Une belle exposition est actuellement accrochée sur les murs de l’Institut Cervantès d’Oran qui met à l’honneur, à travers des captures photographiques, l’ancienne cité, tout à la fois punique byzantine et romaine qu’est Tipasa.
Considéré en effet comme l’un des sites archéologiques les plus importants du littoral algérien, Tipasa a été inscrite en 1982, soit il y a plus d’une quarantaine années de cela, au patrimoine mondial de l’humanité grâce à son mausolée royal de Mauritanie (plus connu sous le nom de «Tombeau de la chrétienne»), cet monument funéraire imposant datant de plus de 2000 ans et situé dans la commune de Sidi Rached.
Présentée dimanche dernier, l’exposition, à laquelle ont pris part les archéologues Alejandro Queveno, chercheur à l’université madrilène de Compluense et son collègue algérien Rafif Khellaf, de l’université Morsli Abdellah de Tipasa, entre dans le cadre de ce qu’ils appellent «le projet Tipasa», financé par le ministère espagnol de la Culture et la fondation Palarq et dirigé par les universités respectives d’où proviennent les deux chercheurs, et ce, en collaboration avec le Conseil supérieur des recherches scientifiques espagnol et l’Institut Baléare des études en archéologie maritime.
Une initiative entreprise suite au constat que l’environnement de cette cité n’a pas été suffisamment exploré et qu’il est confronté aujourd’hui à grand risque de disparition, du fait, d’une part, à l’érosion marine qui affecte gravement les structures anciennes du littoral, et de l’autre, à une expansion urbanistique «qui a triplé la zone bâtie au cours de la dernière décennie».
Il y a aussi, à travers ce projet, une volonté de dénicher, ou tout au moins de dévoiler «l’héritage archéologique du territoire de Tipasa, tout en analysant les liens avec la péninsule ibérique», la région, en effet, aux dires des deux archéologues présents, «partage avec l’Espagne un héritage historique précieux et peu connu».
Il est d’ailleurs même annoncé qu’une carte archéologique complète de la région, actuellement en cours d’élaboration, soit bientôt dévoilée. Pour revenir au travail des deux archéologues, qui ont eu loisir à effectuer leurs recherches, durant l’année 2021, sur une bande de terre de 25 km allant de Tipasa jusqu’au site du Tombeau de la chrétienne, on apprend qu’ils ont eu recours à une combinaison entre la cartographie satellitaire la plus récente et la collecte de matériel ancien, principalement des poteries.
«La découverte de nombreuses amphores (récipients destinés au transport de denrées alimentaires) en provenance d’Espagne illustre, argue-t-on, le lien avec l’autre rive.» Natif de Cartagène, située dans une région (sud-est de l’Espagne) qui regarde vers l’Algérie, Alexandro Ceveno nous a confié que depuis son plus jeune âge, il se demandait toujours «ce qu’il pouvait bien y avoir en face ?»
«Il y avait donc déjà une curiosité personnelle et puis j’ai rencontré Rafik Khellaf avec qui je suis devenu très ami et on s’est dit ‘pourquoi, en tant qu’archéologues, n’essaye-t-on pas de développer ce type de relations, de travailler sur pans de vie archéologiques' ?»
Notons tout de même que Alexandro Ceveno connaissait déjà l’Algérie pour avoir travaillé, en tant que spécialiste en céramiques romaines, à la place des Martyrs d’Alger pendant que s’opéraient les fouilles archéologiques en parallèle à l’aménagement de l’extension de la ligne du métro. «J’adore l’Algérie, un pays que je trouve fascinant, avec un patrimoine incroyable.
On a beaucoup travaillé dans la région centre du pays, Alger, Tipasa, Cherchell, et j’aimerais beaucoup aller travailler plus vers l’Ouest, dans l’Oranie, une région qui a une tradition très forte avec l’Espagne», confie-t-il.