Une moyenne de 70 à 100 cas de Covid est enregistrée quotidiennement parmi le personnel médical au CHU Mustapha Bacha. A l’hôpital de Rouiba, un tiers du personnel est infecté, alors que l’EPH de Boufarik risque de fermer.
L’augmentation exponentielle du nombre de cas de Covid-19 du fait du nouveau variant Omicron, avec une proportion de 50% de cas positifs confirmés par PCR, est enregistrée dans l’ensemble des secteurs. L’école, qui semble être le grand cluster où le virus circule activement et amplifié par les écoliers, a fait que les contaminations se multiplient en milieu familial et touche tout secteur d’activité, dont le personnel hospitalier qui est toujours réticent à la vaccination et dont le taux de couverture ne dépasse pas les 40%.
Un sérieux problème auquel font face les hôpitaux en pleine quatrième vague. En plus de la gestion des lits d’hospitalisation et de réanimation, les dysfonctionnements quant à la disponibilité de médicaments, les nombreuses contaminations des personnels médical et paramédical constituent un vrai casse-tête pour les services à flux tendu.
«Treize personnes, six médecins et sept infirmiers, sont actuellement testés positifs. Je ne sais pas comment organiser le travail avec autant de cas infectés. L’équipe est décimée», s’alarme le Dr Mohamed Yousfi, chef de service des maladies infectieuses à l’EPH de Boufarik, et qui précise que ces derniers présentent des formes simples à modérées de la maladie, mais ils sont «obligés d’être isolés chez eux».
Il a indiqué que «face à cet état de fait, nous sommes contraints de fermer le service qui est sur la braise depuis deux ans», ajoutant : «Il nous est impossible de les remplacer. Chaque matin, il y a un médecin ou un infirmier qui est testé positif. Il y a une explosion des cas de Covid au sein de la corporation au niveau de tous les établissements.»
Pour le Dr Yousfi, contrairement à la troisième vague où les hôpitaux ont connu un afflux de malades avec des formes graves, nécessitant des soins intensifs et de l’oxygénothérapie, «nous assis-tons aujourd’hui à une explosion de cas allant de simple à modéré au niveau de urgences, alors que les effectifs sont très réduits, en plus des patients hospitalisés dont la majorité est due au variant Delta».
Le spécialiste redoute une surcharge de travail pour les équipes restantes dans les prochains jours au vu de la hausse des contaminations. «Nous avons déjà 80% des lits occupés et qui nécessitent un personnel H24. Nous nous organisons dans la difficulté», souligne-t-il avant de signaler que «l’impact d’Omicron est visible partout, dans les entreprises, les écoles et les administrations qui travaillent avec un service minimum en raison des contaminations induites par le relâchement total. La Covid a un impact aux niveaux social et économique».
Les conséquences sont, pour lui, plus «graves pour le système de santé, notamment dans l’organisation des soins qui seront sérieusement perturbés, faute de personnel suffisant». Le retour au respect des mesures barrières et la vaccination, insiste le Dr Yousfi, restent les moyens importants pour se protéger de cette maladie.
Pour ce qui est de l’école où de nombreux cas ont été détectés, le Dr Yousfi estime que le protocole sanitaire établi par le comité scientifique de suivi et de l’évolution de la Covid-19 est toujours en vigueur. «Les chefs des établissements n’ont qu’à appliquer ce protocole sanitaire pour protéger les enfants, les enseignants et les administrateurs», a-t-il ajouté.
Inquiétude des soignants
L’inquiétude est partagée par l’ensemble des soignants qui enregistrent quotidiennement des cas positifs au sein de leurs équipes. Le Pr Kamel Djenouhat, chef de service du Laboratoire central et président du conseil médical à l’hôpital de Rouiba, affirme qu’«un tiers du personnel médical et paramédical de l’établissement est actuellement infecté».
Il signale qu’il y a une augmentation exponentielle du nombre de cas. «Nous avons une quarantaine de cas confirmés par jour entre les hospitaliers et les personnes externes», a-t-il souligné, signalant que «l’absentéisme des personnels a un grand impact sur le fonctionnement du système de santé. Heureusement que le nombre de cas graves ne suit pas, pour le moment, celui des cas confirmés qui sont des milliers».
Le Pr Djenouhat rappelle que «la hausse des contaminations s’explique d’une part par la contaminataion massive des enfants. Des études occidentales ont montré que les enfants sont des contaminants potentiels et c’est pour cela que nous enregistrons cette hausse exponentielle». Cela «peut sérieusement perturber l’organisation du travail dans les services hospitaliers», souligne-t-il, tout en insistant sur la relance de la vaccination et le respect des mesures barrières.
Le CHU Mustapha Bacha qui a dédié neuf services à la Covid-19, dont trois services de réanimation, enregistre quotidiennement entre 70 à 100 cas positifs dans les corps médical, paramédical et autres, a déclaré le Pr Kamel Hail, chef de service Covid au sein de l’établissement. Il signale que «le variant Omicron a pris le dessus sur le Delta au vu des symptômes, et les contaminations des personnels sont familiales. La majorité a été contaminée par les enfants et je pense que les écoliers sont à 90% infectés», a-t-il souligné.
Le Pr Hail a noté que ces personnels présentent des formes simples à modérée de la maladie : «Ce qui prouve que c’est le fait d’Omicron et les malades se rétablissent rapidement.» Quant à l’impact de cet absentéisme sur l’organisation du travail au seins des neuf services, le Pr Hail relève que «pour le moment les cas d’hospitalisation n’ont pas progressé et actuellement nous sommes à 70% d’occupation des lits avec les trois services de réanimation saturée». Et de rappeler que «nous ne sommes pas encore au sommet de la vague».
Au CHU de Beni Messous qui draine un nombre important de cas de Covid, notamment pour l’hospitalisation et la réanimation, le personnel est tout aussi touché au niveau de tous les services. «De nombreux collègues sont en congé de maladie pour Covid», a affirmé le Pr Reda Malek Hamidi, chef de service de la réanimation, qui appelle au renforcement des mesures barrières, notamment le port du masque, la distanciation et le lavage des mains.