Fabriqués par Sarl Corénav de Zemmouri El Bahri : Les premiers thoniers made in Algeria mis à l’eau

03/04/2022 mis à jour: 00:49
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Les thoniers made in Algeria n’ont rien à envier à ceux fabriqués par les grands constructeurs étrangers

L’Algérie pourrait bientôt passer du statut d’importateur à celui d’exportateur de thoniers. Fruit de plusieurs années de sacrifices d’hommes passionnés par le métier de la construction navale, les premiers bateaux de pêche ont été mis à l’eau il y a quelques jours au port de Zemmouri El Bahri, dans la wilaya de Boumerdès. 

Il s’agit de deux thoniers de 34 m qui ont été fabriqués par la Sarl Corénav, une entreprise privée spécialisée dans la construction et la réparation navales. Pour son gérant, Ali Chaouch (74 ans), c’est un rêve d’enfance qui vient de se réaliser. Les deux thoniers n’ont rien à envier à ceux fabriqués par les grandes firmes étrangères. 

En sus de 4 chambres à coucher, ils sont dotés d’un restaurant, une cuisine, 2 douches et d’une salle à manger, la passerelle et la chambre d’amendement. 

On y trouve également une chambre froide et un magasin de stockage de poisson. De l’avis de nombreux pêcheurs de la célèbre station balnéaire, les bateaux de Aâmi Ali sont nettement mieux que ceux importés d’Espagne ou d’ailleurs. 

«Certains les ont importés à 56 milliards, alors que ceux construits par Corenav sont cédés à 35 milliards. En plus, ils sont de meilleure qualité», dira Kamel, un capitaine de pêche, abordé au milieu de dizaines de sardiniers en cours de construction ou/et de réhabilitation. 

Les deux thoniers devront prendre le large dans un mois pour participer à la campagne de pêche du grand mammifère marin. 

«Nous sommes aux dernières retouches. Et nous avons aussi deux autres bateaux de même type qui sont en chantier, dont un sera achevé incessamment», dira Aâmi Ali tout de go. 

Ce vieil homme à l’esprit jeune n’est pas venu au métier par accident. Sa première performance remonte à 1980. «Ma première barque je l’ai vendue à Omar Toudji, un marin de Dellys. Et elle est toujours en bon état», se félicite-t-il. Comme tous les investisseurs, son parcours est jalonné d’embûches, mais sa persévérance a eu raison de toutes les difficultés. 

En 2004, l’Etat lui octroie une aide de 5 milliards de centimes dans le cadre du plan de soutien aux professionnels de la pêche. Cette somme lui a permis d’acquérir une grille (porting) des Etats-Unis, indispensable pour le développement de son activité. Mais le secret de sa réussite réside dans son amour du métier.

Des contraintes à lever

L’Algérie compte deux autres entreprises de construction navale, mais Corenav s’est imposée comme le leader à l’échelle nationale. Ses effectifs sont passés de 15 à 80 employés, alors que ses sardiniers et ses chalutiers sont très prisés par les marins-pêcheurs. Si ces derniers nécessitent une expertise moins pointue, ce n’est pas le cas des thoniers. 

Les plans et les techniques de construction adoptés par l’entreprise ont été validés et fait l’objet de suivi par des experts et des architectes de renommée, indique encore notre interlocuteur. La résine qui constitue l’essentiel de la matière première est achetée chez un producteur national établi à Aomar (Bouira), tandis que la fibre est importée d’Espagne et de Russie, souligne-t-il. 

Avec sa zone extra-portuaire dédiée aux métiers de la pêche, Zemmouri El Bahri ambitionne de devenir un grand pôle de la construction navale à l’avenir. Mais cette ambition bute sur d’énormes obstacles. 

Faute d’espaces, le patron de Corenav a raté la première occasion d’exporter 30 thoniers vers la Mauritanie en 2020. «Depuis vingt ans, on travaillait sur une superficie de 1000 m2. 

Ce n’est qu’après l’intervention du président de la République, en décembre dernier, qu’on nous a ajouté une assiette de 2400 m2. 

Ce qui nous a permis de respirer un peu et de lancer d’autres chantiers», indique M. Chaouch. Pourtant, ce n’est pas l’espace qui manque. 

Octroyées à des pistonnées de l’administration, plusieurs parcelles alentour au port ne sont pas exploitées tandis que d’autres abritent des structures à l’abandon, dont la plupart sont gérées par l’EGPP. 

L’exiguïté n’est pas le seul problème qui entrave l’activité de Corenav et des pêcheurs. Le port est ensablé alors que sa passe est très exiguë, ce qui rend l’accès et la sortie des bateaux de pêche très difficiles. 

Annoncé il y a plus de dix ans, l’entame du projet du port n’est pas pour demain.  

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