Il y a un mal profond que personne ne voit et n’évoque et pourtant il est bien présent, et ce, dans tout l’espace public. Vous ne l’avez pas deviné, il s’agit du manque d’hygiène publique et de la saleté environnante causés par les rejets anarchiques et massifs de toutes sortes d’ordures ménagères, restes de matériaux de construction, pneus, contenants usagés de liquides, etc.
A chaque coin de rue se dressent d’énormes tas, aux odeurs pestilentielles, posés anarchiquement ou bien débordant de rares bacs d’un vert douteux censés les accueillir, eux-mêmes d’une saleté repoussante, la plupart du temps aux roulettes arrachées par les incessantes manipulations opérées sans ménagement par les agents de voirie. Jamais remplacés ni nettoyés, les bacs sont devenus aussi repoussants que les détritus eux-mêmes, posés dessus ou aux alentours.
Aucune agglomération, ni urbaine ni rurale n’est épargnée par ce phénomène, s’aggravant d’année en année sous l’effet conjugué de divers facteurs. Le premier, sans conteste le plus important, est lié à l’incapacité des pouvoirs publics à mettre en place les moyens conséquents de ramassage des déchets et à développer des méthodes modernes de gestion comme il en existe dans les pays modernes.
L’autre facteur est l’impact de la croissance démographique qui, d’année en année, voit l’arrivée de plus d’un million de nouveau-nés et donc impacter la demande en hygiène publique. Et enfin la généralisation d’un modèle de consommation , de type occidental, hautement producteur de déchets de tous sortes.
Ce n’est pas exagéré de dire que l’Algérie est devenue un dépotoir à ciel ouvert, au grand dam de sa population qui a fini par «s’adapter» à cet état de fait, développant une sorte de culture de la résignation. Celle-ci est redoutable en ce sens qu’elle ôte au citoyen tout réflexe de vigilance et de citoyenneté à l’égard du respect de l’espace public.
C’est devenu presque normal, voire même acceptable, pour l’Algérien de déposer dans la rue son sac-poubelle, le pneu usagé de sa voiture, une bouteille d’eau vide ou une cigarette. Et de nullement s’offusquer lorsqu’il constate de tels dépassements qui, souvent, affectent même des lieux censés être propres par définition, tels les monuments historiques, les gares et les aéroports, les avions.
Ne parlons pas des plages ou autres lieux de divertissement qui, en fin de journée, présentent un hideux spectacle. Jamais l’Etat ne s’est saisi à bras-le-corps de ce problème en mettant un dispositif législatif coercitif et les moyens qu’il faut. Dévolue aux APC et à quelques services de nettoiement et d’assainissement local, la tâche les a amplement dépassés.
Et pourtant, il est temps pour l’Etat de prendre le taureau par les cornes. Il s’agit de protéger la santé des Algériens de toutes les maladies susceptibles de naître du manque d’hygiène. La crise de la Covid est un avant-goût. Il est urgent aussi de faire de l’espace naturel algérien un lieu privilégié de vie, de détente et pourquoi pas de destination touristique.
Tout le monde le dit, en premier les visiteurs étrangers, l’Algérie est belle, bien dotée par la nature mais hélas sauvagement dégradée par des habitants peu éduqués et insuffisamment citoyens et par des pouvoirs publics peu à la hauteur d’une tâche d’intérêt public et sanitaire de première importance. Un conseil des ministres spécialement consacré à cette problématique serait bien à propos.
Il y a un autre rêve pour notre pays, qu’il ressemble à Singapour ou au Rwanda, champions en propreté urbaine. Ou, au moins, qu’il s’y approche un peu …