Entre 2014 et 2022, 3,2 millions de Marocains ont basculé dans la pauvreté, selon une note du Haut-Commissariat au plan marocain (HCP) publiée en octobre 2022.
Une note qui fait état d’une augmentation alarmante de la pauvreté au Maroc avec, en prime, un retour à la case départ – celle du niveau de pauvreté de 2014 –, ont révélé cette semaine des médias marocains, sur fond de manifestations contre la cherté de la vie à travers tout le royaume. «Sept années de lutte contre la pauvreté s’évaporent littéralement», déplore Rachid Achachi dans une chronique publiée la semaine passée dans le média Le 360, proche du palais royal. «Mauvaise nouvelle : la pauvreté risque de toucher de plus en plus de Marocains, notamment dans le monde rural», annonçait, pour sa part, le quotidien Libération, proche du parti de gauche USFP. La note du HCP révèle que 45% de la détérioration de la situation sociale au Maroc est due à la Covid-19 tandis que la flambée des prix des biens a contribué à hauteur de 55% à la pauvreté et à la vulnérabilité des Marocains.
La crise sanitaire et l’inflation ont contribué à une baisse du niveau de vie de 7,2% sur le plan national entre 2019 et 2022, explique le HCP. Les ménages déjà défavorisés ont vu le niveau de vie baisser de 8% par personne, entre 2019 et 2022.
Corrélativement, les dépenses alimentaires ont baissé de 11% par personne au niveau national en 2022, 12,9% en milieu rural et 10,1% en milieu urbain. Dans son dernier rapport, intitulé «Le Maroc face aux chocs d’offres», la Banque mondiale (BM) constate une forte inflation en ce début de l’année 2023. «Après un fort rebond post-Covid-19 l’an dernier, l’économie marocaine a subi la pression croissante de chocs d’offres se chevauchant : une grave sécheresse couplée à la flambée des prix des matières premières qui ont nourri l’inflation», lit-on dans le rapport. La BM estime, selon le même rapport, que «les risques de détérioration persistent en raison des tensions géopolitiques, notamment le conflit en Ukraine, la décélération des principaux partenaires commerciaux de la zone euro et les nouveaux chocs climatiques potentiels».
Elle révèle, en outre, une croissance réelle du PIB en forte chute, passant de 7,9% en 2021 à 1,2% en 2022, tandis que le déficit de la balance courante a augmenté de 2,3% à 4,1% du PIB. Dans un autre rapport publié le 11 janvier dernier, la BM prévoit une baisse de la croissance pour le Maroc en 2023 de 4,3% à 3,5%. Une baisse due en partie à la détérioration du secteur agricole du fait de la sécheresse qui a fortement sévi en 2022.
Le rapport Davos 2023 du Forum économique mondial, publié le 14 janvier dernier, dresse le même constat que celui établi par l’instance monétaire mondiale. Il souligne que «le Maroc est sérieusement menacé par la crise du coût de la vie, ainsi que l’inflation, la hausse sévère des produits de base, les risques d’approvisionnement et la dette».
L’inflation, qui est la cause essentielle des récentes manifestations de rue, a atteint un pic : 9,4% au premier trimestre de 2023 contre 4% à la même période l’an dernier. A fin 2022, l’inflation se maintenait en hausse à 8,3%, «son plus haut niveau depuis trente ans dans ce pays», selon des experts cités par l’APS. Cette inflation est accentuée par la montée en flèche des prix des produits alimentaires (+18,2%) en plein mois sacré du Ramadhan. Parallèlement, la Banque centrale du Maroc (BAM) a relevé en mars son taux directeur de 50 points de base, à 3%, afin d’enrayer la hausse des prix qui affecte les ménages modestes et vulnérables.
C’est la troisième fois que la BAM augmente son taux directeur depuis septembre 2022. Dans ce contexte, le Maroc a, encore une fois, eu recours à l’endettement extérieur. Il s’est vu attribuer, lundi dernier, une nouvelle ligne de crédit du Fonds monétaire international (FMI).
Le Conseil d’administration du FMI a, en effet, approuvé un accord de deux ans en faveur du Maroc avec un montant fixé à environ 5 milliards de dollars. La dette extérieure du Maroc avait atteint un niveau inquiétant avec plus de 65,41 milliards de dollars à fin 2021, faisant de lui le 5e pays africain le plus endetté du continent, selon la BM.