleurs, combinées à une nette «redensification» du couvert végétal après les importantes et inattendues pluies de fin mai et début juin en cours, peuvent préparer les conditions d’un été à gros risques en matière d’incendies. L’Etat a renforcé les moyens d’intervention, avec notamment l’affrètement de près de sept bombardiers d’eau.
La Protection civile, pour sa part, est instruite de mobiliser et de redéployer ses effectifs, selon la cartographie des sites à risque particulièrement touchés les dernières années. Une nouvelle loi, prévoyant jusqu’à la prison à perpétuité, pour tout «crime commis sur les biens forestiers», est par ailleurs en préparation. Mais il est clair que la lutte, c’est aussi l’affaire de tous ces millions de vacanciers qui vont traverser des forêts pour se rendre sur les plages.