Un pacte d’actionnaires a été signé mardi à Alger entre les groupes algériens Asmidal (filiale de Sonatrach) et Manal avec Wuhuan et Tian’an, deux sociétés chinoises pour la création, en partenariat, d’une Société par actions (SPA) de droit algérien à l’effet d’engager des activités préliminaires relatives au développement du Projet phosphates intégré (PPI). Baptisée «Algerian Chinese Fertilizers Company (ACFC)», cette nouvelle SPA, de droit algérien, est détenue à 56% par la partie algérienne et 44% par les Chinois.
Premier projet intégré en Algérie dans le domaine de l’exploitation minière et la production d’engrais, le PPI nécessitera un investissement de quelque sept (7) milliards de dollars, soit près d’un milliard de plus par rapport au premier préaccord, annoncé avec CITIC, un groupe public chinois.
Et si l’Algérie doit apporter un total d’environ 3,92 milliards de dollars représentant les 56% de ses actions à ACFC, les deux sociétés chinoises devront à leur tour assurer une participation de plus de 3 milliards de dollars. Sont-elles en mesure d’assurer cette importante enveloppe ? En cash flow ou en crédit bancaire chez des banques algériennes ?
A ces interrogations, le PDG du groupe Asmidal, Heouaine Mohamed Tahar, est catégorique : «Le financement sera chinois. Il sera contracté auprès d’une banque chinoise avec des taux attractifs et des délais de remboursement négociés. L’apport de la banque chinoise ne sera pas à 100% étant donné qu’il y a celui des actionnaires.
Le taux sera également négocié». Sur la raison du choix du partenaire chinois, M. Heouaine justifie : «Les entreprises chinoises sont les seules capables aujourd’hui d’investir avec des sommes importantes et des avantages intéressants dont les taux très attractifs et les délais. Donc, actuellement nous sommes d’accord sur le principe : le projet est un acquis. Il ne reste que les détails.
Le CPE nous a donné un délai de 18 mois pour discuter ces détails et finaliser les études technico-commerciales. Après ces délais, nous passerons directement à la construction». Dans son communiqué rendu public, le groupe Asmidal a expliqué que «le PPI englobera le développement et l’exploitation du gisement de phosphates de Bled El Hadba, Djebel Onk, dans la wilaya de Tébessa, la transformation chimique des phosphates à Oued Kebérit de Souk Ahras, la fabrication des engrais à Hadjar Soud de Skikda, ainsi que des installations portuaires dédiées au niveau du port de Annaba». Abondant sur le registre technique, Asmidal affirme également qu’après l’achèvement du projet, la société produira à terme 5,4 millions de tonnes d’engrais par an.
Le projet induira, toujours selon la même source, un essor socio-économique considérable dans la région Est du pays, notamment par la création d’environ 12 000 emplois en phase construction et à terme, en phase exploitation, environ 6000 emplois directs et 24 000 emplois indirects.
Pour mémoire, la sélection des deux nouveaux partenaires chinois résulte d’un appel à manifestation d’intérêt ouvert lancé par le ministre de l’Energie Mohamed Arkab qui avait invité officiellement son désormais «ex-partenaire» chinois Citic à participer à l’avis de manifestation d’intérêt au PPI que le groupe Asmidal avait lancé il y a plusieurs années.
Selon des observateurs avertis, ce changement avait une seule lecture : limiter la mainmise des Chinois sur ce mégaprojet dont la réalisation nécessitait quelque six milliards de dollars et de surcroît, le financement sera assuré à hauteur de 80% par des banques chinoises (?) Tout avait été entamé le 26 novembre 2018, où un accord de partenariat entre les groupes Sonatrach et Asmidal-Manal, et les groupes chinois Citic et Wengfu, avait été signé à Tébessa.
Ce partenariat portait sur la réalisation d’un projet intégré d’exploitation et de transformation du phosphate et du gaz naturel des gisements de la région de Bled El Hadba. Wengfu avait quitté le projet avant son lancement. L’accord a été signé par l’ex-PDG de Sonatrach, Abdelmoumene Ould Kaddour (actuellement en prison), et le PDG de la société Citic, Chen xiaoijia, à la direction de transfert du gaz dans la localité Oglet Ahmed, à 22 km de Bir El Ater, distante de 106 km au sud du chef-lieu de wilaya. Le PPI est réparti entre, outre le port de Annaba, le gisement de Bled El Hadba à Tébessa, (2045 ha), la plateforme de Oued Kebrit à Souk Ahras (1484 ha) pour la production de l’ammoniac, celle de Hadjar Essoud à Skikda (149 ha) pour l’acide phosphorique, selon la fiche technique de ce projet.
Mis en exploitation, sa production devrait atteindre 7 millions de tonnes de phosphate/an et 1,1 million de tonnes d’ammoniac/an, et comprendra le dédoublement de la voie ferrée reliant le site de production au port d’Annaba.
Qui sont Wuhuan et Yunnan TIAN’AN ?
Le groupe Asmidal a affirmé que «Wuhuan Engineering Co. Ltd, est une société internationale d’ingénierie intégrant la recherche et le développement techniques, la technologie d’ingénierie, les services d’ingénierie et les opérations industrielles. Depuis sa création en 1958, Wuhuan a réalisé plus de 2000 projets de conception d’ingénierie et plus de 100 projets clé en main en Chine et à l’étranger. Wuhuan a accumulé de riches expériences dans la conception d’ingénierie, l’approvisionnement, la construction et la mise en service ainsi que l’exploitation et la maintenance des usines d’engrais, tels que les engrais phosphatés et azotés, etc. Wuhuan dispose de références mondiales dans le domaine de l’industrie chimique du phosphate, du charbon et gaz naturel et est déjà considérée comme la plus expérimentée et la plus capable des entreprises chinoises dans ce domaine». Quant à la seconde société, la même source abonde : «Yunnan Tian’an Chemical Co. Ltd est une société de production d’engrais azotés et phosphatés parmi les plus connues en Chine. Tian’an est expérimentée dans la gestion de la production d’engrais et dispose d’un large réseau de commercialisation en Chine, aux Etats-Unis, au Moyen-Orient, en Asie du Sud-Est et de plus de 10 000 franchisés et distributeurs dans le monde».