En guerre contre les tabloïds britanniques, le prince Harry a créé la surprise lundi en se présentant devant la Haute-Cour de Londres pour une audience contre l'éditeur du Daily Mail, accusé par plusieurs célébrités d'avoir recueilli des informations de manière illégale. Il s'agit d'une apparition rarissime d'un membre de la famille royale britannique devant la justice. Arrivé en taxi, le prince âgé de 38 ans a pris place dans le fond de la salle d'audience, où il a été rejoint en début d'après-midi par le chanteur Elton John. Lors de l'audience qui doit durer quatre jours, l'éditeur du Daily Mail, Associated Newspaper (ANL), tente de faire échouer les poursuites engagées par le fils cadet de Charles III mais aussi, outre Elton John, l'actrice Liz Hurley. Le déplacement surprise à Londres du prince Harry, son premier connu au Royaume-Uni depuis la mort de la reine Elizabeth II début septembre, intervient à un peu plus d'un mois du couronnement du roi le 6 mai. Exilés aux Etats-Unis après avoir quitté avec fracas la monarchie en 2020, Harry et son épouse Meghan ont été invités à la cérémonie, mais n'ont pas encore fait savoir publiquement s'ils honoreront l'invitation. Le retour des "Sussex" au Royaume-Uni pour assister au couronnement fait l'objet de nombreuses spéculations dans les médias britanniques ces derniers mois, après les attaques virulentes du couple contre la famille royale. Après un documentaire diffusé sur Netflix en décembre, Harry a publié début janvier ses mémoires controversés intitulés "Le Suppléant", dans lesquels il raconte son adolescence marquée par la drogue et l'alcool et détaille la rupture de ses relations avec son père, le roi Charles III, et son frère William. Harry ne devrait rencontrer ni l'un ni l'autre dans les jours qui viennent, selon des médias britanniques. Le roi devait initialement être absent du Royaume-Uni lundi et mardi pour une visite d'Etat en France, qui a été reportée en raison du climat social des manifestations parfois violentes liées à la réforme des retraites du président Emmanuel Macron. Il se rend mercredi en Allemagne.
"Diffamations grotesques"
Le prince Harry tient pour responsable la presse à scandale de la mort de sa mère Diana en 1997 dans un accident de voiture à Paris, poursuivie par les paparazzis. Il l'accuse de traiter son épouse de la même manière et a lancé plusieurs procédures contre des médias. Dans la procédure engagée à Londres, les sept plaignants affirment avoir été victimes de "nombreux actes illicites" de la part ou pour le compte d'ANL, selon les conclusions de leur avocat, David Sherborne. Parmi eux figurent "des interceptions illégales de messages vocaux, des écoutes téléphoniques, l'obtention d'informations privées comme des factures téléphoniques ou des relevés médicaux par tromperie" en recourant à des détectives privés, selon l'avocat. La plupart des faits dénoncés remontent à la période 1993-2011, certains datant de 2018. S'efforçant de torpiller ces poursuites, l'avocat de l'éditeur, Adrian Beltrami, fait valoir dans ses conclusions qu'elles interviennent tardivement. Son argumentaire écrit répond notamment aux documents préliminaires du prince Harry, qui a invoqué le climat de "suspicion et paranoïa" induit par les articles litigieux, tant et si bien que des amitiés ont été rompues car "tout le monde devenait un suspect". Lors de l'annonce de cette procédure début octobre dernier, le groupe avait dénoncé "une tentative planifiée et orchestrée pour entraîner les titres du Mail dans le scandale des écoutes téléphoniques concernant des articles vieux de 30 ans". La presse britannique avait été secouée il y a une dizaine d'années par plusieurs scandales d'écoutes illégales. Il s'agissait au début de l'affaire en 2005 d'écoutes dans les messageries de collaborateurs des princes William et Harry mais l'émotion avait culminé à l'été 2011 lorsque le tabloïd News of the World avait écouté la boîte vocale d'une collégienne disparue et finalement retrouvée morte, Milly Dowler. Les révélations avaient débouché sur la fermeture en catastrophe du tabloïd dominical du magnat des médias Rupert Murdoch, qui avait versé deux millions de livres (2,3 millions d'euros de l'époque) à la famille de Milly Dowler dans un accord à l'amiable.