En détectant le plus rapidement possible les effets indésirables inconnus ou insuffisamment documentés et les interactions avec d’autres médicaments, le Centre national de pharmacovigilance et matériovigilance (CNPM) a un rôle important à jouer afin de préserver la santé du patient. Explications...
Une quarantaine d’enquêtes concernant des médicaments, du matériel médical ou encore des vaccins ont été ouvertes depuis le début de l’année par le Centre national de pharmacovigilance et matériovigilance (CNPM). Le but : évaluer les informations relatives aux effets indésirables dus à l’usage de ces derniers.»
C’est en tout cas ce qu’a annoncé, samedi, Nouzha-Z'hor Lazli, directrice du Centre, lors de la journée de formation en pharmacovigilance organisée par les laboratoires El Kendi au niveau du Nouvel Institut Pasteur situé à Dély Ibrahim. Selon elle, les missions de ce Centre, créé par décret exécutif n° 98-192 du 3 juin 1998, sont indispensables «pour accomplir notre devoir vis-à-vis des patients».
En effet, cette spécialité garantit la surveillance des médicaments et de leur efficacité au niveau de la qualité et de la sécurité. Cette spécialité peut donc mener à prendre des mesures de retrait de médicaments afin de minimiser les risques.
A cet effet, Nouzha-Z'hor Lazli explique : «Il faut savoir que chaque nouveau médicament mis sur le marché a été testé à l’avance. Cependant, certains effets indésirables rares ne se manifestent que lorsqu’un médicament est déjà sur le marché depuis un certain temps. C’est pourquoi, il est important de rester attentif une fois le produit sur le marché et la pharmacovigilance vise justement à détecter, analyser et prévenir ces effets indésirables.»
De son côté, le Dr Amina Mamèche, chef de service de surveillance des effets indésirables au CNPM, souligne qu’il faut d’abord dissocier l’événement indésirable de l’effet indésirable : «L'événement indésirable, contrairement à l'effet indésirable, ne préjuge pas d'un lien de cause à effet avec une exposition notamment à un médicament.» Toutefois, elle conseille de tout déclarer.
«Même si l’effet indésirable est inscrit sur la notice, il est quand même important de le déclarer», affirme-t-elle.
En ce qui concerne le processus de gestion des notifications, le Dr Mamèche affirme qu’il est lancé suite à l’émission d’une notification concernant un problème posé par un médicament, un vaccin ou un matériel médical. Une pré-enquête est alors organisée avec la participation d’enquêteurs du CNPM, de collaborateurs techniques régionaux, de praticiens extrahospitaliers publics ou privés.
«On procède alors à l’évaluation d’un lien de causalité et voir le risque d’une potentielle reproductibilité de l’effet indésirable.» Si le cas est grave ou fréquent, le Dr Amina Mamèche affirme qu’une réunion avec le comité ad hoc est organisée.
A noter que le comité d’experts est constitué d’un représentant du ministère de la Santé, un représentant de la Pharmacie centrale des hôpitaux, un représentant de l’Agence nationale des produits pharmaceutiques, un représentant du CNPM, les utilisateurs et autres, selon la nature du produit.
Mise en quarantaine
«Si le lien de causalité est établi, une réunion avec le fabricant ou le représentant de la firme est organisée dans le but de demander un complément d’information au sujet du produit concerné et procéder à des essais cliniques supplémentaires si nécessaire», explique le Dr Mamèche.
Par la suite, un rapport est élaboré et adressé à la direction de la pharmacie (MSPRH) et à l’Agence nationale des produits pharmaceutiques. Dans le cas où le produit concerné par l’enquête est un vaccin, le rapport est adressé à la Direction générale de la prévention.
Si par contre, le médicament a induit des effets indésirables mortels, le produit est mis en quarantaine le temps de l’enquête. «Dans ce type de cas, on met le lot, qui a causé un problème grave, en quarantaine, et on suit les autres lots. Sachant qu’il est possible que la quarantaine soit renouvelée si l’enquête n’est pas achevée», souligne le Dr Mamèche.
C’est pourquoi, la spécialiste insiste sur l’importance de déclarer tout effet indésirable constaté. «Il faut inculquer l’effet de déclaration, car c’est à partir de là que l’on peut éviter de nombreux problèmes», affirme-t-elle.
Un avis partagé par le Dr Rabah Morsli, qui ajoute que même les dispositifs médicaux sont concernés par ce type de vigilance. En effet, la matériovigilance permet l’évaluation et la surveillance des risques liés à l'utilisation des dispositifs médicaux afin d’éviter que ne se reproduisent des incidents graves, et cela en prenant les mesures préventives adéquates. Finalement, les produits de santé peuvent présenter un risque.
C’est pourquoi, le Dr Achouak Ghorab, du CNMP, estime que la vigilance dans tous les domaines est une activité de collaboration entre différents partenaires. «La pharmacovigilance est un travail collaboratif», martèle-elle, ajoutant qu’il est impératif que les données soient partagées entre les partenaires.
Ainsi, tout incident entraînant ou pouvant entraîné la dégradation de l’état de santé d’un patient doit être signalé au CNPM, que ca soit par le fabricant, le praticien ou le patient lui-même. Le signalement doit se faire aussi vite que possible, et cela via le site web du Centre ou encore à travers l’application VigiMedz.
Le Dr Achouak Ghorab estime donc que la pharmacovigilance est une science à part entière, car elle fait le lien entre les différents secteurs et parties dans le circuit du médicament et recommande, entre autres, de placer un bureau de pharmacovigilance dans les différentes structures de santé.