Béjaïa : La solitude de l’enfant autiste

09/12/2024 mis à jour: 04:45
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La direction de l’éducation a bénéficié de l’ouverture de 14 postes budgétaires seulement pour le recrutement des AVS - Photo : D. R.

Les parents des enfants autistes se demandent : «Qu’en est-il du dossier de création d’un centre national de référence de l’autisme et d’une école nationale pour la formation d’enseignants spécialisés, annoncé par l’APN en avril 2023, un projet mis en place sur instruction du président de la République ? »

A l’image de nombreuses wilayas du pays, Béjaïa ne dispose pas d’un établissement spécialisé dans la prise en charge exemplaire des enfants autistes. Les pouvoirs publics se sont impliqués concrètement dans ce dossier  depuis 2021, à l’occasion d’une réunion du gouvernement Djerad, à l’époque, visant à tracer une stratégie de prise en charge.

Deux ans plus tard, les associations et les parents s’interrogent : qu’en est-il du dossier de création d’un centre national de référence de l’autisme et d’une école nationale pour la formation d’enseignants spécialisés, annoncé par l’APN en avril 2023, un projet figurant parmi les mesures importantes prises par le groupe de travail interministériel mis en place sur instruction du président de la République en vue d’élaborer une stratégie nationale pour la prise en charge de l’autisme ?

Aujourd’hui, ces gamins sont envoyés dans les établissements scolaires publics qui sont loin d’être préparés pour accueillir cette catégorie des personnes à besoins spécifiques. Il ne suffit pas d’avoir une salle en plus pour ouvrir une classe spéciale où des chaises afin de placer un autiste avec ses camarades et d’espérer qu’il s’intègre dans son milieu scolaire et dans la société. 

Mais la question de la scolarisation des enfants autistes demeure un tracas, déroutant les parents à chaque rentrée scolaire, à cause, notamment, de la rareté des auxiliaires de vie scolaire (AVS) et la réticence de certains chefs d’établissements  d’accueillir des AVS et des personnes à besoin spécifiques, évitant de «s’encombrer» avec une classe spéciale, dénonce-t-on.

Cette tâche incombe par la force des choses aux associations et parents d’enfants autistes, qui ne ménagent aucun effort pour mettre leurs enfants dans les meilleures conditions de scolarisation, se retrouvant obligés de payer des accompagnateurs. L’année dernière, un recrutement sur titre, exigeant le niveau de la terminale aux candidats a été organisé partout dans le pays, où la wilaya de Béjaïa a bénéficié de 14 postes permanents seulement.

Couvrir le déficit

Afin de couvrir le déficit, plusieurs réunions ont eu lieu entre la direction de l’action sociale et de la solidarité (DASS) et la direction de l’éducation afin de trouver des palliatifs au niveau local, afin de soulager les familles ne pouvant pas se permettre de payer un AVS.

Selon la directrice de la DASS, qui s’exprimait dans les médias, «nous sommes parvenus, avec l’accord de la DE, à autoriser les parents à accompagner leurs enfants, bien que cela été difficile à obtenir», parce que cela nécessite un minimum de compétence, une certaine distance affective entre l’enfant et son accompagnateur.

La maman, selon la même source, «ne peut pas se comporter outre qu’une mère, risquant ainsi de perturber les autres élèves». L’importance d’introduire une formation spécialisée dans la nomenclature des formations prodiguées à l’université et dans les centres de la formation professionnelle permettra aussi au accompagnateur d’être acceptés par les chefs des établissements qui se plaignent, de l’avis même de quelques enseignants, de certains écarts de ce personnel «qui ne se gêne pas parfois de souffler, souvent, les réponses à l’enfant  en période d’examen, ce qui n’est pas du tout dans l’intérêt de l’élève».

Or, la tâche qu’on a assignée à ces parents et autres AVS de circonstance qui, faut-il le rappeler, comble péniblement un vide laissé par l’administration public, est de «comprendre, gérer les attitudes d’un enfant autiste, et de servir d’intermédiaire entre le personnel de l’établissement et le monde de l’enfant autiste», d’après un membre associatif.

Dans la wilaya de Béjaïa, on compte chaque année des dizaines enfants autistes scolarisés à travers les trois paliers de l’éducation (225 en 2023, ndlr).  Entre 2018 et 2019, les bénéficiaires des dispositifs d’aide à l’insertion professionnelle (DAIP) et à l’insertion sociale (DAIS), orientés vers le secteur de l’éducation, ont préféré intégrer légitimement d’autres postes dans le même secteur, désertant la fonction d’AVS qui est, il faut le dire, sous pays à l’époque, soit une mensualité de 6000 DA par mois.

Ces AVS, recrutés dans le cadre du filet social, bénéficiaient d’une formation dans le domaine, prodiguée par les associations avant leur placement par la direction de l’éducation, en collaboration avec la direction de l’action sociale et de solidarité (DASS) dans les établissements scolaires.

Face à ce problème, les associations ont revendiqué l’ouverture davantage de postes budgétaires permanents pour le recrutement des auxiliaires de vie scolaire et l’inclusion d’une formation spécialisée dans la nomenclature des formations prodiguées à l’université et dans les centres de la formation professionnelle, car les efforts de ces organisations, bien que salutaires, restent limités eu égard aux ressources financières, humaines et le niveau de spécialisation qu’exige la prise en charge scolaire de tout enfant aux besoins spécifiques. 
 

 

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