Conflit russo-occidental sur l’Ukraine : Washington bientôt «à court d’argent» pour aider Kiev

05/12/2023 mis à jour: 00:13
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Le président Joe Biden recevant son homologue ukrainien à la Maison-Blanche

Nous sommes à court d’argent et bientôt à court de temps», selon la Maison-Blanche, l’aide militaire américaine à l’Ukraine pourrait être coupée net dans les prochaines semaines, faute d’accord budgétaire avec l’opposition républicaine, rapporte l’AFP. «Je veux être claire : si le Congrès n’agit pas, d’ici la fin de l’année nous serons à court de ressources pour livrer plus d’armes et d’équipements à l’Ukraine et pour fournir du matériel venant des stocks militaires américains», écrit la directrice du Budget de la Maison-Blanche, Shalanda Young, dans un courrier adressé à Mike Johnson, patron de la Chambre des représentants, à majorité républicaine. 

Lequel lui a renvoyé la balle sur le réseau social X (anciennement Twitter) : «L’administration Biden est incapable de répondre aux inquiétudes légitimes (des conservateurs) de mon groupe parlementaire sur l’absence de stratégie claire pour l’Ukraine, sur une issue au conflit, ou sur la manière de superviser l’emploi de l’argent des contribuables américains.»

La lettre de Shalanda Young est publiée au moment où l’Ukraine a reconnu l’échec de sa contre-offensive estivale, et alors que la Russie lance des assauts répétés, en particulier contre la ville d’Avdiïvka, dans l’est du pays. «Il n’y a pas de financement magique disponible pour faire face à l’urgence. Nous sommes à court d’argent et bientôt à court de temps», indique Shalanda Young dans son courrier.
 

Flou budgétaire

Le président démocrate Joe Biden a demandé, le 20 octobre, au Congrès de voter une enveloppe exceptionnelle de plus de 100 milliards de dollars pour répondre aux urgences du moment, à savoir aider Israël et l’Ukraine, tenir tête à la Chine et répondre aux arrivées de migrants à la frontière sud. 

Sur ce montant, plus de 60 milliards de dollars doivent aller à l’Ukraine, dont les Etats-Unis sont de loin le premier soutien depuis l’offensive russe en fin du mois de février 2022. «Couper l’arrivée d’armes et d’équipements américains briserait l’effort de guerre de l’Ukraine, cela mettrait en danger les avancées obtenues par l’Ukraine et cela augmenterait la probabilité de victoires russes», ajoute encore Shalanda Young. «Nos livraisons d’aide militaire ont déjà diminué», constate-t-elle. «Ce n’est pas un problème pour l’année prochaine. C’est maintenant qu’il faut aider l’Ukraine démocratique à se battre contre l’agression russe», observe la directrice du Budget.

La Maison-Blanche tient à assurer le financement de l’aide à l’Ukraine au moins jusqu’à la présidentielle de novembre 2024, qui pourrait bien confronter de nouveau Joe Biden à l’ancien président Donald Trump. Le président russe, «Vladimir Poutine, ne s’engagera pas vers la paix avant de voir le résultat de notre élection», confiait récemment un haut responsable de la diplomatie américaine.

Les Etats-Unis se trouvent depuis des mois dans le plus grand flou budgétaire, en raison de turbulences parlementaires à n’en plus finir. Le Congrès de la première puissance mondiale, composé du Sénat à majorité démocrate et de la Chambre des représentants à majorité républicaine, n’a toujours pas voté de budget pour l’année fiscale entamée le 1er octobre dernier. L’Etat fédéral fonctionne pour l’instant grâce à une rallonge d’urgence qui expirera à la mi-janvier. Lorsque Joe Biden a demandé, très solennellement, son énorme enveloppe budgétaire, la Chambre des représentants se trouvait en plein chaos pour cause de dissensions au sein du parti républicain. Elle s’est, depuis, dotée d’un chef, ou «speaker», Mike Johnson, ce qui a permis la reprise des débats budgétaires. 

Lesquels s’annoncent donc ardus. Le patron des députés conservateurs demande, en échange du soutien à une nouvelle enveloppe pour l’Ukraine, un net durcissement de la politique migratoire face aux arrivées de migrants à la frontière avec le Mexique. «Les élus républicains à la Chambre veulent que tout financement supplémentaire de notre sécurité nationale commence par notre propre frontière», a indiqué hier Mike Johnson.
 

Par rapport, le Premier ministre polonais a réclamé lundi le rétablissement du système européen de permis pour les compagnies de transport ukrainiennes qui envoient des camions en Pologne, au lendemain d’un premier accord avec Kiev intervenu après un mois de blocage de la frontière par des routiers polonais. «Nous exigerons très fermement et sans équivoque le rétablissement du système de permis de transport pour les camions ukrainiens et les chauffeurs ukrainiens qui traversent la Pologne et s’y rendent», a déclaré Mateusz Morawiecki à la presse. «Ce système a fonctionné jusqu’au printemps 2022 et a bien fonctionné, puis il a été modifié par la Commission européenne et, aujourd’hui, les transporteurs bloquent la frontière», a-t-il ajouté.
 

La réintroduction de ce système est la principale revendication des routiers polonais qui bloquent depuis début novembre les principaux points de passage entre leur pays et le territoire ukrainien, dénonçant «la concurrence déloyale» des compagnies de transport ukrainiennes. Le blocage a créé des files d’attente interminables à la frontière et constitue un problème économique majeur pour l’Ukraine, qui compte beaucoup sur la route pour ses exportations et ses importations.

 Les protestataires affirment que leurs revenus ont chuté, pointant du doigt notamment l’abandon de ce système de permis qui régissait l’accès des compagnies de transport ukrainiennes à l’Union européenne. L’UE a renoncé à ce système pour soutenir Kiev après le début de l’intervention russe. Signé d’abord pour un an en juin 2022, un accord visant à libéraliser le transport de marchandises entre l’Ukraine et l’UE a ensuite été prolongé jusqu’en juin 2024. 

Hier, à la suite d’un accord intervenu la veille entre les deux pays, de premiers camions, sans chargement, ont traversé dans la matinée la frontière ukraino-polonaise, selon les garde-frontières ukrainiens. Le libre passage des camions vides rentrant d’Ukraine était une des autres conditions posées par les routiers polonais. Les protestataires accusaient ce pays de bloquer ces camions pendant plusieurs jours sur son sol.  

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