La Chine a fustigé hier un accord autorisant l’accès des Etats-Unis à quatre nouvelles bases militaires aux Philippines, contre seulement cinq auparavant, un texte de nature à «mettre en péril la paix et la stabilité régionales».
«Pour leur propre intérêt, les Etats-Unis (...) renforcent continuellement leur déploiement militaire dans la région», a déploré lors d’une conférence de presse régulière Mao Ning, une porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères. «Cela ne manquera pas d’aggraver la tension militaire et de mettre en péril la paix et la stabilité régionales», a-t-elle estimé.
Les Philippines ont annoncé lundi l’emplacement des quatre nouvelles bases militaires mises à la disposition des Etats-Unis. Parmi elles, deux attirent l’attention. Une est proche de la très disputée mer de Chine méridionale (qui fait l’objet de multiples revendications des pays riverains), et une autre, non loin de Taïwan (île de 23 millions d’habitants revendiquée par Pékin).
Le choix de ces localisations est interprété par nombre d’experts militaires comme une manière pour les Etats-Unis de contenir les prétentions chinoises dans ces deux zones où pourraient survenir de potentiels conflits militaires.
«Les pays de la région devraient réfléchir de façon minutieuse à ce qui est vraiment approprié», a déclaré mardi la porte-parole Mao Ning. «Cela afin de faire des choix qui soient bénéfiques pour leurs intérêts, ainsi que pour la paix et pour la stabilité régionales.»
Base navale
Washington et Manille sont alliés depuis plusieurs décennies en matière de sécurité, notamment par le biais d’un traité de défense et un pacte de 2014, connu sous l’acronyme d’EDCA (Enhanced Defense Cooperation Agreement, Accord de coopération renforcée en matière de défense). Il autorise les soldats américains à accéder à cinq bases philippines et à y stocker du matériel militaire.
Ce nombre a été porté à neuf en février mais les lieux où se trouvent les quatre bases supplémentaires n’avaient pas encore été révélés.
Trois de ces nouveaux sites se trouvent dans le nord des Philippines : une base navale et un aéroport dans la province de Cagayan, et un camp militaire dans la province voisine d’Isabela. La base navale de Santa Ana dans la province de Cagayan est située à environ 400 km de Taïwan.
Le quatrième site se trouve sur l’archipel de Balabac, au large de la pointe Sud de l’île de Palawan (Ouest), proche de la mer de Chine méridionale.
Le gouverneur de Cagayan, Manuel Mamba, s’était publiquement opposé à la présence de tels sites dans sa province, par peur de mettre en péril les investissements chinois. Autre inquiétude : que la province devienne une cible dans un conflit autour de Taïwan.
«Liberté de navigation»
Washington cherche à resserrer ses liens avec Manille distendus ces dernières années. Le précédent président philippin, Rodrigo Duterte, avait préféré se tourner vers la Chine au détriment des Etats-Unis, ex-puissance coloniale. Mais le nouveau gouvernement philippin de Ferdinand Marcos Jr souhaite renforcer son partenariat avec Washington, poussé notamment par la construction de bases chinoises en mer de Chine méridionale.
La Chine affirme avoir été la première nation à découvrir et nommer les îles de cette vaste zone maritime, par laquelle transite aujourd’hui une grande partie du commerce entre l’Asie et le reste du monde.
Elle revendique ainsi une grande partie des îlots et récifs qui s’y trouvent. Mais d’autres pays riverains (Philippines, Vietnam, Malaisie, Brunei) ont des prétentions concurrentes et chacun contrôle plusieurs îles.
Les Etats-Unis mènent régulièrement en mer de Chine méridionale des opérations baptisées «liberté de navigation», en envoyant des navires de guerre afin de contester les prétentions chinoises.
Par ailleurs, la Chine estime que Taïwan est l’une de ses provinces, qu’elle n’a pas encore réussi à réunifier avec le reste de son territoire depuis la fin de la guerre civile chinoise en 1949. Pékin dit privilégier une «réunification pacifique» mais n’a jamais renoncé à la possibilité d’utiliser la force militaire pour prendre le contrôle de l’île.