Dans son analyse de l’évolution de l’économie algérienne, la Banque mondiale (BM) prendra désormais en compte les données sur l’éclairage nocturne par image satellite notamment au niveau des sites pétroliers et gaziers.
Dans une note publiée par l’institution financière internationale, «l’analyse NTL ou capture des lumières nocturnes, serait un bon indicateur de l’activité économique et fait partie d’un ensemble de sources de données non conventionnelles et de mégadonnées utilisées pour compléter les sources nationales et internationales standard afin d’obtenir un meilleur aperçu, plus opportun, de l’économie algérienne et du bien-être de ses citoyens».
Les rédacteurs de ladite note - rendue publique le 20 novembre - précisent que dans le cas de l’Algérie et par exemple pour le calcul du PIB, les données ne sont disponibles que jusqu’au quatrième trimestre 2022. Pour compléter, nous montrons que l’imagerie satellitaire publique capturant les lumières nocturnes est opportune.
Ainsi, pour les zones d’extraction et de traitement du pétrole et du gaz, continue le même document, les NTL donnent de manière fiable le PIB du secteur des hydrocarbures, tandis que la relation statistique entre les NTL qui excluent ces zones et le PIB hors hydrocarbures est encore plus forte.
Il faudrait ainsi, selon cette méthode, séparer les activités hors hydrocarbures et hydrocarbures afin d’obtenir des données plus précises. Poursuivant leur argumentaire, les économistes de la BM estiment que «grâce à ces données, nous pouvons produire des approximations du PIB avec un mois de retard et découvrir la dynamique de croissance régionale».
C’est au cours de la décennie écoulée que les recherches sur l’utilisation des données NTL ont montré qu’il s’agit d’un indicateur fiable sur l’économie des pays. Libre d’accès sur le site Web du Earth Observation Group et de la NASA, la BM a mis à la disposition de ses chercheurs et analystes un didacticiel afin d’utiliser ces données de manière indépendante.
Un suivi a déjà été effectué pour évaluer l’impact de la crise du Covid-19 dans 47 villes de la région MENA dont Alger, Oran et Constantine. Même si les données NTL peuvent être utilisées pour fournir un indicateur opportun et désagrégé spatialement de l’activité économique en Algérie, la taille du secteur des hydrocarbures du pays pose des défis supplémentaires.
Les quantités de lumières des sites pétro-gaziers, indicateurs de vitalité économique
«L’extraction et le traitement du pétrole et du gaz naturel génèrent d’importantes quantités de lumière, perceptibles autour du champ pétrolier de Hassi Messaoud, du champ gazier de Hassi R’mel, ainsi que dans les champs de pétrole et de gaz naturel comme Adrar et Illizi. Par conséquent, les activités liées aux hydrocarbures et non aux non-hydrocarbures doivent être analysées séparément», explique le même document.
Expliquant la méthodologie d’analyse, les experts de la BM, indiquent qu’ils procèdent à l’isolation des données NTL associées au torchage du gaz à l’aide des coordonnées géographiques des sites de torchage fournies par la Global Gas Flaring Reduction Initiative (GGFRI) de la BM.
Ainsi, «les lumières flamboyantes mensuelles expliquent 94% des niveaux mensuels de production de pétrole brut. De même, les feux non torchés, dans les wilayas productrices de gaz expliquent 69% des niveaux de production mensuels de gaz naturel avec un coefficient statistique significatif sur le NTL du champ gazier de Hassi R’mel. En ajoutant les torches des usines de raffinage du pétrole et de liquéfaction de gaz d’Arzew et de Skikda, les NTL expliquent 80% de la valeur ajoutée réelle trimestrielle des hydrocarbures», lit-on encore dans le même document.
Concernant l’activité hors hydrocarbures, la même source souligne qu’à l’aide de lumières non flamboyantes dans les quatre plus grandes régions d’Algérie, il est possible de connaître 87% du niveau du PIB réel hors hydrocarbures, qui peut augmenter à 93% en tenant compte de la tendance et de la saisonnalité des données.
Ainsi, et selon les calculs, une augmentation de 1% de NTL correspond à une hausse de 0,5% du PIB hors hydrocarbures. L’approche par satellite a ainsi permis d’analyser le taux de croissance moyen du PIB hors hydrocarbures de 2013 à 2016, ainsi que l’ampleur du ralentissement de 2017 à 2019.
«Les régions des hautes terres de l’est et du nord-ouest étaient auparavant des moteurs-clés de la croissance hors hydrocarbures… A l’inverse, la région Centre-Nord, où se situe Alger, a soutenu la croissance de 2017 à 2019. La forte contraction économique liée à la Covid-19 a touché les régions en 2020, mais la région nord-est a connu une reprise plus rapide de son activité économique», souligne le document de la BM.
Et de noter enfin que la fiabilité du modèle est essentielle pour les décideurs politiques et les entrepreneurs et investisseurs. «Cela nous permet de fournir une approximation de la croissance du PIB au cours des trois premiers trimestres de 2023», indique la même note en remarquant grâce à ces données, «une solide croissance hors hydrocarbures en 2022 qui s’est poursuivie au cours des neufs premiers mois de 2023, suggére une croissance de 4,5% sur un an».