Le président américain organise, aujourd’hui et mardi, le deuxième «Sommet des Etats-Unis et du Forum des îles du Pacifique», à Washington.
L’Exécutif américain doit annoncer à cette occasion, selon de hauts responsables, entre autres, des projets d’infrastructures et une coopération maritime renforcée pour lutter, en particulier, contre la pêche illégale, selon l’AFP.
Le Forum des îles du Pacifique regroupe 18 Etats et territoires disséminés dans l’océan Pacifique. «Il est évident que la Chine joue un certain rôle dans tout cela, il est évident que ses ambitions et son influence dans cette région sont une raison pour nous de poursuivre notre offensive stratégique», a déclaré une haute responsable de la Maison-Blanche qui a requis l’anonymat, lors d’un entretien avec la presse. L’influence chinoise se manifeste, encore une fois, par l’absence à cette rencontre du Premier ministre des îles Salomon, désormais étroitement alliées à Pékin.
Manasseh Sogavare, après avoir participé, à New York, à l’Assemblée générale de l’ONU, n’a pas souhaité prolonger son séjour américain. «Nous sommes déçus» de cette absence, a reconnu un autre haut responsable de la Maison-Blanche. Les Américains mènent, par ailleurs, des discussions pour renouveler, avant la date butoir du 30 septembre, leur «accord de libre association» avec les îles Marshall.
Cet accord, comme Washington en a aussi avec la Micronésie et l’archipel des Palaos, autres territoires anciennement placés sous administration américaine, permet aux Etats-Unis d’y avoir une présence militaire. Ils fournissent, en échange, une assistance économique et des garanties de sécurité. Les habitants de ces îles sont libres de résider et travailler aux Etats-Unis.
Les îles Marshall demandent que Washington prenne en compte, dans tout nouveau partenariat, les effets de ses campagnes massives d’essais nucléaires dans les années 1940 et 1950. L’administration Biden espère évoquer des «progrès très significatifs» lors de ces négociations, selon le haut responsable déjà cité. Aussi, les Etats-Unis annonceront l’établissement de liens diplomatiques avec les îles Cook et Niue, un petit territoire qui compte moins de 2000 habitants. Comme ils comptent annoncer des aides en matière d’infrastructures, en particulier dans le domaine des câbles de communication sous-marins.
Aussi, ils prévoient de proposer aux îles du Pacifique de s’associer au «Quad», ce forum de coopération de défense qui réunit les Etats-Unis, l’Australie, l’Inde et le Japon, en matière de surveillance maritime, particulièrement pour traquer les navires pratiquant la pêche illégale. En mai, la Papouasie-Nouvelle Guinée a signé un accord de coopération en matière de défense avec les Etats-Unis. Il donnera aux Américains un accès aux eaux de Papouasie-Nouvelle Guinée près des routes maritimes vers l’Australie et le Japon, en échange d’un accès aux satellites de surveillance américains, selon le Premier ministre papouasien James Marape.
La porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, Mao Ning, a réagi en indiquant que Pékin ne s’opposerait pas à des «échanges normaux» entre les nations, mais qu’il fallait se méfier de l’utilisation de la coopération «comme prétexte pour s’engager dans des jeux géopolitiques» dans le Pacifique.
Une région convoitée
Puissance historique dans le Pacifique depuis la Seconde Guerre mondiale, l’Oncle Sam s’inquiète de l’influence chinoise qui se manifeste de plus en plus dans la région pour lui disputer cette suprématie. D’où la nécessité de renforcer sa présence dans cette région. Le 12 juillet 2022, la vice-présidente, Kamala Harris, avait annoncé aux Etats du Forum des îles du Pacifique (FIP) la nomination d’un premier «envoyé spécial américain», dans le cadre d’une toute nouvelle «stratégie nationale sur les îles du Pacifique».
En septembre, la Maison-Blanche a annoncé un nouveau fonds de 810 millions de dollars d’aide pour les îles du Pacifique-Sud, déclarant, à l’époque, vouloir accroître la présence diplomatique des Etats-Unis dans cette région. En février dernier, les Etats-Unis ont rouvert leur ambassade aux îles Salomon, fermée en 1993.
De son côté, la Papouasie-Nouvelle Guinée a signé, en mai dernier, un pacte de sécurité avec Washington qui donne aux forces américaines l’accès aux ports et aéroports de ce pays du Pacifique où les Etats-Unis cherchent à contrer l’influence de la Chine. Pékin a notamment signé une série d’accords avec les îles Salomon, à l’ouest des Tonga, dont l’un en avril 2022 a trait à la sécurité : il prévoit le renforcement de la présence policière chinoise jusqu’en 2025 dans cet archipel. Nombre de pays occidentaux, notamment les Etats-Unis et l’Australie, redoutent que ce pacte permette à l’Empire du Milieu d’établir une base militaire dans le pays.
Ce que les îles Salomon ont démenti. «Nous pensons que la signature d’un tel accord risquerait d’accroître la déstabilisation au sein des îles Salomon et de créer un précédent inquiétant pour la région des îles du Pacifique dans son ensemble», a estimé le porte-parole de la diplomatie américaine, Ned Price.
En 2019, les îles Salomon, qui jusque-là ne reconnaissaient que Taïwan, ont rompu leurs relations avec Taipei et établi des liens diplomatiques avec Pékin. L’armée chinoise a mené une opération humanitaire de grande ampleur aux îles Tonga, au lendemain de l’éruption d’un volcan qui a eu lieu le 15 janvier 2022.
Le 27 mai de la même année, la Chine et l’île Kiribati ont signé des documents de coopération, afin de construire des infrastructures et de lutter contre le changement climatique. Pékin devrait réhabiliter une ancienne piste de l’armée américaine sur l’île de Kanton.
Autre projet chinois : la réalisation d’un terminal portuaire pour conteneurs. Kiribati s’est tourné vers la Chine fin 2019, en s’inscrivant dans le projet des «Nouvelles routes de la soie» du président chinois Xi Jinping.