Saïda Neghza demande l’organisation d’une tripartite pour «un dialogue franc et large» sur la situation socio-économique du pays. Dans une lettre adressée au Président de la République, et publiée sur sa page facebook, la secrétaire générale de la Confédération Générale des Entreprises Algériennes (CGEA) fait un constat sans appel sur les blocages rencontrés par les opérateurs économiques dans l’exécution de leurs projets.
La situation socio-économique du pays se traduit, dit-elle, par un «marasme économique et un climat des affaires souffrant de manque de confiance, et une surenchère presque généralisée des prix». Neghza affirme recevoir «des doléances diverses de la part d’hommes d’affaires» qui «se plaignent de persécutions et de pressions récurrentes de la part des différents représentants de l’Etat».
D’autres, continue Neghza dans sa lettre, se plaignent «d’amendes infligées par un comité formé de cinq ministres, sans même avoir le droit d’accéder à leurs dossiers. Des amendes qui dépassent, pour certains, le montant des actifs de leurs sociétés».
La SG de la CGEA souligne que lorsqu’un homme d’affaires est convoqué devant un comité dont fait partie le ministre de la Justice, il se retrouve désarmé et sans aucune protection. «A quel saint se vouer ?», s’interroge la cheffe d’entreprise, en demandant que ce dossier soit traité de manière «rationnelle… tenant compte de l’intérêt général et en préservant le tissu industriel et la main-d’œuvre, et en reconvertissant les amendes exigées en obligation de lancement de projets d’investissements productifs». Saïda Neghza continue sur sa lancée en affirmant qu’il est impératif de «prendre en compte les particularités du pays, y compris la non- convertibilité du dinar et le problème du Square».
Blocages et restrictions bureaucratiques
La cheffe d’entreprise précise qu’il est tout à fait normal qu’un homme d’affaires qui a fait des profits aspire à posséder des biens en Algérie et à l’étranger. «Mais la loi algérienne ne permet pas cela. Comment traiter rationnellement cette question ? Est-ce en mettant en faillite les opérateurs économiques, en vendant ou en fermant leurs usines et en mettant des milliers de travailleurs au chômage ?», s’interroge-t-elle, tout en disant avoir adressé une série de propositions au président de la République au sujet des opérateurs voulant régulariser leur situation suivant des «mesures raisonnables et bénéfiques pour toutes les parties».
Evoquant la flambée des prix de certains produits, la SG de la CGEA accuse les restrictions appliquées par ALGEX et les autorisations exigées comme les autorisations techniques délivrées par le ministère de l’Agriculture ainsi que les attestations de régulation délivrées par le ministère de l’Industrie «dont nous ne savons pas comment ils procèdent, et selon quels critères elles sont délivrées», indique la même responsable. Cette dernière dit au président souhaiter «plus de transparence» ainsi que «la création d’une commission d’enquête chargée de déterminer comment sont délivrées les licences d’importation et les quotas, dont bénéficient certains et pas d’autres».
Saïda Neghza évoque le cas d’opérateurs voulant investir dans le textile mais qui n’ont pas reçu l’aval souhaité, ou encore ceux opérant dans l’importation des légumes secs et de l’aliment de bétail. «Des bateaux sont empêchés d’entrer aux ports alors que pour certains, les marchandises sont déjà payées», assure la cheffe d’entreprise en notant que ces bateaux sont en rade au moment où le marché national souffre de pénurie de matières premières.
Saïda Neghza s’interroge à qui pourrait bien servir ces mesures restrictives ? «Il y a une volonté de créer la rareté que nous allons sûrement payer cher, à défaut de mesures énergiques pour redresser la situation», indique-t-elle.
Les restrictions d’importations et leur impact sur l’absence de matières premières nécessaires à la production, le manque d’attribution de foncier agricole, notamment dans le sud du pays, sont cités dans la lettre de la CGEA parmi les blocages mettant en péril la production nationale. «La majorité des chambres froides sont vides parce que leurs propriétaires ont peur d’aller en prison pour le motif de spéculation.
Comment feront-ils pour rembourser les dettes contractées auprès des banques et comment le marché sera-t-il régulé dans ce cas ? On vivra inévitablement une hausse vertigineuse des prix, une fois la saison des récoltes terminées parce que tout le monde refuse de les stocker», avertit Mme Neghza.
Saïda Neghza conclut, en notant qu’une tripartite est le cadre approprié pour étudier la situation économique du pays, lever les contraintes et faire des propositions dans un cadre de dialogue franc et large. «L’écoute des opérateurs économiques, des différents patrons et des représentants des travailleurs est importante. Je pense qu’il faut sortir des propositions des seuls conseillers bureaucratiques qui veulent diriger l’économie nationale depuis leurs bureaux et avec des décisions d’en haut, sans tenir compte des vrais problèmes imposés par la réalité du terrain», soutient Saïda Neghza.