Dans un rapport établi en juin dernier, une commission de l’APW énumère plusieurs anomalies dans le fonctionnement du CET de Corso.
Mis en service en 2013, le centre d’enfouissement technique de Corso, dans la wilaya de Boumerdès, est devenu source de pollution et de multiples nuisances pour les habitants des alentours. «C’est une décharge à ciel ouvert pas un CET.
Les odeurs qui s’en dégagent ont contraint beaucoup de résidants de notre village à déménager ailleurs. L’air irrespirable qui provient des casiers et du bassin du lixiviat (liquide hautement toxique, ndlr) se propagent parfois jusqu’à Tidjllabine, Aliliguia et Benmerzouga, au sud de Boudouaou», s’indigne Amine (34 ans), un jeune de Mehass, un quartier longeant la RN05. Avec une superficie de 60 ha, ce centre est l’un des plus grands du pays.
Il reçoit les déchets de 16 communes de l’est de la capitale et ceux de 13 municipalités de la wilaya de Boumerdès. Cela en sus des ordures de plusieurs autres organismes publics et privés. «On reçoit une moyenne de 1500 tonnes de déchets par jour», dira un ingénieur employé à Madinet, l’entreprise (Epic de wilaya) gestionnaire du CET.
Dans un rapport établi en juin dernier, une commission de l’APW énumère plusieurs anomalies dans le fonctionnement du centre. En sus de défaillances dans le système du traitement du lixiviat et le tri des déchets, les rédacteurs du document alertent sur le risque de remplissage du 2e casier avant l’heure.
Le centre est conçu pour abriter 5 casiers d’une capacité totale de 6 millions de tonnes, mais seulement deux ont été réalisés. «Même les chaînes de tri tournent au ralenti, alors qu’elles peuvent réduire de 40% le volume des déchets et prolonger la durée de vie des CET. En 2022, on a récupéré 4000 tonnes sur les 178 000 reçues.
La deuxième fosse de stockage se remplit à vue d’œil. Si on n’anticipe pas les choses, on risque de ne pas trouver où jeter les ordures à l’avenir», prévient un membre de la commission, rappelant qu’une telle situation avait déjà été vécue en 2019 suite à la saturation du premier casier. Pour les citoyens et des exploitants des terrains avoisinants, le mal est déjà fait.
Leurs préoccupations sont ailleurs. Il n’y a pas longtemps, une quarantaine d’agriculteurs se sont plaints des dégâts causés à leurs vergers. «Parfois un épais brouillard résultant de l’évaporation des déchets couvrent nos vergers. Ce brouillard contient des matières toxiques et provoque plusieurs maladies à nos récoltes.
Le phénomène s’accentue d’année en année et constitue une sérieuse menace à la santé publique. Nous avons alerté tout le monde, y compris le ministère l’Agriculteur, mais personne n’a réagi», déplore un viticulteur. Selon lui, même les forages, longeant l’oued de Corso, n’ont pas été épargnés.
«La direction de l’hydraulique a interdit l’utilisation d’une dizaine de puits d’irrigation et de forages d’eau potable, car ils ont été contaminés par le lixiviat provenant du centre d’enfouissement. En vérité, celui-ci n’a de tel que le nom», se désole notre interlocuteur, soulignant que la station de traitement du lixiviat est restée à l’arrêt durant plus de cinq ans.
«Cette station a coûté plus de 40 milliards de centimes. Malheureusement, elle n’a rarement été mise en service», s’indigne-t-il. Même problème au CET de Zaâtra où le premier casier arrive presque à saturation, d’où la nécessité de creuser une autre fosse pour contenir les déchets.
Ce centre est utilisé par 17 communes du centre et de l’est de la wilaya. Là aussi, la récupération se fait par des mains agiles qui, souvent, font abstraction des risques de cette activité pénible et mal rémunérée.