La scène donne peine à voir. Devant le siège de la Direction de l’action sociale (DAS) de Boumerdès, ils sont des centaines de handicapés, souvent accompagnés de leurs parents ou proches à s’agglutiner devant l’entrée. Tous les lundis et mercredis, le même spectacle se reproduit depuis l’été.
Renseignement pris, il est question d’obtenir une attestation ou un avis médical leur permettant de renouveler leur carte Chifa. Une quadragénaire a un mari invalide à 100%. Son fils, qui chôme après l’arrêt de sa scolarité, nécessite une aide.
Une autre jeune femme qui garde les séquelles d’une hémiplégie se plaint de la cessation de sa prise en charge et du versement de sa pension. Elle s’est adressée à plusieurs bureaux sociaux, à commencer par celui de l’APC de Chabet El Ameur pour finir au niveau de la DAS où un médecin est affairé à délivrer un document d’invalidité.
Un père de famille au chômage a ramené sa femme et ses deux enfants dont un aveugle non scolarisé malgré son âge (une dizaine d’années). La pension de 10 000 DA est le seul recours pendant quelques jours. Toutes ces modestes personnes s’accrochent à un document qui puisse leur ouvrir les portes d’une prise en charge au moins des frais médicaux.
Car il est évident que cette couverture dite sociale ne remplit aucune pitance. La réalité, elle, est loin d’être réellement prise en considération. «Comment peut-on vivre aujourd’hui avec une insignifiante pension arrachée à la bureaucratie quand on est handicapé alors que des familles plus nanties s’alarment des fin de mois difficiles ?», s’offusque une vieille dame drapée d’un vêtement usé. Ils sont ainsi environ 700 cas qui hantent le hall de la DAS à chaque jour de réception.
Deux jours par semaine seulement. Pourquoi d’ailleurs ? N’aurait-on pas pu en recevoir tous les jours pour réduire leur si grand nombre en ces temps de pandémie ? Un monsieur se traînant sur une béquille ne comprend pas : «Comment ose-t-on demander à un invalide à vie de justifier son handicap chaque année ?»
Il est vrai qu’une simple fiche familiale remise au service social de sa mairie pour prouver qu’il est encore en vie devrait suffire. En réalité, les contraintes de déplacement des handicapés auraient pu être évitées si les mairies faisaient correctement leur travail.
En amont, ces dernières sont pourtant tenues de procéder à une télé-déclaration ou à recourir à un CD qui est ensuite retourné à la Cnas de Boumerdès pour la mise à jour de son fichier.
C’est en tous cas ce que le sous-directeur de cette caisse nous a expliqué. De même pour la DAS, elle aurait dû remettre numériquement les nouvelles données concernant les 7000 handicapés, selon une estimation qui figurent sur son fichier.
Mais au 31 janvier, date butoir, rien n’avait été fait. Un listing temporaire a été envoyé pour une validité d’un mois seulement. Autrement dit, le handicapé devra attendre le mois suivant pour prétendre à une pension annuelle.
Un double travail et plus d’attente. La direction de l’action sociale paraît esseulée devant le nombre d’handicapés qu’elle reçoit et devant «les blocages» de certains secteurs.
En fait, les différentes directions concernées se rejettent la balle malgré la dernière mesure des pouvoirs publics portant obligation de travailler avec l’outil numérique et éviter, ainsi, le déplacement des handicapés.
Une mesure dont l’application fait l’objet de beaucoup de retards. A la grande souffrance des handicapés.