Agitation de la classe politique en france autour d’un couplet de l’hymne national : Quand la droite française s'en prend à Qassaman

19/06/2023 mis à jour: 03:39
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Photo : D. R.

Il a fallu une question à la ministre Catherine Colonna pour que la décision algérienne sur le couplet manquant de Qassaman fasse polémique. Jamais en France on n’aura aussi bien compris l’hymne national algérien.

En France on a La Marseillaise et le «sang impur… dans nos sillons». En Algérie, né en pleine guerre anticoloniale, on a un passage de l’hymne national virulent sur la France. Passage écarté puis remis dans le chant patriotique récemment par une décision présidentielle algérienne de réintégrer le troisième couplet de l’hymne national Qassaman. Cette mesure a d’abord été rapportée en France comme une info, sans plus.

Mais où commence l’information, où s’arrête la politique ? Pas facile de déceler la frontière entre les deux domaines. Sur la chaîne d’info en continu LCI, la ministre des Affaires étrangères, Catherine Colonna, a été interrogée sur ce couplet qui dit : «Ô France ! le temps des palabres est révolu ; Nous l’avons clos comme on ferme un livre Ô France ! Voici venu le jour où il te faut rendre des comptes. Prépare-toi ! Voici notre réponse. Le verdict, notre Révolution le rendra. Car nous avons décidé que l’Algérie vivra. Soyez-en témoin ! Soyez-en témoin ! Soyez-en témoin ! (Qassaman, Qassaman).»

En raison de sa fonction de chef de la diplomatie, elle a d’abord rappelé que ce texte a été produit dans un «contexte de la décolonisation». Avant de regretter que cela puisse «apparaître à contretemps», même si «le contexte de l’époque l’explique». Et bien entendu, la ministre a expliqué ce «contretemps» par l’agenda de la visite pour l’instant en suspens du président Tebboune en France. Prévue en mai, puis reportée en juin, elle n’est toujours pas fixée.

Catherine Colonna se demandant ainsi la raison de «la décision d’étendre l’usage d’un hymne qui date d’une autre époque au moment même où le président de la République, Emmanuel Macron, et le président algérien, Abdelmadjid Tebboune, ont décidé, à l’été dernier, de donner un nouvel élan à nos relations».

Et une fois de plus, l’ancien ambassadeur en Algérie, Xavier Driencourt, est monté au créneau, comme pour le dossier des Accords franco-algériens de 1968. Devenu porte-parole dont on ne sait quel donneur d’ordre, il a fustigé l’Algérie pour un couplet daté et à remettre dans son contexte, le nommant couplet «anti-français». Il a estimé qu’«en le remettant dans le débat politique, les autorités algériennes ont délibérément rouvert un débat qui n’avait pas lieu d’être. Pour quelle raison si ce n’est la volonté de gêner Paris ? C’est donc le signe que la ‘‘rente mémorielle’’ reste bien l’alpha et l’oméga du système algérien.

La France croit que ses gestes apaiseront Alger, mais finira par se demander si le jeu en vaut la chandelle…» Tout dépend qui s'arroge le privilège de tenir la chandelle ? Faut-il rappeler qu’un hymne national, peu importe son contenu, est une compétence souveraine de tout pays. Et de nombreuses nations ont des paroles acerbes, revanchardes ou violentes dans leurs hymnes nationaux.

Deuxième point à propos de la rente mémorielle, c’est aussi une question de vases communicants. En France, de nombreux historiens le disent avec clarté : il est urgent de clarifier ou de purger le passif colonial pour l’intérêt commun de part et d’autre de la Méditerranée. Ceci en dehors des considérations politiques ou géopolitiques du moment.

Ainsi en est-il de la visite du président algérien en Russie, qui interroge en France où tout le monde est censé s’aligner sur la coalition occidentale dans la guerre en Ukraine. On attend à présent les commentaires médiatiques sur le fait que l’Algérie, neutre en la matière, a choisi de faire un pas vers la médiation dans le conflit russo-ukrainien. 

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