Le président de la République, Abdelmadjid Tebboune, a affirmé maintes fois son engagement en faveur de la transformation numérique du pays, plaçant la numérisation et la digitalisation au centre du programme ambitieux du gouvernement. Cette initiative stratégique vise à moderniser l’administration publique, à stimuler l’économie et à renforcer la connectivité numérique à travers l’ensemble du territoire. En août 2023, le Haut Commissariat à la numérisation a été créé, mettant en évidence le rôle crucial que jouera ce secteur dans la régulation de l’économie algérienne. La stratégie de numérisation des différents secteurs repose désormais sur ce haut commissariat. Il est chargé de concevoir la stratégie nationale de la numérisation et d’en assurer le suivi et la mise en œuvre. Djallal Bouabdallah, expert en transformation digitale, explique les enjeux inhérents à ce secteur.
- Pouvez-vous nous donner un aperçu de l’état actuel de la transformation digitale en Algérie ?
L’Algérie se positionne actuellement à un moment crucial dans son parcours de transformation digitale. Elle s’efforce de développer ses capacités technologiques, de moderniser l’administration pour une gouvernance électronique et de réduire la fracture numérique.
La stratégie nationale pour la transformation numérique vise à rendre l’Algérie numériquement prête d’ici 2025. Cette stratégie se concentre sur le développement de l’infrastructure, notamment en améliorant la connectivité, en développant des capacités d’hébergement et de Datacenter, et en intégrant des solutions numériques innovantes dans différents domaines, tels que l’éducation, la santé, l’industrie et la finance digitale.
Cette transformation est cruciale pour l’avenir économique et social de l’Algérie, car elle permettra au pays de rester compétitif dans un monde de plus en plus numérisé, tout en améliorant la qualité de vie des citoyens.
- Quels sont, selon vous, les principaux moteurs de cette transformation dans le pays ?
Les principaux moteurs de la transformation numérique en Algérie comprennent le développement des capacités technologiques, la modernisation de l’administration publique et la réduction de la fracture numérique.
Ces moteurs sont essentiels pour assurer une transition réussie vers une économie numérique. Le développement technologique inclut l’amélioration de l’infrastructure numérique et le renforcement de l’indépendance technologique.
La modernisation administrative vise à améliorer l’efficacité des services publics grâce à l’adoption des technologies numériques. Enfin, la réduction de la fracture numérique est cruciale pour garantir que les bénéfices de la transformation digitale soient accessibles à l’ensemble de la population, permettant ainsi une inclusion numérique plus large.
- Quels sont les secteurs qui ont adopté le plus rapidement les technologies digitales en Algérie ?
En Algérie, plusieurs secteurs ont rapidement adopté les technologies digitales, avec, en tête, le domaine des télécommunications et des TIC, qui sert de pierre angulaire à cette évolution.
Le secteur bancaire et financier a suivi, en intégrant les paiements électroniques et petit à petit les services de fintech. Le commerce, notamment l’e-commerce, a vu une transformation digitale significative pour répondre aux besoins des consommateurs en ligne.
Dans le secteur de l’éducation, l’intégration de l’apprentissage en ligne a été accélérée, particulièrement en réponse aux défis posés par la pandémie de Covid-19. Le domaine de la santé a également bénéficié des technologies digitales, notamment pour la gestion des dossiers médicaux et la télémédecine.
L’administration publique n’est pas en reste avec le début de la mise en place et le développement de l’e-gouvernement. Enfin, le secteur des médias et du divertissement a largement embrassé la numérisation, en particulier dans les domaines de la télévision numérique et des plateformes de streaming.
- Quels sont les principaux défis auxquels les entreprises algériennes sont confrontées dans ce processus ?
Les entreprises algériennes font face à plusieurs défis dans le processus de transformation digitale. Ceux-ci incluent l’adaptation aux nouvelles technologies, la gestion de la sécurité des données, le développement de compétences numériques au sein de la main-d’œuvre et la mise en œuvre de modèles d’affaires innovants.
La cybersécurité est un enjeu majeur, car les entreprises doivent protéger leurs données et systèmes contre les menaces numériques. De plus, la mise à niveau des compétences et la formation continue sont nécessaires pour que les employés puissent efficacement utiliser et tirer parti des nouvelles technologies.
Enfin, les entreprises doivent également s’adapter à un cadre réglementaire en constante évolution et faire face à la concurrence dans un marché globalisé.
- Que pensez-vous des réglementations en vigueur en Algérie pour assurer la sécurité des données et des systèmes d’information ?
En Algérie, la sécurité des données et des systèmes d’information est principalement régie par la loi 18-07 sur la protection des données personnelles, promulguée en 2018 et mise en application en août 2022. Cette loi établit des règles strictes pour le traitement des données personnelles, y compris le consentement, la finalité, la minimisation et la sécurité des données, et crée une autorité de protection des données.
En complément, la législation sur la cybercriminalité offre des mesures supplémentaires pour la sécurité des systèmes d’information, avec des sanctions en cas de violation. Bien que l’adoption de normes internationales de sécurité informatique, comme l’ISO/IEC 27001, ne soit pas obligatoire, les organisations algériennes peuvent les appliquer volontairement.
Des réglementations sectorielles spécifiques existent également, notamment dans les services financiers, exigeant une protection et une surveillance accrues.
En outre, le gouvernement algérien a pu initier des programmes pour renforcer la cybersécurité dans le pays, en collaboration avec des entités nationales et internationales, soulignant l’engagement du pays à garantir la sécurité des données et des systèmes d’information.
- Il est largement reconnu dans le domaine de la technologie et de l’économie que les données sont devenues des actifs stratégiques, et l’adage : «Celui qui détient les données détient le pouvoir» est plus que jamais d’actualité. Quelle est votre analyse à ce sujet ?
Les données sont devenues des actifs stratégiques clés dans le contexte de la transformation numérique en Algérie. La capacité à collecter, analyser et utiliser les données offre des avantages significatifs en termes d’innovation et de prise de décision.
Les technologies telles que le cloud computing, l’intelligence artificielle, l’Internet des Objets (IoT), le Big Data, et la blockchain pourraient jouer un rôle essentiel dans cette transformation.
Elles permettront non seulement une collecte et un traitement efficace des données, mais aussi leur utilisation pour développer de nouveaux modèles d’affaires et améliorer les processus de gestion.
L’utilisation de ces technologies favorise une meilleure compréhension des besoins du marché, améliore l’efficacité opérationnelle et crée de nouvelles opportunités de croissance pour les entreprises.
Dans ce contexte, la maîtrise et la gestion des données deviennent un pouvoir stratégique pour les entreprises et les institutions, soulignant l’importance de la cybersécurité et de la gouvernance des données dans le paysage numérique actuel.