Douze sénateurs américains menacent le procureur en chef de la CPI : «Vous avez été prévenu !»

08/05/2024 mis à jour: 15:02
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Photo : D. R.

«Vous avez été prévenu !» C’est ainsi qu’un groupe de sénateurs républicains a terminé la lettre envoyée à Karim Khan, procureur en chef de la Cour pénale internationale (CPI), afin de le dissuader d’émettre des mandats d’arrêt internationaux contre les dirigeants israéliens.

Dans une lettre d’une page, adressée au procureur en chef de la Cour pénale internationale (CPI) et rendue publique dimanche dernier par le site américain Zetéo.com, douze sénateurs républicains américains ont averti qu’ils imposeront de «sévères sanctions, si des mandats d’arrêt internationaux sont délivrées» contre le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahu et d’autres dirigeants israéliens.

Dans le cas où de telles décisions devraient être prises, ils avertissent Karim Khan que «vos employés et associés seraient sanctionnés et  qu'il y aura pour vous et à vos familles interdiction d’entrer aux USA». Le contenu de cette correspondance laisse apparaître des menaces directes contre le bureau du procureur en chef de la CPI, sa personne et les membres de sa famille.

D’emblée, les auteurs ont expliqué au procureur en chef de la CPI qu’ils lui ont écrit au sujet «des rapports selon lesquels la CPI pourrait émettre des mandats d’arrêt internationaux contre le Premier ministre Benyamin Netanyahu et d’autres responsables israéliens» et précisé que «de telles actions sont illégitimes et dépourvues de fondement juridique, et si elles sont menées, elles entraîneront des sanctions sévères contre vous et votre institution».

Pour les sénateurs, «la CPI tente de punir Israël pour avoir mené des actions de légitime défense contre ses agresseurs soutenus par l’Iran. En fait, selon vos propres mots, vous avez été témoin de «scènes de violences calculées» menées par le Hamas en Israël à la suite des attentats du 7 octobre. «Ces mandats d’arrêt aligneraient la CPI sur le plus grand État soutenant le terrorisme et son mandataire».

Les auteurs de la lettre ajoutent : «Pour être clair, il n’y a aucune équivalence morale entre le terrorisme du Hamas et la réponse justifiée d’Israël.» Et de rappeler au magistrat ses déclarations publiques. «Vous avez dit vous-même : ''Israël a des avocats formés qui conseillent les commandants et un système robuste destiné à garantir le respect des droits internationaux humanitaires. En émettant des mandats d’arrêt, vous remettriez en question la légitimité des lois, du système juridique et de la forme démocratique du gouvernement d’Israël.» Bien plus.

Les sénateurs mettent en garde encore une fois : «Délivrer des mandats d'arrêt contre les dirigeants d'Israël serait non seulement injustifié, mais cela exposerait l’hypocrisie et les doubles standards de votre organisation.

Votre bureau n’a pas émis de mandat d’arrêt pour le guide suprême iranien, l’ayatollah Ali Khamenei ou tout autre responsable iranien, président syrien Bachar Al Assad ou tout autre responsable syrien, ou le leader du Hamas Ismail Haniyeh ou tout autre responsable du Hamas officiel. Vous n’avez pas non plus émis de mandat d’arrêt contre le secrétaire général génocidaire de République populaire de Chine, Xi Jinping ou tout autre responsable chinois.»

«Les USA ne toléreront pas les attaques politisées de la CPI»

Tout en rappelant que «ni Israël ni les États-Unis ne sont membres de la CPI et ne sont donc pas concernés par la juridiction supposée de votre organisation», ils passent aux menaces : «Si vous délivrez un mandat d’arrêt contre un Israélien dirigeant, nous interpréterons cela non seulement comme une menace à la souveraineté d’Israël mais aussi à la souveraineté des États-Unis.

Notre pays a démontré dans le cadre de la protection des militaires américains, à travers la loi ''American Service-Members’ Protection Act'' jusqu’où nous irons pour protéger sa souveraineté. Les États-Unis ne toléreront pas les attaques politisées de la CPI contre nos alliés.

Ciblez Israël et nous vous ciblerons. Si vous allez de l’avant avec les mesures indiquées dans le rapport, nous avancerons pour mettre fin à tout soutien américain à la CPI, sanctionner vos employés et associés et vous exclure ainsi que vos familles des États-Unis», avant de conclure avec cette phrase lourde de sens : «Vous avez été prévenu !»

Vu leur statut, les auteurs de cette lettre, parmi lesquels, Tom Cotton de l’Arkansas, Marco Rubio de Floride et Ted Cruz du Texas, Mitch McConell, du Kentucky, chef de la minorité, Tim Scott de Caroline du Sud, etc. ne peuvent pas ignorer qu’une telle correspondance constitue une interférence, des pressions et des menaces directes dans le travail de la justice, qui au vu des dispositions de l’article 70 du statut de la CPI, «est passible de poursuite et de sanctions pénales».

Il est vrai que ni les USA ni Israël ne reconnaissent la CPI, dont ils ne sont pas membres, cependant, celle-ci a admis les territoires palestiniens y compris ceux occupés par Israël, en tant qu’Etat membre, relevant de sa compétence, au mois d’avril 2015, décision entérinée en février 2021, par un vote unanime.

La lettre des douze sénateurs nous permet de mieux comprendre les mises en garde inédites du procureur en chef de la CPI,  de vendredi dernier, soit une semaine seulement après leurs menaces. Pour la première fois dans l’histoire de cette juridiction, un procureur en chef dénonce publiquement «des pressions», «des intimidations» et «des représailles» visant à «entraver» et «intimider» ses fonctionnaires.

Dans une déclaration publiée sur Twitter, Karim Khan a rappelé à ses détracteurs que ces menaces peuvent constituer «une infraction contre l’administration de la justice» en vertu du Statut de Rome.  Des mots bien choisis et à la hauteur des menaces contenues dans la lettre des douze sénateurs.

D’ailleurs, ces derniers ne se sont pas empêchés de lui rappeler la loi  ASPA (American Service-Members’ Protection Act de 2002), actée par George Bush et connue comme étant une loi sur l’invasion de La Haye, en raison du fait qu’elle était utilisée pour faire pression sur les pays qui rejoignent la CPI et qui permet aussi de recourir à la force militaire pour libérer tout Américain ou tout citoyen d’un pays allié des USA, détenu par le tribunal, basé à La Haye.

Elle prévoit aussi d’autres sanctions qui peuvent être économiques ou liées à la suspension de l’assistance militaire contre les pays qui ratifient le traité de la CPI. En bref, une loi que les sénateurs américains ont utilisée pour intimider, voire menacer le procureur en chef de la CPI, afin de l’empêcher d’émettre des mandats d’arrêt contre les dirigeants israéliens.

Lors d’une conférence de presse, animée juste après les déclarations de Karim Khan, la secrétaire de presse de la Maison-Blanche, Karine Jean-Pierre, s’est empressée d'exprimer son rejet de «toute menace ou intimidation contre des responsables publics, y compris des responsables de la CPI », précisant toutefois, l’opposition de Biden à l’enquête de la CPI.

Pour la sénatrice Katie Britt de l’Alabama, une des signataires de la lettre, a révélé sur le site américain, Zeteo, qu’il ne s’agissait «pas d’une menace, mais d’une promesse», que Karim Khan semble avoir pris au sérieux.

L’enquête ouverte sur les actes de génocide, de crimes contre l’humanité et de guerre commis à Ghaza par l’armée d’occupation israélienne, date de 2018 et en novembre 2023, elle a été renforcée par de nombreuses autres plaintes émanant de centaines d’associations, de militants des droits de l’homme, de juristes et d’avocats.

Attaque israélienne contre Rafah : La ferme condamnation de l'Algérie

L'Algérie condamne dans les termes les plus fermes les opérations militaires menées par les forces d'occupation sionistes dans la ville de Rafah, au sud de la bande de Ghaza, en préparation à une offensive terrestre dans cette zone palestinienne.

«Cette escalade extrêmement dangereuse, qui augure d'un bilan meurtrier sans précédent et d'une catastrophe humanitaire de grande ampleur, confirme que l'occupation coloniale israélienne compte poursuivre l'exécution de ses plans visant à l'extermination du peuple palestinien et au déplacement forcé de ceux qui restent», a souligné hier le ministère des Affaires étrangères et de la Communauté nationale à l'étranger dans un communiqué.

«L'occupation démontre, ainsi, a ajouté la même source, qu'elle rejette l'appel de la communauté internationale à la nécessité d'accélérer la mise en œuvre d'un cessez-le-feu immédiat et permanent dans la bande de Ghaza et de lancer un processus politique garantissant l'établissement d'un Etat palestinien indépendant et souverain comme solution juste, durable et définitive au conflit israélo-palestinien.»

«L'Algérie appelle la communauté internationale à agir en urgence, immédiatement et fermement pour faire pression sur la force coloniale et à cesser de lui fournir les moyens de poursuivre sa tyrannie et ses agressions contre les Palestiniens innocents depuis plus de sept mois.»

«L'Algérie met en garde contre la poursuite de l'agression israélienne contre les Palestiniens dans la bande de Ghaza et l'éventualité d'assister à une forte escalade avec l'offensive militaire terrestre sur la ville palestinienne de Rafah, risquant d'avoir de graves répercussions de nature à compromettre, pour des décennies encore, l'avenir de la paix et de la sécurité dans la région tout entière», a conclu le document.

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