La 2e édition de Handicap mental s’est tenue samedi à Alger. Cette nouvelle édition du séminaire a notamment permis à des jeunes en situation de handicap de partager les expériences.
Il s’appelle Hssisen, il a 24 ans. Il occupe le poste d’agent bureautique au sein de l’association El Moustakbel, pour l’autisme et les maladies rares. Hssisen s’épanouit pleinement dans son travail et mène une vie ordinaire au sein de sa famille. «Je suis passionné par l’informatique. Aujourd’hui, je m’occupe de tous les problèmes informatiques qui peuvent survenir au bureau», raconte-t-il, tout fier.
Pourtant, le jeune homme est atteint du syndrome d’Hallermann-Streiff-François, une maladie congénitale très rare associée à une petite stature, des malformations du crâne et de la face. «A la maison, Hssisen ne bénéficie d’aucun traitement de faveur. Il est traité de la même manière que ses frères et sœurs», affirme son père Mouloud Moutchou, fondateur de l’association El Moustakbel et éducateur spécialisé.
«L’idée même de créer cette association est justement survenue suite à sa naissance en 1999. Et avec sa mère, nous avons mené le parcours du combattant pour faire de lui ce qu’il est aujourd’hui», confie M. Moutchou.
En effet, Hssisen a fait énormément d’efforts et est même «le seul parmi les 200 cas d’Hallermann-Streiff-François dans le monde à parler», affirme M. Moutchou, en marge de la 2e édition de Handicap mental, tenue samedi et animée par M. Agraniou, président fondateur d’association, consultant, formateur et ancien directeur pédagogique d’institutions pour personnes en situation de handicap mental.
De son côté, Mme Amel Brahimi, business unit manager chez Magpharm, explique que «Parcours différents» est un mouvement qui a pour objectif l’insertion de l’handicap mental, appelé maintenant défit mental. «Notre objectif ultime est qu’ils trouvent du travail, qu’ils se marient et qu’ils soient des membres qui fassent grandir l’Algérie. Pour y arriver, on a eu recours au chemin de la formation.
Car il vaut mieux dans la vie apprendre à une personne à faire la chose au lieu de l’assister à le faire», poursuit-elle. «Il s’agit en fait d’une action satellite de la fondation Adam et dont l’initiateur est M. Agraniou. C’est d’ailleurs lui qui nous a ramené Alberto Zucconi, un imminent psychologue, pour parler de l’approche centrée sur la personne ou comment faire la chose à une personne et ce, en détectant simplement son point fort et le faire grandir», soutient Mme Brahimi. Ainsi, et lors de cette 2e édition, tenue sous le thème «Handicap mental, changer de regard et agir ensemble», des jeunes en situation de handicap ont pu partager leurs expérience et réalisations et expliquer comment ils ont réussi à surmonter leur handicap et réaliser de grandes choses.
C’est d’ailleurs le cas d’Ahmed Meddad. Atteint du syndrome de Williams, aussi appelé syndrome de Williams-Beuren, Ahmed a raconté son parcours et comment il a réussi, à force de persévérance, à se hisser à la première place d’un concours de céramique en Espagne. «Je me suis essayé à de nombreuses activités. Mais c’est dans la céramique que je m’y suis le mieux retrouvé», a-t-il confié.
A cet effet, sa maman Mme Faïza, éducatrice spécialisée et également fondatrice et présidente de l’Association syndrome Williams et Beuren raconte : «Au départ, rien n’était simple. Il fallait que je me renseigne beaucoup. J’ai dû suivre de nombreuses formations afin de bien comprendre la maladie de mon fils».
Et le syndrome dont souffre Ahmed est en fait une maladie génétique chromosomique monosomique liée à la perte d’un petit fragment d’un chromosome (microdélétion) qui associe un déficit intellectuel, une malformation du cœur et des caractéristiques physiques et comportementales particulières.
Déterminée à accompagner son fils dans son parcours, Mme Faïza ne lâche rien. «J’ai bien vu qu’il n’était pas épanoui à l’école. Je l’ai donc inscrit dans des centres de formation. Il a tenté plusieurs choses, notamment la cuisine. Malheureusement, ça n’a rien donné. Mais une fois qu’il a découvert la céramique, sa vie a changé», se rappelle-t-elle. Selon la maman d’Ahmed, c’est l’atmosphère calme et apaisante du monde de la céramique qui a captivé l’attention du jeune homme. D’autant plus que dans la céramique, les 5 sens sont mis à profit.
Aujourd’hui, Ahmed est marié et mène une vie paisible. «Il mène une vie ordinaire avec sa femme, en dépit du fait que celle-ci souffre aussi d’un handicap moteur. Ils ont une relation fusionnelle et communiquent de manière extraordinaire», a conclu Mme Faiza. Un invité de marque était également présent lors de cette 2e édition de «Handicap mental».
Il s’agit d’Alberto Zucconi, psychologue et psychothérapeute italien et surtout élève de Carl Rogers. «Je suis présent aujourd’hui pour exposer les résultats d’une approche scientifique appelée Approche centrée sur la personne (ACP). Il s’agit d’une méthode de psychothérapie développée par le psychologue américain Carl Rogers dans les années 1950, et qui s’appuie sur le processus relationnel ‘‘thérapeute-patient’’ et sur la capacité de réalisation de ce dernier», a-t-il expliqué.
«Il est prouvé scientifiquement que ces personnes peuvent réaliser de grandes choses. Il suffit de croire en eux et en leur potentiel», poursuit-il. «En fait, tout le monde serait gagnant si on croyait en les capacités des uns et des autres. Cela créerait même une société encore plus riche. Ceci n’est pas seulement des paroles qui émanent du cœur mais c’est ce qu’affirme la science», précise-t-il.
M. Zucconi a aussi tenu à faire passer un message aux parents dont les enfants ont des besoins spécifiques : «Il ne faut surtout pas qu’ils oublient que le meilleur remède est l’amour qu’ils leur portent.» A noter que l’événement fut aussi l’occasion d’honorer les fondateurs d’associations, engagés dans l’accompagnement des personnes en situation de handicap.