La première réunion ministérielle de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) depuis plus de quatre ans s’est ouverte hier sur fond de risque de crise alimentaire.
D’ailleurs, l’une des attentes fortes des retrouvailles de l’organe de décision suprême de l’Organisation est de trouver une parade à ce risque, que fait planer sur le monde entier le conflit en Ukraine.
Un projet de déclaration ministérielle reflète ces inquiétudes, les 164 pays membres «promettent de prendre des mesures concrètes pour faciliter le commerce et améliorer le fonctionnement et la résilience durable des marchés pour l’alimentation et l’agriculture, y compris les céréales et les engrais, ainsi que d’autres produits agricoles».
Le texte promet en effet de porter une attention particulière aux pays les plus démunis et les plus dépendants des importations en céréales notamment. Il s’agit aussi de se pencher lors de cette réunion sur les accords de pêche et les brevets des vaccins anti-Covid.
Dans ce sillage, l’OMC a annoncé le 11 juin que le projet de texte permettant de supprimer les subventions préjudiciables dans le domaine de la pêche – qui occupe l’organisation depuis 20 ans – est désormais aux mains des ministres. Ces derniers essayeront donc de trouver un terrain d’entente sur les points de contentieux qui subsistent.
«Tous les problèmes n’ont pas été résolus et il y a dans ce projet des choses sur lesquelles les membres ne sont pas d’accord ou sur lesquelles je n’ai pas vu de terrain d’entente précis», a prévenu Santiago Wills, l’ambassadeur colombien qui a piloté les négociations, tout en mettant en avant les progrès faits ces derniers mois.
L’OMC fonctionnant par consensus, il faut que les 164 pays membres s’entendent pour conclure l’accord sur la pêche. Lequel s’inscrit dans les Objectifs du millénaire de l’ONU et qui doit supprimer les subventions susceptibles d’encourager la surpêche ou les prélèvements illégaux.
L’ambassadeur a noté des progrès, notamment sur l’épineux sujet de «territorialité», le texte écartant l’idée que les querelles d’appartenance territoriale – nombreuses et ultra-sensibles – pourraient être réglées par un panel de l’OMC.
Le succès de la conférence se mesurera grandement à l’aune de l’adoption ou non de ce texte. Et ce, d’autant que l’OMC a perdu en pertinence faute de pouvoir conclure des accords majeurs, le dernier grand accord remontant à 2013.
Les ministres sont par ailleurs attendus sur la réponse de l’OMC à la pandémie. Ils vont discuter de deux textes.
L’un doit faciliter la circulation des ingrédients nécessaires à la lutte contre l’actuelle et les futures pandémies, l’autre doit permettre une levée temporaire sur les brevets des vaccins anti-Covid.
Ce dernier sujet divise, l’industrie pharmaceutique y voyant un affaiblissement de la propriété intellectuelle. Pour les ONG, le texte ne va pas assez loin pour être réellement efficace. Là aussi l’issue reste incertaine.
Face à toutes ces attentes, la directrice générale de l’Organisation mondiale du commerce, Ngozi Okonjo-Iweala, aux commandes depuis plus d’une année, s’est dite «prudemment optimiste» quant au fait que la Conférence ministérielle de l’Organisation arrive à s’accorder sur au moins un ou deux sujets pendant trois jours de réunion à Genève.
«Le chemin ne sera pas aisé, il sera chaotique et il y aura peut-être quelques mines le long de la route, il nous faudra les éviter et voir comment se mettre d’accord sur un ou deux dossiers», a déclaré Mme Ngozi, reprise par les agences à l’issue d’un point de presse quelques heures seulement avant le début de la réunion ministérielle.