Au moins treize détenus politiques ont été libérés, depuis jeudi dernier, dans le cadre d’une grâce présidentielle, décidée à l’occasion de la célébration du 70e anniversaire du déclenchement de la guerre de Libération nationale. Le président de la République, Abdelmadjid Tebboune, a signé, jeudi, deux décrets présidentiels portant mesures de grâce pour plus de 4000 détenus.
Le premier texte concerne des mesures de grâce pour les condamnés définitivement dans des affaires de droit commun et le deuxième concerne les détenus dans des «affaires de trouble à l’ordre public». C’est dans le cadre de ce dernier décret que le journaliste et directeur du groupe médiatique Radio M et Maghreb Emergent, Ihsane El Kadi, a été remis en liberté.
La nouvelle a enflammé les réseaux sociaux très tôt dans la matinée d’hier où des avocats, des journalistes et des militants de divers horizons ont fait part de sa libération, tout en diffusant les premières photos prises à sa sortie de prison. «Quel bonheur, Ihsane El Kadi est libre !» s’est félicité Me Noureddine Ahmine, un des membres du collectif de défense des détenus politiques et d’opinion, sur sa page Facebook. Pour sa part, l’avocate Nabila Smaïl précise : «Ihsane El Kadi est enfin parmi les siens. Libéré un 1er novembre. La fin d’un cauchemar.» Ihsane El Kadi, 65 ans, a été emprisonné depuis 2022.
En juin 2023, il a été condamné, en appel, à sept ans de prison, dont cinq ans fermes. Sa peine était devenue définitive après le rejet d’un pourvoi en cassation en octobre 2023. Les annonces de la libération de plusieurs détenus d’opinion à Alger et dans différentes wilayas s’étaient poursuivies durant toute la journée d’hier. «Jusqu’à présent, on a recensé 13 libérations», nous déclare l’avocat et membre du collectif de défense des détenus d’opinion, Abdelghani Badi. Notre interlocuteur affirme qu’il ne détient pas la liste de tous les détenus concernés par cette mesure de grâce. «Il y a un flou. Le décret ne donne pas plus de détails sur le nombre de personnes concernées. Il ne précise pas les critères appliqués pour la mise en œuvre de cette mesure», dit-il, tout en espérant que «tous les détenus d’opinion soient remis en liberté».
«Un pas positif dans la bonne direction»
Outre Ihsane El Kadi, le jeune Mohamed Tadjadit, 29 ans, surnommé le «poète du hirak», retrouve également sa liberté. De même pour le plus ancien détenu du hirak dans la wilaya d’Adrar, Mohad Gasmi, qui retrouve les siens après plusieurs années de détention.
Dans une déclaration rendue publique hier, le Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD) espère que cela «soit un prélude pour un avenir de liberté, de libre débat et de dialogue sincère et constructif avec et entre les Algériennes et les Algériens pour sortir le pays de l’impasse». «Des détenus politiques et d’opinion viennent d’être libérés. Le RCD qui n’a pas cessé d’être à leurs côtés et de plaider leur innocence accueille avec un immense soulagement leur libération», lit-on dans cette déclaration.
En ce jour de célébration du 70e anniversaire du déclenchement de la Guerre de Libération nationale, ajoute la même source, «il est primordial de rappeler le combat et les lourds sacrifices des Algériennes et des Algériens pour la libération, la justice et la dignité». «Notre Rassemblement tient, également, à rendre hommage aux détenus pour leur courage et leur résilience dans la lutte face aux dures épreuves durant toute la période de leur incarcération injuste.
Il ne peut oublier de saluer toutes celles et tous ceux qui ont œuvré sans cesse et dans la difficulté pour la défense de leurs droits et leur soutien durant les longs et différents procès devant une justice aux ordres», souligne également le RCD.
Dans un communiqué rendu public, le Parti des travailleurs (PT) «se dit satisfait de la libération de plusieurs détenus politiques et d’opinion». «En attendant les détails sur le nombre de détenus libérés et en espérant la confirmation d’une information en vertu de laquelle la mesure couvrirait l’ensemble des prisonniers politiques, nous nous félicitons du geste de détente important pris par le président de la République mettant fin à la détresse de centaines de familles de militants, militantes, activistes et journalistes», indique ce parti.
Le PT «espère que cette décision sera suivie par d’autres pour rétablir les conditions normales d’exercice de la politique, des droits syndicaux et associatifs, de la liberté de presse, conformément à l’Appel du 1er Novembre 1954 qui énonce le respect des libertés fondamentales comme objectif central de la lutte armée inséparable de la restauration de l’Etat algérien».