Au moment où le Haut-Commissariat des droits de l’homme (HCDH) onusien évoquait des «rapports inquiétants» en provenance du nord de Ghaza sur des cas de «détentions massives», de «mauvais traitement» et de «disparition forcée de milliers de Palestiniens», la presse israélienne a annoncé, hier, la mort de plusieurs prisonniers, parmi les centaines montrés par l’entité sioniste en sous-vêtements, les yeux bandés et les mains ligotées. Des ONG humanitaires ont parlé «d’exécution sommaire» et appelé à «une enquête internationale» sur le sort inconnu de milliers de prisonniers.
Il y a quelques jours, l’opinion internationale a été choquée par ces images diffusées par l’armée d’occupation israélienne, montrant des centaines d’hommes et d’adolescents en sous-vêtements, marchant en file indienne ou assis à même le sol, mains ligotées, les yeux bandés, entourés par des militaires. Ils avaient été arrêtés dans les hôpitaux, les écoles, chez eux et dans la rue, puis regroupés pour des prises de photos et de vidéos, avant d’être embarqués à bord de véhicules militaires vers une destination inconnue.
L’entité sioniste les a présentés comme «des combattants du Hamas qui se sont rendus», mais les témoins avaient reconnu bon nombre d’entre eux, dont des médecins, des enseignants, le directeur d’un hôpital, un journaliste, soit tout simplement des civils, dont le sort est toujours inconnu.
Mardi dernier, le journal de la gauche israélienne Haaretz a révélé que «plusieurs d’entre eux sont morts», sans pour autant avancer le nombre, se contentant de confirmer l’information auprès de l’administration pénitentiaire. Le journal a fait état de centaines de prisonniers palestiniens âgés de 12 à 70 ans, dont des femmes, détenus dans les centres de Teiman, près de Be’er Sheva ou à Anatot, près d’Al Qods.
«Ils dorment sur des matelas très minces attachés avec des chaînes dans des enceintes où les lumières sont allumées la nuit», ajoutant que «plusieurs d’entre eux sont morts». Selon Haaretz, «l’un des prisonniers, un ancien employé en Israël, a demandé un traitement médical avant sa mort, mais l’armée a ignoré sa demande et l’a maintenu dans des conditions épouvantables.
Ce qui a causé sa mort». Pour l’auteur de l’article, «seulement 71 des 500 détenus arrêtés ont été traduits devant les tribunaux (…), les autres ont été transférés vers d’autres prisons».
Des informations qui confirment celles reçues par le bureau du Haut-Commissariat des droits de l’homme (Hcdh) de l’Onu, qui a déclaré lundi dernier, dans un rapport, avoir été destinataire de «nombreux rapports inquiétants en provenance du nord de Ghaza faisant état de détentions massives, de mauvais traitements et de disparitions forcées de milliers d’hommes et de garçons palestiniens, ainsi que d’un certain nombre de femmes et de filles.
La plupart ont été arrêtés alors qu’ils tentaient de se déplacer vers le Sud, ou ont été emmenés lors d’opérations menées contre leurs maisons, hôpitaux, écoles et autres lieux de refuge». Parmi ces détenus, a ajouté le Hcdh, des enfants d’à peine 12 ans, et des personnes âgées de 70 ans, dont «bon nombre», «ont été soumis à de graves mauvais traitements, pouvant parfois s’apparenter à de la torture.
Il s’agit notamment d’allégations selon lesquelles beaucoup d’entre eux auraient été forcés de se déshabiller, auraient eu les yeux bandés et seraient étroitement menottés, et auraient été filmés et photographiés dans des positions délibérément humiliantes avant d’être transportés, sans vêtements et avec peu de nourriture ou d’eau, vers des lieux de détention inconnus».
Un nouveau Guantanamo et des exécutions sommaires
L’organisme onusien a précisé avoir reçu «des informations crédibles», selon lesquelles «environ 140 femmes et filles ont été arbitrairement détenues et sont actuellement détenues dans des lieux tenus secrets (…), les familles n’ont reçu aucune information sur le sort ou le lieu où se trouvent leurs proches, ni sur les raisons de leur détention, ce qui exacerbe leur sentiment d’angoisse et de peur (…).
Le droit international humanitaire exige que les civils ne soient détenus que pour des raisons impératives de sécurité. La torture et autres mauvais traitements, y compris les atteintes à la dignité de la personne, sont strictement interdits par le droit international, quel que soit le statut du détenu».
Pour le Hcdh, ce qui est «préoccupant» est «d’avoir reçu un nombre croissant d’informations selon lesquelles des civils auraient été tués, notamment lors d’exécutions apparemment extrajudiciaires, dans des lieux de refuge, en particulier dans des écoles.
De tels incidents peuvent constituer des crimes de guerre qui doivent faire l’objet d’une enquête immédiate et approfondie». Dans ce rapport, l’organisme onusien est revenu sur le cas de l’hôpital Kamel Adwa à Beit Lahya, qui abritait quelque 3000 réfugiés : «Quelque 1000 à 1200 Palestiniens ont été arrêtés pour la plupart des hommes et des garçons, âgés de 16 à 65 ans, y compris du personnel médical, des patients et des personnes déplacées.
Ils auraient été transférés vers une destination inconnue. Plus de 70 membres du personnel médical, dont le Dr Ahmed Al Kahlout, directeur général de l’hôpital, sont toujours détenus.»
L’autre cas cité est celui d’une école mixte (Unrwa et d’enseignement) qui abritait 3000 à 4000 réfugiés et où «des dizaines de Palestiniens, dont des personnes âgées, des garçons et un journaliste palestinien bien connu, ont été arrêtés par les forces israéliennes, qui leur ont ensuite bandé les yeux, les ont déshabillés jusqu’à ce qu’ils soient en sous-vêtements avant de les forcer à s’asseoir dehors dans la rue malgré le temps froid (…). Ils ont été forcés de monter dans des camions, toujours déshabillés, et transportés vers des destinations inconnues».
De son côté, l’Observatoire Euro-Med des droits de l’homme a appelé, dans un communiqué diffusé mardi, à «une enquête impartiale et urgente sur la torture et le meurtre par l’armée israélienne de civils palestiniens détenus dans différentes zones de Ghaza».
Basée à Genève, l’organisation de défense des droits de l’homme a déclaré que les témoignages recueillis par les équipes d’Euro-Med Monitor «confirment» les informations publiées par le journal Haaretz sur «les exécutions de détenus de Ghaza», ajoutant : «D’autres détenus sont morts après avoir été soumis à des tortures et à des mauvais traitements extrêmes dans le camp militaire israélien de Sde Teman, situé entre Be’er Sheva et Ghaza, transformé en une nouvelle prison semblable à Guantanamo, où les détenus sont enfermés dans des conditions inhumaines.»
Euro-Med Monitor a cité «l’utilisation par l’armée israélienne de poulaillers en plein air pour héberger les détenus et la rétention de nourriture ou de boisson pendant de longues périodes.
Le camp de Sde Teman détient des Palestiniens de tous âges, des jeunes enfants aux personnes âgées. Dans les enceintes clôturées, les détenus ont les yeux bandés et sont soumis à de rudes interrogatoires, les mains liées. Selon des témoignages, des lumières sont allumées et éclairaient intensément sur eux la nuit, dans le but de les épuiser et de les torturer».
«Des soldats israéliens tirent sur cinq détenus»
L’organisation a collecté de nombreux témoignages de détenus récemment libérés, qui affirment avoir «enduré diverses formes de torture et de mauvais traitements, n’étaient pas autorisés à utiliser le téléphone et n’avaient pas le droit de rencontrer des avocats ni de recevoir la visite des autorités et que plusieurs prisonniers âgés ont subi des passages à tabac cruels et des traitements humiliants, que les détenus avaient les yeux bandés et étaient liés, les mains et les pieds menottés et s’ils essayaient de demander quoi que ce soit, ils étaient confrontés à des abus et à des menaces». L’organisation a cité le témoignage d’un détenu libéré qui affirmait «avoir vu des soldats israéliens tirer directement sur cinq détenus et les tuer lors d’incidents distincts».
Pour étayer ses affirmations, l’ONG a rapporté la mort suspecte de plusieurs travailleurs palestiniens, avant de déclarer que «le sort de centaines d’autres reste inconnu». Les équipes d’Euro-Med Monitor ont déjà documenté la détention «de plus de 1200 civils palestiniens lors de campagnes d’arrestations aléatoires israéliennes dans différentes zones de Ghaza pendant le génocide israélien actuel.
Ces arrestations ont eu lieu après la prise d’assaut de résidences et d’écoles abritant des milliers de personnes déplacées. Après leur libération, l’armée israélienne a délibérément laissé les prisonniers palestiniens les yeux bandés, presque nus et agenouillés au sol, après les avoir soumis à toutes les formes de passages à tabac et de mauvais traitements».
Selon l’ONG, «certains détenus ont été forcés à porter des armes afin qu’ils puissent être filmés pour soutenir les campagnes israéliennes d’arrestations, de torture, de passages à tabac sévères et d’autres abus».
Dans le même temps, a ajouté l’ONG, l’armée israélienne «a délibérément publié des images et des photos choquantes montrant des détenus palestiniens les yeux bandés et presque nus, agenouillés au sol, gardés par des soldats israéliens, ou transportés dans des bus militaires vers des destinations inconnues».
Pour Euro-Med Human Rights Monitor, «ces campagnes d’arrestations aléatoires ont visé des médecins, des infirmières, des journalistes et des personnes âgées, dont des dizaines de femmes, comme Hadeel Youssef Issa Al Dahdouh.
Dans une scène inhumaine, Al Dahdouh apparaît sur une photo aux côtés d’un groupe d’hommes nus dans un camion militaire israélien».
Face à toutes ces violations du droit international, l’ONG a exhorté le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) et le Groupe de travail des Nations unies sur la détention arbitraire à faire pression sur les autorités israéliennes pour qu’elles révèlent le sort de tous les détenus de Ghaza, libèrent tous les civils arrêtés et enquêtent sur les horribles violations commises, auxquelles ces civils détenus sont soumis.