Inde : La Cour suprême confirme le retrait de l’autonomie du Cachemire

12/12/2023 mis à jour: 09:00
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La Cour suprême de l’Inde a avalisé hier la décision du gouvernement du Premier ministre, Narendra Modi, de mettre fin au statut semi-autonome du Cachemire, foyer d’une insurrection depuis des décennies, rapporte l’AFP. 

La décision de 2019, qui permettait à New Delhi d’administrer directement la région de Jammu-et-Cachemire à majorité musulmane, a représenté «un aboutissement du processus d’intégration et, en tant que tel, un exercice valide du pouvoir», a déclaré la plus haute juridiction du pays dans son verdict. Narendra Modi a immédiatement salué cette décision, qu’il a qualifiée d’«historique».

 C’est «une lueur d’espoir, la promesse d’un avenir meilleur et un témoignage de notre détermination collective à construire une Inde plus forte et plus unie», a affirmé le dirigeant nationaliste hindou sur X (ex-Twitter). La Cour suprême de l’Inde a en outre ordonné hier la tenue d’élections dans le Jammu-et-Cachemire l’an prochain, estimant que celui-ci devait être mis sur un pied d’égalité avec les autres Etats indiens «au plus tôt et dès que possible», avec un scrutin à organiser d’ici le 30 septembre 2024. 

La révocation de l’autonomie limitée du Cachemire s’est accompagnée de l’imposition d’un pouvoir direct de New Delhi, d’arrestations massives, d’un bouclage total de cet Etat et d’une coupure des communications qui ont duré des mois, l’Inde ayant renforcé ses forces armées dans la région pour contenir les manifestations. Cette décision a été contestée par les partis politiques du Cachemire favorables à l’Inde, par l’Ordre des avocats local et par des particuliers, ce qui a abouti au verdict d’hier. 

La politique musclée du Premier ministre Modi a été très controversée au Cachemire, mais elle a été largement célébrée dans toute l’Inde, l’insurrection qui a fait des dizaines de milliers de morts pendant des décennies s’étant en grande partie apaisée. Les autorités ont déployé des centaines de soldats, de troupes paramilitaires et de policiers dans la ville principale de Srinagar afin de contrecarrer toute manifestation. La suppression de l’article 370 est un élément-clé du programme du parti nationaliste hindou Bharatiya Janata (BJP) depuis sa création, et la décision de la Cour suprême intervient avant les élections de l’an prochain. 

Kapil Sibal, l’un des avocats qui a plaidé pour que la révocation soit déclarée inconstitutionnelle, la Cour suprême ayant tenu des audiences à ce sujet pendant 16 jours, s’est montré philosophe. «Certaines batailles sont menées pour être perdues», a-t-il écrit sur X, avant même que le verdict ne soit révélé, affirmant que l’action en justice visait à s’assurer que «l’histoire enregistre les faits inconfortables pour que les générations puissent les connaître». «L’histoire seule est l’arbitre final de la boussole morale des décisions historiques», a-t-il ajouté. Depuis la suspension de l’article 370 en 2019, les autorités indiennes ont restreint la liberté des médias et les manifestations publiques, limitant ainsi drastiquement les libertés civiles. 

Les changements ont permis aux Indiens extérieurs à la région d’y acheter des terres et de rechercher des emplois gouvernementaux et des bourses d’études, une politique dénoncée par les défenseurs des droits comme un «colonialisme de peuplement». 
 

Le Cachemire est divisé entre l’Inde et le Pakistan qui, depuis leur indépendance en 1947, revendiquent la souveraineté sur la totalité de ce territoire himalayen. Il a été la cause de deux des trois guerres qui les ont opposés depuis. La partie administrée par l’Inde a connu plus de trois décennies de troubles, qui ont fait des dizaines de milliers de morts. Delhi accuse le Pakistan de soutenir les séparatistes, ce qu’Islamabad réfute. 

Depuis 2019, l’insurrection séparatiste a été en grande partie écrasée au Cachemire indien, même si des jeunes continuent de la rejoindre. Plus d’un demi-million de soldats indiens sont déployés sur le territoire pour contrôler l’insurrection qui a éclaté en 1989. En 2023, un peu plus de 120 personnes ont été tuées, dont les deux tiers étaient des insurgés.
 

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