Certains médicaments utilisés dans le protocole sanitaire contre la Covid-19 se font de plus en plus rares dans les pharmacies de plusieurs wilayas du pays. Après les anticoagulants, tels que le Lovenox et son générique le Varinox, la tension touche désormais le Paracétamol et les antibiotiques, comme Azithromycine et Augmentin.
Les quantités livrées récemment aux pharmacies seraient nettement insuffisantes par rapport à la demande qui a augmenté ces derniers jours à cause de la flambée des contaminations à la Covid-19, a-t-on appris auprès de nombreuses officines. «On est soumis à un régime de quotas. Hier, le fournisseur nous a livré une trentaine de boîtes de paracétamol Dolyc 1g. Elles ont été épuisées au bout de deux heures.
Il n’y a pas que les malades qui sont atteints du virus qui en demandent. La grippe saisonnière aussi fait des dégâts. D’où la forte demande sur cet antalgique», explique un pharmacien exerçant à Boumerdès. Interrogé, un distributeur affirme que le spectre de la pénurie se fait sentir surtout dans les grandes villes, où le virus circule aisément parmi les populations en raison du non-respect des mesures sanitaires.
Un autre pharmacien pointe la mauvaise distribution ainsi que la vente concomitante de certains produits en rupture de stock. «Il y a des grossistes qui profitent de cette situation et s’adonnent à des pratiques malsaines pour écouler leurs marchandises. Il y a ceux qui, pour nous livrer du Lovenox par exemple, nous demandent d’acheter contre notre propre gré d’autres médicaments très peu demandés sur le marché. Ils font cela pour éviter leur péremption et subir des pertes. Cette pratique est illégale et doit être combattue par tous», souligne-t-il.
Outre la forte demande, certains grossistes incombent le manque des médicaments précités à l’augmentation des matières premières sur le marché international et de son transport depuis l’Inde et la Chine. A en croire nos interlocuteurs, le problème était prévisible depuis plusieurs mois.
Les dispositions du ministère
En novembre dernier, Bachir Allouache, directeur du contrôle et des activités pharmaceutiques au ministère de l’Industrie pharmaceutique, avait expliqué le manque de Doliprane par «l’épuisement du stock de la matière première, mais aussi la non-exploitation de deux producteurs de leurs stocks». Il a précisé que le prix d’un kilo de matière première a triplé, ajoutant que les frais du transport des conteneurs depuis la Chine sont passés de 2000 dollars à 15 000 dollars.
Pour mieux contrôler la distribution dudit médicament, M. Allouache a appelé alors tous les opérateurs privés et publics à déclarer leurs stocks. Interrogé, le représentant du Snapo à Boumerdès (Syndicat national des pharmaciens d’officine), parle d’approvisionnements en faibles quantités. Pour lui, la lutte contre les ventes concomitantes passe par la professionnalisation de la chaîne de distribution.
«Certes, le ministère a créé une cellule de veille qui permet aux pharmaciens de signaler toute anomalie en matière de vente et de distribution, mais cela reste insuffisant. Car il n’est pas normal que des grossistes dissimulent des produits, dont la population a énormément besoin, pour les vendre aux adeptes du marché parallèle», s’offusque-t-il, avant de se féliciter des progrès réalisés par l’Algérie dans le domaine de la fabrication de médicaments. «Si on ne l’avait pas fait à temps, on serait incapables de faire face à cette pandémie aujourd’hui», estime-t-il.
Pour garantir un approvisionnement continu des officines et des hôpitaux, le ministre de l’Industrie pharmaceutique a réquisitionné, depuis mercredi dernier, les producteurs, les importateurs et les distributeurs en gros de médicaments utilisés dans la lutte contre la Covid-19. Cette mesure concerne cinq classes thérapeutiques, à savoir les anticoagulants, les corticoïdes, les antibiotiques, les antalgiques et les vitamines et minéraux.
Le ministère a appelé les concernés à mobiliser leurs effectifs et l’ensemble de leurs moyens, afin de répondre aux besoins en produits pharmaceutiques. Il a averti que des inspections seront diligentées en vue de vérifier le respect des dispositions mises en place, soulignant que «toute pratique illégale de spéculation, de rétention, ou de vente concomitante sera sanctionnée, conformément à la législation et la réglementation en vigueur».