Guerre de libération nationale : Vers la paix en Algérie, une histoire des négociations d’Evian

04/05/2022 mis à jour: 23:06
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Les publications académiques sont abondantes en France à l’occasion du 60e anniversaire de la signature des Accords d’Evian et en prévision du 60e anniversaire de l’indépendance de l’Algérie. 

Parmi ces références disponibles dans les librairies françaises se distingue un ouvrage collectif dirigé par l’historien Maurice Vaïsse et intitulé Vers la paix en Algérie, les négociations d’Evian dans les archives diplomatiques françaises 15 janvier 1961 – 29 juin 1962. 

Beaucoup a été écrit, certes, sur la Guerre de Libération nationale, notamment sur cet épisode final ayant abouti au cessez-le-feu. 

Mais plusieurs aspects, détails, documents sur cette partie de notre histoire, qui nous importe au premier degré et qui continue d’influer sur notre présent, demeurent enfouis ou méconnus.

L’ouvrage en question apporte des éclairages nouveaux. Les auteurs ont travaillé essentiellement sur des archives diplomatiques françaises, contenant des télégrammes, des lettres, les procès-verbaux des réunions d’Evian I et II, et ceux de la conférence de Lugrin, en plus de la conclusion des pourparlers d’Evian, étayée par la reproduction de l’exemplaire original. 

Ces archives, souvent frappées du sceau «très secret», ainsi exhumées et commentées donnent vie aux négociations et permettent de saisir beaucoup mieux le moment. 

«Ces documents illustrent les vicissitudes et les difficultés de la relation franco-algérienne ; ils révèlent 18 mois de discussions, où dans le plus grand secret, émissaires et membres du gouvernement ont négocié avec les représentants du Front de libération nationale», est-il écrit sur la quatrième de couverture. 

Ces documents choisis sont reproduits dans toute la deuxième partie de l’ouvrage, la plus volumineuse d’ailleurs. Un véritable trésor pour les chercheurs, les politiques et les journalistes. 

Exemple : dans une note datée du 12 mai 1961 et frappée du sceau «très secret», le chef d’état-major général de la défense nationale tente d’analyser les ambitions connues et celles cachées du FLN à la veille des négociations, compte tenu de ses prétentions et ses véritables moyens, de l’influence de la conjoncture et le contexte international. Il émet aussi des hypothèses sur la manière dont le GPRA pourrait aborder les négociations. 

Autre exemple : dans une note datée du 15 janvier 1961, le Premier ministre Michel Debré définit l’objectif de la négociation : «L’Algérie algérienne unie à la France», et invite ses collaborateurs à réfléchir au «problème franco-algérien de la forme, ou des formes, de l’union», et celui de «la forme interne de l’Etat algérien», écrit-il en précisant que «la France ne peut être unie à n’importe quelle Algérie». 

Cette approche française va changer au fur et à mesure que les négociations avancent (ou pas) et que le sang continue à couler. La question de la durée de la négociation est l’une des plus lancinantes, pour de Gaulle surtout. 

«Si pour le Premier ministre, Michel Debré, 25 ans permettraient de bâtir une Algérie associée à la France, pour le général de Gaulle, le temps presse, car il entend restaurer le rang de la France, moderniser son outil militaire, épouser son époque ; son impatience est croissante, au point que dans la dernière phase, ses instructions sont claires :“ Réussissez ou échouez, mais surtout ne laissez pas la négociation se prolonger indéfiniment” », écrit l’historien natif d’Alger, Maurice Vaïsse.

Dans la première partie, une chronologie établie par Olivier Delorme permet de situer ces documents dans le temps et dans la compréhension de la guerre. 

On y trouve aussi l’historien SadekSellam, qui évoque les notes prises du côté algérien par Ahmed Boumendjel, ce pilier des négociations auquel il a consacré la biographie Ahmed Boumendjel (1908-1982), de la conquête morale coloniale à la reconquête de la souveraineté nationale. 

Dans son texte intitulé La diplomatie de guerre algérienne à Evian, il nous invite à survoler les contacts secrets et les négociations qui précédèrent Evian pour avoir une idée des grandes difficultés que les patients négociateurs eurent à aplanir, ou à contourner. 

Des contacts commencés en 1955  trébuchant souvent dans la quête des «interlocuteurs valables». 

Le texte de Sellam et celui de Chantal Morelle éclairent ces négociations d’un double point de vue, algérien et français. 

A quoi s’ajoutent de courtes biographies des négociateurs. A ce sujet, le livre nous renvoie aux mémoires de Roland Cadet, rédigées en août 1961, et où ce dernier tente de tirer les portraits des négociateurs et de dépeindre l’atmosphère dans ces salons où s’est tenue une longue partie d’échecs entre des hommes doués de patience et chargés d’obstination, et où s’est joué l’avenir d’une Algérie indépendante et celui d’une certaine idée de la France, devenue une impasse.

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