Programmée dans le cadre du festival international de danse contemporaine d’Alger, la compagnie française Jazz art dirigé par Raza Hammadi a pris le temps de se produire à Oran, au TRO, dimanche sur invitation de l’institut français.
Nous les avons convaincus de prolonger leur séjour pour donner un spectacle à Oran et ils ont accepté», a indiqué le directeur de l’IFO dans son allocution de présentation. Le spectacle en lui-même se compose de trois parties, indépendantes l’une de l’autre.
La première intitulée «la 5 vague» est en lien directe avec la pandémie du Covid qui a sévi dans le monde entier avec son lot de drames mais aussi ses élans de solidarité.
Le thème n’est pas forcément inspirant mais c’était sans compter sur les ressources de la création artistique pour transcender « le malheur ».
Les danseurs évoluent sur une scène dépourvue de tout accessoire mais c’est la répétition presque à l’infini de la même phrase musicale qui confère à certains passages de cette première prestation la lourdeur de l’atmosphère telle qu’elle a été ressentie durant les confinements.
Au milieu de cette ambiance ou le temps semble figé, le langage corporel prend tout son sens. Les corps s’entremêlent, parfois renoncent, parfois résistent.
La mise en scène donne à voir des contrastes saisissants entre les élans de vie et les postures de désespoir. L’originalité réside sans doute dans le fait de concevoir un spectacle dans les conditions d’une réalité dont on est sensé s’inspirer.
La deuxième partie est plutôt classique avec une chorégraphie évoquant un pan de la vie des Brontë. A la levée du rideau on entend des grondements de tonnerre pour imaginer une nature déchainée et c’est sans doute un clin d’œil au titre «les Hauts de hurle vent» du célèbre roman de l’une des trois sœurs : Emily ou alors simplement à la localité isolée d’Angleterre où vécut cette famille artistique et littéraire du 19ème siècle.
Grâce et pudeur caractérisent cette partie du spectacle rehaussé par des costumes inspirés de l’époque mais surtout par une musique choisie et adaptée au contexte : violons, violoncelle et piano.
La chorégraphie nous plonge dans la période romantique du XIXe siècle et la vie de trois sœurs avec un père lettré et un frère considéré comme un génie mais en proie à ses démons et à sa déchéance. Une forme de théâtralité caractérise cette performance et où le livre, y compris dans sa version sainte, est érigé comme symbole de transmission.
Là aussi, le spectateur peut déceler des contrastes entre une certaine légèreté, celle de la valse et des passages plus graves et plus élaborés. Mais l’ensemble est entrainant. La troisième partie est d’inspiration espagnole. L’intitulé «Entre dos Aguas» évoque une composition du célèbre guitariste espagnol Paco De Lucia. Ici les danseurs et danseuses se donnent à cœur joie.
En solo en couple ou collectivement, l’ambiance est plutôt festive. Les couleurs des costumes, hormis le noir, sont maintenant vives et chatoyantes mais ce n’est pas à proprement parler du flamenco dont il s’agit et c’est tout l’intérêt malgré l’emprunt de quelques codes propres à cette danse typique.
«L’époque est au mix», a indiqué Raza Hammadi dans un entretien accordé antérieurement à un média français parlant de la spécificité de la danse jazz. Là, la musique est bien mise en évidence notamment vers la fin du spectacle clos en apothéose, ce qui a valu aux danseurs une forte ovation de la part d’un public qui a fini par être effectivement séduit.