Les artisans activant dans la capitale sont de plus en plus nombreux à intégrer le circuit formel afin d’assurer la pérennité de leurs activités et préserver ainsi le patrimoine culturel national, a fait constater le directeur de la Chambre d’artisanat et des métiers d’Alger (CAM).
Outre la couverture sociale et l’éligibilité aux crédits bancaires, les artisans inscrits au niveau des chambres peuvent bénéficier de formations dans les domaines ayant trait à la gestion de leurs micro-entreprises et la commercialisation de leurs produits, a expliqué M. Mourad Saïdani, directeur de la Chambre.
Parmi les modules dispensés par la chambre au profit des artisans, M. Saïdani a cité notamment la comptabilité, le marketing ainsi que le design qui permet aux artisans d’adapter leurs produits aux besoins du marché tout en gardant la touche traditionnelle. «En plus de l’accompagnement des artisans et le développement de leurs compétences en matière de vente et de gestion, nous avons également le souci de sauvegarder ce patrimoine culturel national qui se transmet de génération en génération au niveau des foyers et des ateliers familiaux», a-t-il assuré.
A ce titre, il a cité le tissage, la tapisserie, la broderie à la main, la dinanderie, la poterie et bien d’autres activités traditionnelles qu’il «faudrait absolument pérenniser et protéger» face à la concurrence des produits industriels importés. «Nous avons même l’espoir de ressusciter l’apprentissage de ces métiers au niveaux des centres de formation professionnelle», a-t-il ajouté.
22 628 artisans enregistrés au niveau d’Alger
Abondant dans le même sens, le chef de service du registre de l’artisanat et des métiers de la chambre d’Alger, Fayçal Raki, a souligné l’intérêt croissant des artisans à travailler dans la légalité pour évoluer dans leurs métiers et sortir de la précarité. «Actuellement, la chambre compte 22 628 artisans», a-t-il déclaré, estimant que ce chiffre est en évolution.
Au premier trimestre 2022, le nombre de cartes d’artisan délivrée par la CAM a augmenté de 18,2%, par rapport à la même période de 2021, avec 780 nouveaux artisans inscrits, selon le même responsable. «Les artisans activant dans la confection du pain traditionnel viennent en tête de liste avec 109 inscrits, suivis des couturiers spécialisés dans les tenues traditionnelles avec 79 inscrits», a-t-il détaillé. En 2021, le nombre d’artisans enregistrés au niveau de la CAM avait évolué de 18% par rapport à l’année d’avant, en passant de 1148 à 1403 artisans, a indiqué M. Raki. A propos des artisans qui possèdent un savoir-faire mais qui n’ont pas de diplôme, généralement des personnes ayant appris sur le tas ou hérité du métier de leur parents, il a souligné que la CAM, avant de leur attribuer la carte d’artisan, les soumet à l’appréciation de son comité de qualification pour une reconnaissance de leur acquis professionnels. Les moins performants sont alors orientés vers des centres de formation.
La carte d’artisan : sortir de l’ombre de l’informel
Parmi les artisans rencontrés à la CAM, Samir, un diplômé de l’école d’horticulture du Jardin d’essais du Hamma. Venu déposer son dossier au niveau de la chambre pour acquérir sa carte d’artisan, cet horticulteur avoue travailler depuis 25 ans sans couverture sociale. «Nous sommes dans le domaine de l’aménagement des espaces verts, le traçage des grands espaces et la plantation des vergers», a-t-il précisé, estimant qu’il était temps pour lui de travailler en toute légalité. «D’autant qu’il y a de plus en plus d’entreprises qui nous exigent la facturation de nos prestations, chose qu’on ne peut pas faire en dehors du cadre légal», a-t-il dit.
Malika, elle, est titulaire d’un diplôme dans la confection des gâteaux traditionnels et orientaux délivré par une école privée. Pour cette quadragénaire, la carte d’artisan est le sésame qui lui ouvrira les portes de la réussite et la prospérité après avoir travaillé dans l’ombre pendant plus de 10 ans. Elle ambitionne ainsi d’ouvrir un local de production et de commercialisation à l’ouest d’Alger, un commerce qu’elle compte gérer avec ses deux sœurs et son mari au chômage.
Après l’obtention de son diplôme, Malika s’est perfectionnée davantage en multipliant les formations pratiques au niveau des ateliers d’apprentissage tenus par des chefs artisans spécialisés. «Ce sont des formations courtes, allant de 3 à 7 jours, qui sont très onéreuses mais ça vaut le coup car nous apprenons vite et bien», a-t-elle assuré. Très positive, cette mère de 4 enfants se dit optimiste quant à la réussite de son projet. «J’ai déjà ma clientèle qui a toujours apprécié mes gâteaux lorsque je travaillait à domicile et je compte m’y lancer davantage par le biais des réseaux sociaux», a-t-elle confié.