Le gouverneur de la Banque d’Algérie, Rostom Fadli, a indiqué que ce sont les banques qui sont réticentes à donner des crédits. Le secrétaire du Conseil de la monnaie et du crédit (CMC), Salah Eddine Taleb, a soutenu que la Banque centrale n’a pas envoyé de missives aux banques pour leur demander d’exiger des garanties.
«La Banque centrale n’a pas envoyé de missives aux banques pour leur demander d’exiger des garanties. C’est la banque qui est responsable du risque auquel elle est exposée», a soutenu le secrétaire du Conseil de la monnaie et du crédit (CMC), Salah Eddine Taleb.
La liquidité bancaire a atteint au 6 mars dernier 1500 milliards de dinars. C’est ce qu’a indiqué le gouverneur de la Banque d’Algérie, Rostom Fadil, hier lors d’un panel sur la réglementation bancaire tenu à l’occasion du Forum Business Legal initié par la startup Legal Doctrine. Le gouverneur a, par ailleurs, précisé que le problème de liquidité monétaire ne se pose plus et que l’Algérie en a pour trois ans de stock. «Il faut voir le côté résilience.
Dans ce cadre, tous les voyants sont au vert et la liquidité est là après les différentes crises, de celle de 2008 à la pandémie de la Covid-19», a-t-il assuré, précisant dans le même sillage pour répondre aux doléances des opérateurs économiques : «Ce sont les banques qui sont réticentes à donner des crédits.» Et au secrétaire du Conseil de la monnaie et du crédit (CMC), Salah Eddine Taleb, d’appuyer : «La Banque centrale n’a pas envoyé de missives aux banques pour leur demander d’exiger des garanties. C’est la banque qui est responsable du risque auquel elle est exposée.»
Une manière de jeter la balle dans le camp des banques concernant les lenteurs dans l’octroi des crédits. Rostom Fadil insistera : «C’est le projet qui est garant du crédit. Les banques sont libres. Elles doivent cependant prendre toutes les précautions dans l’étude des risques crédit.» Il ajoutera : «Les banques privées ne sont pas soumises à la pénalisation de l’acte de gestion, mais elles ne donnent pas de crédits.» Cela pour dire que le secteur bancaire privé ne joue pas le jeu dans le financement de l’économie.
Un constat déjà dressé à maintes reprises et rappelé hier devant les chefs d’entreprise qui se sont plaints des blocages de financement et ont exprimé leurs attentes concernant le climat des affaires. Un climat qui dépend de plusieurs facteurs et non pas uniquement de l’aspect crédit, comme le soulignera Mustapha Abderrahim, directeur général des études : «La BA ne peut pas agir sur l’environnement économique. Elle assure la supervision et la régulation.»
Pour faciliter l’accès au financement, les représentants de la Banque centrale ont proposé la mise en place d’un règlement permettant la concurrence entre les banques en matière d’octroi des crédits. Il y a lieu aussi de jouer sur la transparence et aller vers plus de transparence du côté des opérateurs économiques, de l’avis des intervenants. Ces lacunes pourraient expliquer, selon Rostom Fadil, la réticence des banques qui se retrouvent parfois devant des cas complexes. «Il y a eu des crédits pour des projets fictifs», notera d’ailleurs le secrétaire du CMC.
En somme, pour les représentants de la BA, le cadre réglementaire est mis en place pour faciliter les aspects opérationnels au monde des affaires, même en ce qui concerne l’offre commerciale e-banking qui dépend également des banques.
Concernant la réglementation des changes, les facilitations sont également là, selon Naziha Kaci, sous-directrice de la réglementation des changes. «Ce que nous avons fait en quatre ans, nous ne l’avons pas fait en quarante ans», assurera-t-elle, donnant comme exemple la dispense de domiciliation bancaire pour les start-up et les exportateurs de services conformément à l’instruction 06/2021. «Les lourdeurs n’existent pas au niveau des banques», assurera-t-elle.
La démarche d’assouplissement est aussi appliquée pour le transfert des dividendes à l’étranger. «On n’a pas rencontré de problèmes à ce niveau», soutiendra Mme Kaci. Au sujet des représentations bancaires à l’étranger, les textes sont en cours d’élaboration et seront prêts au deuxième semestre de l’année en cours, selon le gouverneur.
Des textes de loi en attente d’application
Ce sont donc autant d’annonces et d’assurances émanant de la Banque centrale à l’égard des investisseurs, qu’ils soient privés ou nationaux. Des investisseurs qui ont justement saisi l’occasion hier pour évoquer les contraintes rencontrées sur le terrain.
En plus de celles liées à l’accès au financement, ils ont abordé tour à tour le manque de visibilité à moyen et long terme, insistant sur l’instabilité du cadre juridique et la non-application des textes de loi pourtant annoncés à chaque fois en grande pompe. Il s’agit pour les intervenants de remettre la confiance sur la scène, de rassurer les investisseurs, de mettre en place les jalons juridiques pour digitaliser l’économie et aller vers plus de réactivité dans les décisions.
Les attentes sont par ailleurs focalisées sur les textes d’application relatifs à l’abrogation de la règle 49/51% et le nouveau code de l’investissement. «Nous espérons un cheminement clair et relativement simple», appelle à ce sujet Ramz Hamzaoui, directeur régional de Citibank pour les pays du Maghreb. «Il y a un attrait important du côté des opérateurs étrangers pour le secteur des assurances en Algérie, mais il y a des révisions de textes de loi qui ne sont pas complétées par des textes d’application», regrettera pour sa part Wided Belhouchet, PDG de Cash Assurances.
Dans les mines, le PDG du groupe industriel minier Manadjim El Djazair «MANA», Mohamed Sakher Harami, relèvera de son côté l’importance de la simplification de la loi dans le secteur public. «Nos partenaires évoquent la complexité de la loi minière. Il y a d’ailleurs une proposition d’assouplissement dans ce sens pour décloisonner ce secteur et aller au-delà de l’exploration surtout que la demande est importante localement.» Dans l’industrie pharmaceutique, le représentant de Saidal soulèvera la problématique fiscale.
C’est dire que les difficultés sont partagées tant par le privé et le public dans un contexte mondial de plus en plus complexe avec la guerre en Ukraine. Une situation à laquelle l’économie nationale est appelée à s’adapter après trois années de crise.
Banque d’Algérie : Une cellule de crise pour suivre l’évolution en Ukraine
Assurant de la réactivité de la Banque d’Algérie( BA), le gouverneur Rostom Fadil a annoncé hier la mise en place d’une cellule de crise en collaboration avec le ministère des Affaires étrangères pour suivre l’évolution du conflit russo-ukrainien et son impact sur l’économie nationale. «Mais, c’est flou encore pour le moment», dira-t-il, soulignant que les importations de blé ne sont pas très importantes avec l’Ukraine. Les mesures à prendre face à une telle crise dépendent, selon Rostom Fadil, du temps que prendra ce conflit. «C’est à partir de là qu’on va décider des mesures. Pour le moment, nous n’avons pas de visibilité», ajoutera-t-il. S. I.