En réduisant les coûts, on maîtrise l’inflation», avait déclaré en juin dernier le ministre des Finances, Laaziz Faid, dans les colonnes d’El Watan en réponse à la question de savoir pourquoi l’Algérie a choisi de prendre une direction totalement opposée à celle recommandée par le FMI pour lutter contre l’inflation.
Ce dernier a en effet préconisé les autorités, dans son dernier rapport, de s’éloigner d’une politique monétaire «accommodante».
Cette question pourtant occupe aujourd’hui une place centrale dans les débats politique et économique du pays.
Dans son discours d’investiture pour un second mandat, le président Abdelmadjid Tebboune a montré toute l’importance que requiert ce sujet qui se situe au cœur même de la problématique du pouvoir d’achat des Algériens. Il a, à l’occasion, réaffirmé sa volonté de s’attaquer à ce phénomène qui reste quand même assez préoccupant.
«Nous protégerons le pouvoir d’achat en luttant contre l’inflation dans une limite qui ne dépasse pas les 4,5%, en maîtrisant les prix, notamment les prix de première nécessité et en augmentant une nouvelle fois les allocations et les salaires», a-t-il déclaré. Il est à souligner que ce n’est pas la première fois que le chef de l’Etat évoque cet objectif. Fin mars dernier, il avait annoncé que l’Etat œuvrerait à réduire le taux d’inflation à 4% en vue de préserver le pouvoir d’achat, et ce, dans un contexte de désinflation mondiale. Il avait alors précisé, repris par l’APS, qu’il était impératif de «réduire le taux d’inflation, qui oscille actuellement entre 7% et 8% à 4% maximum».
Afin d’augmenter le pouvoir d’achat des ménages, l’Exécutif compte s'arc-bouter sur la lutte contre l’inflation, l’augmentation des salaires et l’institution de l’allocation chômage, et la défense de la valeur du dinar. Telle est la stratégie mise en place.
De même qu’il envisage d’augmenter le volume des investissements en invoquant le nombre important de projets inscrits à l’agence algérienne de promotion des investissements (AAPI), estimés, selon lui, à près de 6000 projets dont «la moitié a été lancée». L’on s’attend à ce que ces projets se concrétisent en 2026. Dans la même foulée, il escompte une augmentation totale des salaires (100%) d’ici 2026-2027, en ayant à compléter les 53% restants de cette augmentation.
Tendance baissière
Dans toute cette stratégie, il apparaît ainsi que la lutte contre l’inflation revêt une importance particulière dès lors que l’enjeu consiste à empêcher que ce phénomène rogne ces augmentations et donc le pouvoir d’achat. Est-il possible que l’inflation soit une inflation importée et non locale ainsi que le soutenait le ministre des Finances dans un entretien à El Watan en juin dernier ? «Le gouvernement a choisi de lutter contre l’inflation pour ramener son niveau à la baisse. La preuve, l’inflation est en train de diminuer et les derniers rapports de la Banque africaine de développement (BAD) et de la Banque mondiale (BM) attestent de la diminution de ce taux d’inflation. Et puis, dans le passé, la grande partie de cette inflation est une inflation importée. En effet, les prix sur le plan international ont sensiblement augmenté. Tout ce qu’on importait était grevé d’inflation», a-t-il argumenté. Mais force est d’admettre que l’inflation en Algérie reste toujours importante.
Dans le rapport de la Banque d’Algérie de 2023, l’évolution des prix fait ressortir, au niveau du Grand Alger, «une décélération appréciable» de l’inflation globale qui passe de 9,29% à fin 2022 à 7,84% à fin 2023. «Au cours de l’année 2023, cette dynamique de décélération de l’inflation est perceptible dès le début du second semestre de 2023. En effet, l’inflation est passée de 10,14% en mai 2023 à 7,84% en décembre 2023, soit une baisse appréciable de 2,30 points de pourcentage en un semestre.»
Cette tendance baissière de l’inflation globale s’explique principalement par la décélération de celle des prix des produits alimentaires (10,25% en décembre 2023 contre 14,77% en mai 2023 et 13,58% en décembre 2022) ainsi que des prix des produits du groupe «Education, culture et loisir» (4,73% en décembre 2023 contre 16,94% en mai 2023 et 12,51% en décembre 2022)», a-t-on expliqué. Selon Laaziz Faid, les produits frais «constituent 40% du panier (pour le calcul de l’inflation, ndlr)».
Pour sa part, le FMI, dans ses projections livrées dans un communiqué fin mars dernier, considère que si le taux d’inflation était de 9,3% en 2022 et 2023, ce dernier continuera de fréquenter les hauteurs avec 7,6% en 2024 et 6,4% en 2025 puis 6,1% en 2026. Ce taux ne commencera à baisser, selon la même source, qu’à partir de 2027 pour atteindre durant cette année 5,5%, 5,2% (2028), 5,0% (2029).
Ces projections seront-elles démenties ? Wait and see.