Kenya : La veuve d’un journaliste pakistanais tué porte plainte contre la police et le parquet

24/10/2023 mis à jour: 12:30
AFP
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La veuve du journaliste pakistanais Arshad Sharif, abattu en 2022 par des policiers au Kenya où il vivait après avoir fui son pays, a porté plainte hier contre la police et le parquet kényans, qu’elle accuse de négliger l’enquête, a annoncé son avocat. 

Arshad Sharif, critique véhément de la toute puissante armée pakistanaise et partisan de l’ancien Premier ministre Imran Khan, a été tué dans la nuit du 23 au 24 octobre 2022 par des tirs de la police sur un véhicule dont il était le passager, lors d’un barrage routier à une quarantaine de kilomètres de la capitale Nairobi. 

La police avait expliqué qu’il s’agissait d’une erreur d’identité, les policiers pensant tirer sur un véhicule volé impliqué dans un enlèvement. Javeria Siddique, l’une des deux épouses du journaliste, avait annoncé la semaine dernière son intention de porter plainte. «La plainte a été déposée» lundi devant la Haute Cour de Nairobi, a confirmé à l’AFP son avocat kényan, Ochiel Dudley, un an jour pour jour après la mort du journaliste. Déposée conjointement avec deux organisations kényanes de journalistes, elle vise notamment le parquet, la police ainsi que l’organe indépendant de contrôle de la police (IPOA), tous impliqués dans l’enquête. 

La plainte consultée par l’AFP souligne que les circonstances des tirs n’ont «fait l’objet d’aucune enquête ou, à défaut, si des investigations ont eu lieu, elles n’ont pas été rapides, indépendantes, impartiales, efficaces, responsables ou n’ont pas mené à la poursuite des auteurs matériels et intellectuels». Les plaignants «craignent que le fait de ne pas enquêter, arrêter ou poursuivre en justice les policiers qui ont illégalement abattu Arshad Sharif revienne à une dissimulation criminelle», ajoute-t-elle. Javeria Siddique affirme que son mari a été tué lors d’une «attaque ciblée». «Cela fait un an que je me bats pour la justice», a-t-elle déclaré à l’AFP: «La police kényane a admis avoir tué mon mari, mais ne s’est jamais excusée.» Arshad Sharif, 49 ans, avait fui le Pakistan en août 2022, quelques jours après avoir interviewé un haut responsable de l’opposition qui avait à cette occasion exhorté les officiers de l’armée à désobéir aux ordres contraires «à la volonté de la majorité (du peuple)». Ces déclarations avaient été considérées comme séditieuses par les autorités. 

Les critiques à l’encontre de l’armée et des puissants services de sécurité sont depuis longtemps considérées comme une ligne rouge au Pakistan, classé parmi les pays les plus dangereux au monde pour les professionnels des médias (150e sur 180 au classement de la liberté de la presse de Reporters Sans Frontières). En décembre, une équipe d’enquête des services de renseignements pakistanais a soumis un rapport à la Cour suprême qualifiant l’incident d’«assassinat planifié et ciblé», impliquant prétendument des «personnages transnationaux». La plus haute juridiction pakistanaise a été saisie de l’affaire, qui est toujours en attente.

 Des dizaines de milliers de personnes ont assisté aux funérailles d’Arshad Sharif le 27 octobre dans la capitale pakistanaise Islamabad. 

 

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