Le marché de l’emploi se rééquilibre aux Etats-Unis, l’inflation ralentit malgré de récents rebonds: les ingrédients semblent réunis pour que la Fed maintienne ses taux à leur niveau actuel, lors de sa réunion mardi et mercredi, sans toutefois crier victoire.
«Il est largement attendu que la Fed maintienne ses taux stables», lors de la réunion de son Comité de politique monétaire, le FOMC, selon une note des économistes d’Oxford Economics. Les taux se situent dans la fourchette de 5,25 à 5,50%, après 11 relèvements depuis mars 2022. Pour se décider, les responsables de la Fed scruteront la situation de l’emploi, la consommation, l’activité manufacturière et, bien sûr... les chiffres de l’inflation, dont le ralentissement est leur priorité depuis près de deux ans.
Or, celle-ci a accéléré en août, pour le deuxième mois d’affilée, à 3,7% sur un an, après avoir ralenti pendant un an, selon l’indice CPI publié mercredi. Mais comme «l’inflation sous-jacente s’est mieux comportée, nous ne nous attendons pas à ce que ces données aient beaucoup d’impact» sur la décision de la Fed, estiment encore les économistes d’Oxford. En effet, cette mesure, qui exclut les prix de l’alimentation et de l’énergie, a continué à ralentir en août.
Le président de la Fed, Jerome Powell, pourrait, toutefois, «profiter de l’occasion pour souligner le chemin incertain et semé d’embûches en matière de désinflation», a commenté Krishna Guha, économiste pour Evercore, société de conseil en investissements. Jerome Powell tiendra son habituelle conférence de presse mercredi, après la publication de la décision du comité et des prévisions économiques actualisées. Il devrait conserver un ton très prudent, laissant la porte ouverte à des hausses supplémentaires.
«La Fed en a terminé avec son cycle de resserrement» mais ses responsables se garderont bien de l’affirmer, afin d’éviter «que les marchés intègrent» cela, a dit à l’AFP Gregory Daco, chef économiste pour EY. Le risque ? Voir «les conditions financières se (relâcher) prématurément», ce qui pourrait faire repartir les prix à la hausse.
Côté emploi, la situation semble se rééquilibrer progressivement, après deux années de pénurie de main- d’oeuvre. Le taux de chômage a grimpé à 3,8% en août, en raison d’un afflux de nouveaux travailleurs, ce qui devrait aider à calmer l’inflation.
La Fed s’intéresse aussi de près à la consommation, moteur de la croissance économique américaine. Celle-ci était vigoureuse depuis le début de la crise de la
Covid, alimentant la forte inflation. Elle montre, pourtant, de premiers signes de faiblesse, avec des dépenses «modestes» cet été, selon le «Beige Book», une enquête réalisée par la Fed.
Les ménages américains arrivent au bout des économies accumulées depuis le début de la pandémie. Et, donc, «comptent davantage sur l’emprunt pour financer leurs dépenses», selon l’enquête de la Fed. Or, avec les hausses de taux successives, le crédit coûte bien plus cher, contraignant les ménages à repousser certains achats, ou même y renoncer.
Et dès octobre, des millions d’Américains recommenceront à rembourser leur prêt étudiant, après deux ans et demi de pause liée à la Covid. La grève inédite entamée vendredi par le puissant syndicat de l’automobile, l’UAW, pourrait, en outre, peser sur la croissance.
De même que le spectre d’un «shutdown», une paralysie de l’administration fédérale, si républicains et démocrates au Congrès ne s’accordent pas rapidement sur le budget du gouvernement. Le comité de politique monétaire de la Fed se réunira au complet, pour la première fois depuis février, après le départ de l’ancienne vice-présidente Lael Brainard, partie diriger l’équipe de conseillers économiques de la Maison-Blanche.
Un gouverneur de la Fed, Philip Jefferson, lui succèdera, comme l’a récemment confirmé le Sénat, qui a également validé la nomination d’Adriana Kugler, représentante des Etats-Unis à la Banque mondiale, au siège vacant de gouverneur, devenant la première responsable de la Fed d’origine hispanique. De l’autre côté de l’Atlantique, la Banque centrale européenne (BCE) a relevé, jeudi, ses taux de 0,25 point pour le porter à 4,0%, à son plus haut niveau depuis 1999, mais cela pourrait être la dernière hausse. Si la croissance a ralenti en zone euro, l’inflation y était toujours, en août, de 5,3%.